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les véritables fondemens de la souveraineté sont la puissance, la sagesse, & la bonté jointes ensemble. Le but des lois n’est pas de gêner la liberté, mais de diriger convenablement toutes les actions des hommes.

Tels sont en substance les objets que M. Burlamaqui envisage dans la premiere partie de son traité ; dans la seconde, qui traite spécialement des lois naturelles, il définit la loi naturelle une loi que Dieu impose à tous les hommes, qu’ils peuvent découvrir & connoître par les seules lumieres de leur raison, en considérant avec attention leur nature & leur état.

Le droit naturel est le système, l’assemblage, ou le corps de ces mêmes lois.

La jurisprudence naturelle est l’art de parvenir à la connoissance des lois de la nature, de les développer, & de les appliquer aux actions humaines.

On ne peut douter qu’il y ait des lois naturelles, puisque tout concourt à nous prouver l’existence de Dieu ; lequel ayant droit de prescrire des lois aux hommes, c’est une suite de sa puissance, de sa sagesse, & de sa bonté, de leur donner des regles pour se conduire.

Les moyens qui servent à distinguer ce qui est juste ou injuste, ou ce qui est dicté par la loi naturelle, sont 1°. l’instinct ou un certain sentiment intérieur qui porte à de certaines actions ou qui en détourne : 2°. la raison qui sert à vérifier l’instinct ; elle développe les principes, & en tire les conséquences : 3°. la volonté de Dieu, laquelle étant connue à l’homme devient sa regle suprème.

L’homme ne peut parvenir à la connoissance des lois naturelles, qu’en examinant sa nature, sa constitution, & son état.

Toutes les lois naturelles se rapportent à trois objets ; à Dieu, à soi, ou à autrui.

La religion est le principe de celles qui se rapportent à Dieu.

L’amour de soi-même est le principe des lois naturelles, qui nous concernent nous-mêmes.

L’esprit de société est le fondement de celles qui se rapportent à autrui.

Dieu a suffisamment notifié aux hommes les lois naturelles ; les hommes peuvent encore s’aider les uns les autres à les connoître. Ces lois sont l’ouvrage de la bonté de Dieu, elles ne dépendent point d’une institution arbitraire ; leur effet est d’obliger tous les hommes à s’y conformer ; elles sont perpétuelles & immuables, & ne souffrent aucune dispense.

Pour appliquer les lois naturelles aux actions, c’est-à-dire en porter un jugement juste, on doit consulter sa conscience, qui n’est autre chose que la raison ; & lorsqu’il s’agit d’imputer à quelqu’un les suites d’une mauvaise action, il faut qu’il ait eu connoissance de la loi & du fait, & qu’il n’ait pas été contraint par une force majeure à faire ce qui étoit contraire au droit naturel.

L’autorité des lois naturelles vient de ce qu’elles ont Dieu pour auteur ; la fonction de ces mêmes lois, c’est-à-dire ce qui tend à obliger les hommes de s’y soûmettre, est que l’observation de ces lois fait le bonheur de l’homme & de la société ; c’est une vérité que la raison nous démontre, & dans le fait il est constant que la vertu est par elle-même le principe d’une satisfaction intérieure, comme le vice est un principe d’inquiétude & de trouble ; il est également certain que la vertu produit de grands avantages extérieurs, & le vice de grands maux.

La vertu n’a cependant pas toûjours extérieurement des effets aussi heureux qu’elle devroit avoir pour celui qui la pratique : on voit souvent les biens & les maux de la nature & de la fortune distribués inégalement, & non selon le mérite de chacun, les

maux produits par l’injustice tomber sur les innocens comme sur les coupables, & quelquefois la vertu même attirer la persécution.

Toute la prudence humaine ne suffit pas pour remédier à ces desordres : il faut donc qu’une autre considération engage encore les hommes à observer les lois naturelles ; c’est l’immortalité de l’ame & la croyance d’un avenir, où ce qui peut manquer dans l’état présent à la sanction des lois naturelles s’exécutera dans la suite, si la sagesse divine le trouve à propos.

C’est ainsi que notre auteur établit l’autorité du droit naturel sur la raison & la religion, qui sont les deux grandes lumieres que Dieu a données à l’homme pour se conduire.

L’avertissement qui est en tête de l’ouvrage, annonce que ce traité n’est que le commencement d’un ouvrage plus étendu, ou d’un système complet sur le droit de la nature & des gens, que l’auteur se proposoit de donner au public ; mais qu’ayant été traversé dans ce dessein par d’autres occupations & par la foiblesse de sa santé, il s’est déterminé à publier ce premier morceau. Quoique ce soit un précis excellent du droit naturel, on ne peut s’empêcher de desirer que l’auteur acheve le grand ouvrage qu’il avoit commencé, où l’on verroit la matiere traitée dans toute son étendue.

On peut encore voir sur cette matiere, ce que dit l’auteur de l’esprit des lois en plusieurs endroits de son ouvrage, qui ont rapport au droit naturel. (A)

Droit Papyrien, est la même chose que le code Papyrien. Voyez au mot Code.

Droit particulier, est opposé au droit commun & général ; ainsi les coûtumes locales ou les statuts d’une ville ou d’une communauté forment leur droit particulier.

Droit perpétuel, jus perpetuum, est le nom que les empereurs Dioclétien & Maximien donnerent à l’édit perpétuel ou collection des édits des préteurs faite par Salvius Julianus. Voyez Edit perpétuel. (A)

Droit politique, qu’on appelle aussi quelquefois politique simplement, ce sont les regles que l’on doit suivre pour le gouvernement d’une ville, d’une province, ou d’un état, ce qui rentre dans l’idée du droit public. Voyez Droit public & Droit des Gens. (A)

Droit de Pologne, est composé de trois sortes de lois ; savoir, 1°. des lois particulieres du pays, qui ont été faites par Casimir le Grand, Ladislas Jagello, Sigismond I. & Sigismond II. rois de Pologne ; il y a aussi quelques statuts & coûtumes particulieres pour certaines provinces ou villes. 2°. Au défaut de ces lois municipales on a recours au droit saxon. 3°. S’il s’agit d’un cas qui ne soit pas prévû par le droit saxon, ou sur lequel ce droit ne s’explique pas clairement, les juges n’ont pas le pouvoir de décider selon leurs lumieres, ils sont obligés de se conformer au droit romain. Voyez l’histoire de la Jurisprudence romaine, par M. Terrasson, & ci-après Droit saxon, Loi des Saxons. (A)

Droit de Portugal, est de deux sortes ; savoir, le droit royal composé des ordonnances des rois de Portugal, & le droit romain auquel on a recours pour suppléer ce que les lois du pays n’ont pas prévû. (A)

Droit positif, est celui qui est fondé sur une loi qui dépend absolument de la volonté de celui dont elle est émanée : on l’appelle ainsi par opposition au droit naturel propre aux hommes, lequel n’est autre chose que la lumiere de la droite raison sur ce qui regarde la justice, ou qui consiste dans une loi fondée sur la raison ; ainsi sous la loi écrite la défense de manger certains animaux étoit de droit