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sont membres d’un état ; mais la plûpart de ces mêmes droits s’étendent aussi sur les étrangers, lesquels sont soumis aux lois générales de police de l’état pendant tout le tems qu’ils y demeurent & pour les biens qu’ils y possedent, quand même ils n’y demeureroient pas.

Les engagemens de celui ou ceux auxquels la puissance publique est déférée, sont de maintenir le bon ordre dans l’état.

Les membres de l’état doivent de leur part être soûmis à la puissance publique, & aux personnes qui la représentent dans quelque portion du gouvernement ; ils doivent pareillement être soûmis aux lois, & les observer.

Le bien commun & particulier de chacun des membres de l’état, qui forme en général l’objet du droit public particulier, renferme en soi plusieurs objets dépendans de celui-ci, & qui en forment quelque portion plus ou moins considérable.

Tout ce qui a rapport au gouvernement ecclésiastique civil, de justice militaire ou des finances, est donc du ressort du droit public.

Ainsi c’est au droit public à régler tout ce qui concerne la religion, à prévenir les troubles que peuvent causer les diverses opinions, faire respecter les lieux saints, observer les fêtes, & autres regles de discipline relatives à la religion ; conserver dans les cérémonies pieuses l’ordre & la décence convenable ; empêcher les abus qui peuvent se commettre à l’occasion des pratiques les plus saintes, & qu’il ne se forme aucuns nouveaux établissemens en matiere de religion, sans qu’ils soient approuvés de ceux qui ont le pouvoir de le faire. Il faut seulement faire attention que le soin de maintenir la religion dans sa pureté, & d’en faire observer le culte extérieur, est confié aux deux puissances, la spirituelle & la temporelle, chacune-selon l’étendue de son pouvoir.

On doit aussi comprendre sous ce même point de vûe ce qui concerne le clergé en général, les différens corps & particuliers dont il est composé, soit séculiers ou réguliers, & tout ce qui a quelque rapport à la religion & à la piété, comme les universités, les colléges & académies pour l’instruction de la jeunesse, les hôpitaux, &c.

Le droit public envisage pareillement tout ce qui a rapport aux mœurs, comme le luxe, l’intempérance, les jeux défendus, la décence des spectacles, la débauche, le fréquentation des mauvais lieux, les juremens & blasphèmes, l’Astrologie judiciaire, & les imposteurs connus sous le nom de devins, sorciers, magiciens, & ceux qui ont la foiblesse de se laisser abuser par eux.

Comme le droit public pourvoit aux biens de l’ame, c’est-à-dire à ce qui touche la religion & les mœurs, il pourvoit aussi aux biens corporels : de là les lois qui ont pour objet la santé, c’est-à-dire de conserver ou rétablir la salubrité de l’air & la pureté de l’eau, la bonne qualité des autres alimens, le choix des remedes, la capacité des medecins, chirurgiens ; les précautions que l’on prend contre les maladies contagieuses.

C’est aussi une suite du même objet de pourvoir à ce qui concerne les vivres, comme le pain, le vin, la viande & les autres alimens, tant par rapport à la culture, pour ceux qui en demandent, que pour la garde, transport, vente & préparation que l’on en peut faire, même pour ce qui sert à la nourriture des animaux qui servent à la culture de la terre ou aux voitures.

La distinction des habits selon les états & qualités des personnes, & le soin de réprimer le luxe, sont pareillement des objets du droit public de chaque état.

Les lois contiennent aussi plusieurs regles par rapport aux habillemens, comme ce qui concerne la

qualité que les étoffes doivent avoir ; la distinction des habits selon les états, & ce qui tend à réprimer le luxe.

Il pourvoit encore à ce que les bâtimens soient construits d’une maniere solide, & que l’on ne fasse rien de contraire à la décoration des villes ; que les rues & voies publiques soient rendues sûres & commodes, & ne soient point embarrassées : ce qui a produit une foule de réglemens particuliers, dont l’objet est de prévenir divers accidens qui pourroient arriver par l’imprudence des ouvriers, ou de ceux qui conduisent des chevaux ou voitures, &c.

Un des plus grands objets du droit public de chaque état, c’est l’administration de la justice en général ; mais tout ce qui y a rapport n’appartient pas également au droit public : il faut à cet égard distinguer la forme & le fond, les matieres civiles & les matieres criminelles.

La forme de l’administration de la justice est du droit public, en matiere civile aussi-bien qu’en matiere criminelle ; c’est pourquoi il n’est pas permis aux particuliers d’y déroger.

Mais la disposition des lois au fond pour ce qui touche les particuliers en matiere civile, est du droit privé ; ainsi les particuliers y peuvent déroger par des conventions, à moins qu’il n’y ait quelque loi contraire, auquel cas cette loi fait partie du droit public.

Pour ce qui est de la punition des crimes & délits, elle est entierement du ressort du droit public ; on ne comprend point dans cette classe certains faits qui n’intéressent que des particuliers, mais seulement ceux qui troublent l’ordre public directement ou indirectement, tels que les hérésies, blasphèmes, sacriléges, & autres impiétés ; le crime de lese-majesté, les rebellions à justice, assemblées illicites, ports d’armes, & voies de fait ; les duels, le crime de péculat, les concussions, & autres malversations des officiers ; le crime de fausse monnoie, les assassinats, homicides, empoisonnemens, parricides, & autres attentats sur la vie des autres ou sur la sienne ; l’exposition des enfans, les vols & larcins, les banqueroutes frauduleuses, le crime de faux, les attentats faits contre la pudeur, les libelles, & autres actes injurieux au gouvernement, &c.

On conçoit par ce qui vient d’être dit, que ce qui touche les fonctions des officiers de judicature, & autres officiers publics, est pareillement une matiere de droit public.

Le droit public de chaque état a encore pour objet tout ce qui dépend du gouvernement des finances, comme l’assiete & levée des impositions, la proportion qui doit être gardée dans la répartition, les abus qui peuvent se glisser dans ces opérations ou dans le recouvrement.

Enfin ce même droit embrasse tout ce qui a rapport à l’utilité commune, comme la navigation & le commerce, les colonies, les manufactures, les sciences, les arts & métiers, les ouvriers de toute espece, la puissance des maîtres sur leurs serviteurs & domestiques, & la soûmission que ceux-ci doivent à leurs maîtres, & tout ce qui intéresse la tranquillité publique, comme les réglemens faits pour le soulagement des pauvres, pour obliger les mendians valides de travailler, & renfermer les vagabonds & gens sans aveu.

Toutes ces matieres seroient fort curieuses à détailler ; mais comme on ne le pourroit faire sans répéter une partie de ce qui fait la matiere des articles Crime, Gouvernement, Puissance publique, & autres semblables, on se contentera de renvoyer à ces articles. (A)

Droit public ecclésiastique, ce sont les lois qui ont pour objet le gouvernement général de