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maçonnerie du fourneau se trouve sous une cheminée qu’il ferme, ou reçoit un tuyau de tole ajusté à demeure, on pratique tout vis-à-vis la partie inférieure du tuyau, une porte h (voyez les fig.) de même largeur que ce fond, & même un peu plus bas, pour avoir la commodité de le nettoyer de toutes les saletés qui s’y amassent.

Ce fourneau sert aux mêmes usages que les fourneaux de fusion ordinaires, & les fourneaux à calciner & à coupeller. Quand on ne veut que fondre, on place les creusets comme à l’ordinaire, mais sur une tourte bien élevée, s’ils sont sans piés, parce qu’ils sont fort sujets à s’y féler. S’il ne faut qu’un feu doux, on ferme une partie du soupirail avec des carreaux destinés à cet usage, & l’on ne met point sur le fourneau le couvercle c (V. les fig.), à moins qu’on ne le veuille rendre bien foible & bien lent ; auquel cas on passe une brique sur le pont e (voy. les fig.), & l’on met le couvercle. On lui donne plus de force en laissant le soupirail ouvert, ainsi que le haut de la casse ; mais quand on veut un feu bien vif, on se contente d’y ajoûter le couvercle, & pour lors la casse, le reverbere & la cheminée ne font plus qu’un canal continu, qui augmente la rapidité & la vivacité du feu en raison de sa longueur. Il n’est pas besoin d’avertir que la porte g du reverbere (V. les fig.) ne doit s’ouvrir que quand on veut mettre ou retirer quelque vaisseau ; & la décharge h (même fig.) ne s’ouvre que quand on soupçonne le bas de la cheminée plein de saletés. Dans les fonderies où l’on fait usage d’un pareil fourneau, c’est pour avoir la facilité de faire un essai sur huit ou dix livres de matiere à-la-fois, qu’on torrefie à nud sur le sol, ou que l’on affine sur une cendrée qu’on y accommode à ce dessein ; & l’on peut malgré cela rotir & coupeller un quintal fictif de matiere seulement. Mais il faut employer à ce sujet le charbon de terre ou le bois ; car il m’est arrivé de ne pouvoir affiner dans un pareil fourneau avec le charbon de bois, quoique la casse en fût remplie ; & la mine de plomb à facettes spéculaires, pure, ne pouvoit même y devenir pâteuse, tant la chaleur que donne sa flamme est peu de chose. Ce n’est pas que cette flamme ne montât bien haut dans ce tuyau de tole ; mais il est à présumer qu’elle n’avoit pas assez de consistence pour faire beaucoup d’effet. Il est vrai que le charbon de terre non calciné donne un soufre qui n’est pas bien favorable à un essai en petit ; mais ce fourneau n’est pas destiné à cela : &, en effet, on sent bien qu’il ne peut manquer de devenir faux par cette raison, & par la chûte des cendres, qui doivent se vitrifier conjointement avec la matiere qu’on veut essayer, ou dont l’alkali peut former un foie avec le soufre de la mine que l’on traite ; ainsi le bois coupé menu comme du charbon, est à préférer pour cette espece de fourneau, que l’on convient être insuffisant dans plusieurs circonstances. Il ne faut toutefois pas s’imaginer qu’on puisse faire usage de la casse & du reverbere en même tems, fondre & coupeller tout-à-la-fois, parce qu’il arrive que ces deux opérations demandent des degrés de feu qui ne sont pas les mêmes, dans le même tems précisément, en supposant qu’on les commence toutes les deux à-la-fois. Si, par exemple, l’on a à réduire une mine de plomb, & du plomb à affiner en même tems, il peut arriver qu’il faille donner chaud à l’affinage, pendant que le feu devra être ralenti, pour attendre que l’effervescence de la réduction soit passée. On ne nie pas pour cela qu’un artiste exercé ne puisse combiner assez juste pour réunir deux genres d’opérations, dont l’une ne souffre point du régime du feu nécessaire à l’autre, & réciproquement.

Voici maintenant les proportions qu’on donne communément au fourneau d’essai à l’angloise qu’on

veut placer dans le laboratoire philosophique. Elles ont été communiquées par M. Baden fameux essayeur anglois, dont l’occupation consistoit uniquement à se transporter dans les fonderies mêmes où il étoit appellé pour les essais, ou à faire des cours de Docimastique ; & j’ai vû moi-même un fourneau construit en terre sur ses proportions, qui faisoit beaucoup plus d’effet qu’on n’auroit eu lieu de l’attendre, eu égard à sa grandeur. Il le faisoit construire quelquefois en briques de Windsor, dont les dimensions sont à-peu-près les mêmes que celles de nos briques de Bourgogne ; c’est-à-dire qu’elles ont 8 pouces de longueur environ, sur 4 ou 4 & demi de large, & sur 2 environ d’épaisseur, en comptant le trait de rustique. Il lui mettoit sept rangs de ces briques jusqu’à la grille du foyer, à laquelle il donnoit, ainsi qu’à la casse, 8 pouces de long sur 6 de large. Le soupirail doit avoir aussi 6 pouces de large, & être élevé jusqu’à la grille. La casse a 9 pouces de profondeur, & communique à un reverbere de même largeur, c’est-à-dire de 6 pouces, sur 4 de long, par un pont élevé d’un pouce & demi au-dessus du sol du reverbere, qui est éloigné de sa couverture de 3 pouces. Peu importe que ce pont soit épais ou mince : on le fait de briques, faute d’autre chose ; & pour lors il a, malgré qu’on en ait, 2 pouces d’épais. Le passage de la flamme, flew en anglois, est élevé d’un pouce au-dessus du sol du reverbere, & est surbaissé d’environ autant par le haut, afin de déprimer la flamme qui va gagner la cheminée, dont la largeur est de 9 pouces ; ainsi l’on doit concevoir que le fourneau commence à s’élargir immédiatement après qu’il s’est élevé par le bas, & qu’il s’est déprimé par le haut pour le passage de la flamme, qui est d’un pouce & un quart de haut. La cheminée a 4 pouces de large dans le bas, & se termine en un tuyau de 4 pouces de diametre, qu’on augmente avec un tuyau de tole. On couvre la casse d’un carreau de terre cuite, dont les bords excedent un peu les siens. Ce carreau est surmonté d’un bouton ou poignée pour le manier, comme celui de la figure. Pour rendre ce fourneau durable, on met à chaque côté, ainsi qu’en-devant, deux rangs de briques qu’on arme de cercles & barres de fer. Ceux qui se font en terre, durent & tiennent leur chaleur en raison de l’épaisseur qu’on leur donne, qui est arbitraire.

Nous allons passer aux opérations de Docimastique : notre but n’est point d’en donner un traité complet ; ceux qui voudront voir cette matiere exposée au long, doivent consulter les ouvrages mentionnés au commencement de cet article. Les opérations qui se font pour les essais, n’ont point d’autre définition générale que celles de la Chimie analytique ; elles ne sont, ainsi que celles de cette science, que les changemens qu’on fait subir à un corps, au moyen des instrumens de l’art, & selon les regles qu’il prescrit, à dessein de connoître la nature des substances qui entrent dans sa composition, & la quantité en laquelle elles s’y trouvent : derniere condition qui distingue l’essai de l’analyse pure & simple. Voyez Chimie. Je réduirai les opérations propres de Docimastique à la torréfaction, à la scorification, au départ concentré, à l’affinage & au raffinage, à l’inquart & au départ par la voie humide, a la liquation, & à quelques especes de cémentations ; & les préparatoires au lavage seulement. Toutes les autres, que M. Cramer met dans son catalogue, appartiennent à la Chimie philosophique. Mais il ne faut pas être étonné de cette erreur, elle est conséquente au principe qu’il a posé ; &, en effet, qui pourroit s’imaginer qu’un homme qui mérite avec raison le titre d’ingénieux que lui a donné son traducteur anglois dans son épître dédicatoire, & qui en donne des preuves continuelles dans son livre,