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grand maître & le medecin consommé. V. Régime.

On entend aussi, & très-communément, par la diete, l’abstinence qu’on garde en ne prenant point ou en ne prenant que peu de nourriture : ainsi faire diete, c’est ne point manger ou manger très-peu, & se borner à une petite quantité d’alimens le plus souvent liquides. Voyez Abstinence & Aliment.

Tout ce qui a rapport à la diete concernant les alimens sera traité plus au long dans les différens articles auxquels on a jugé à propos de renvoyer, surtout dans celui de régime. Voyez Régime. (d)

Diete, (Jurisprud.) au Maine, se dit pour assemblée d’officiers de justice, ou plûtôt pour chaque vacation d’inventaire & vente ou autre procès-verbal : en d’autres endroits on dit la diete d’un tel jour, pour la vacation d’un tel jour. (A)

DIETZ, (Géog. mod.) ville de la Vétéravie en Allemagne : elle est sitaée sur la Lohn. Long. 25. 35. lat. 50. 22.

DIEU, s. m. (Métaph. & Théol.) Tertullien rapporte que Thalès étant à la cour de Crésus, ce prince lui demanda une explication claire & nette de la Divinité. Après plusieurs réponses vagues, le philosophe convint qu’il n’avoit rien à dire de satisfaisant. Cicéron avoit remarqué quelque chose de semblable du poëte Simonide : Hieron lui demanda ce que c’est que Dieu, & il promit de répondre en peu de jours. Ce délai passé, il en demanda un autre, & puis un autre encore : à la fin, le roi le pressant vivement, il dit pour toute réponse : Plus j’examine cette matiere, & plus je la trouve au-dessus de mon intelligence. On peut conclure de l’embarras de ces deux philosophes, qu’il n’y a guere de sujet qui mérite plus de circonspection dans nos jugemens, que ce qui regarde la Divinité : elle est inaccessible à nos regards ; on ne peut la dévoiler, quelque soin qu’on prenne. « En effet, comme dit S. Augustin, Dieu est un être dont on parle sans en pouvoir rien dire, & qui est supérieur à toutes les définitions ». Les PP. de l’Eglise, sur-tout ceux qui ont vécu dans les quatre premiers siecles, ont tenu le même langage. Mais quelqu’incompréhensible que soit Dieu, on ne doit pas cependant en inférer qu’il le soit en tout : s’il en étoit ainsi, nous n’aurions de lui nulle idée, & nous n’en aurions rien à dire. Mais nous pouvons & nous devons affirmer de Dieu, qu’il existe, qu’il a de l’intelligence, de la sagesse, de la puissance, de la force, puisqu’il a donné ces prérogatives à ses ouvrages ; mais qu’il a ces qualités dans un degré qui passe ce que nous en pouvons concevoir, les ayant 1°. par sa nature & par la nécessité de son être, non par communication & par emprunt ; 2°. les ayant toutes ensemble & réunies dans un seul être très-simple & indivisible, & non par parties & dispersées, telles qu’elles sont dans les créatures ; 3°. les ayant enfin comme dans leur source, au lieu que nous ne les avons que comme des émanations de l’Etre infini, éternel, ineffable.

Il n’y a rien de plus facile que de connoître qu’il y a un Dieu ; que ce Dieu a éternellement existé ; qu’il est impossible qu’il n’ait pas éminemment l’intelligence, & toutes les bonnes qualités qui se trouvent dans les créatures. L’homme le plus grossier & le plus stupide, pour peu qu’il déploye ses idées & qu’il exerce son esprit, reconnoîtra aisément cette vérité. Tout lui parle hautement en faveur de la Divinité. Il la trouve en lui & hors de lui : en lui, 1°. parce qu’il sent bien qu’il n’est pas l’auteur de lui-même, & que pour comprendre comment il existe, il faut de nécessité recourir à une main souveraine qui l’ait tiré du néant ; 2°. au-dehors de lui dans l’univers, qui ressemble à un champ de tableau où l’ouvrier parfait s’est peint lui-même dans son œuvre, autant qu’elle pouvoit en être l’image ; il ne sauroit ouvrir les yeux

qu’il ne découvre par-tout autour de lui les traces d’une intelligence puissante & sans bornes.

L’éternel est son nom, le monde est son ouvrage.

Racine.

Voyez Démonstration, Création, &c.

C’est donc en vain que M. Bayle s’efforce de prouver que le peuple n’est pas juge dans la question de l’existence de Dieu.

En effet, comment le prouve-t-il ? C’est en disant que la nature de Dieu est un sujet que les plus grands philosophes ont trouvé obscur, & sur lequel ils ont été partagés. Cela lui donne occasion de s’ouvrir un vaste champ de réflexions aux dépens des anciens philosophes, dont il tourne en ridicule les sentimens. Après avoir fait toutes ces incursions, il revient à demander s’il est bien facile à l’homme de connoître clairement ce qui convient ou ce qui ne convient pas à une nature infinie ; agit-elle nécessairement ou avec une souveraine liberté d’indifférence ? connoît-elle ? aime-t-elle ? hait-elle par un acte pur, simple, le présent, le passé & l’avenir, le bien & le mal, un même homme successivement juste & pécheur ? est-elle infiniment bonne ? elle le doit être ; mais d’où vient donc le mal ? est-elle immuable, ou change-t-elle ses résolutions fléchie par nos prieres ? est-elle étendue, ou un point indivisible ? si elle n’est point étendue, d’où vient donc l’étendue ? si elle l’est, comment est-elle donc immense ? Voyez l’article. Simonide, dans le dictionnaire dont il s’agit.

Parmi les Chrétiens même, ajoûte-t-il, combien se forment des notions basses & grossieres de la Divinité ? Le sujet en question n’est donc pas si aisé, qu’il ne faille qu’ouvrir les yeux pour le connoître. De très-grands philosophes ont contemplé toute leur vie le ciel & les astres, sans cesser de croire que le Dieu qu’ils reconnoissoient n’avoit point créé le monde, & ne le gouvernoit point.

Il est aisé de voir que tout cela ne prouve rien. Il y a une grande différence entre connoître qu’il y a un Dieu, & entre connoître sa nature. J’avoue que cette derniere connoissance est inaccessible à nos foibles lumieres ; mais je ne vois pas qu’on puisse toucher à l’autre. Il est vrai que l’éternité d’un premier être, qui est l’infinité par rapport à la durée, ne se peut comprendre dans tout ce qu’elle est ; mais tous peuvent & doivent comprendre qu’il a existé quelqu’être dans l’éternité ; autrement un être auroit commencé sans avoir de principe d’existence, ni dans lui ni hors de lui, & ce seroit un premier effet sans cause. C’est donc la nature de l’homme d’être forcé par sa raison d’admettre l’existence de quelque chose qu’il ne comprend pas : il comprend bien la nécessité de cette existence éternelle ; mais il ne comprend pas la nature de cet être existant nécessairement, ni la nature de son éternité ; il comprend qu’elle est, & non pas quelle elle est.

Je dis donc & je soûtiens que l’existence de Dieu est une vérité que la nature a mise dans l’esprit de tous les hommes, qui ne se sont point étudiés à en démentir les sentimens. On peut bien dire ici que la voix du peuple est la voix de Dieu.

M. Bayle a attaqué de toutes ses forces ce consentement unanime des nations, & a voulu prouver qu’il n’étoit point une preuve démonstrative de l’existence de Dieu. Il réduit la question à ces trois principes : le premier, qu’il y a dans l’ame de tous les hommes une idée de la divinité : le second, que c’est une idée préconnue, anticipée, & communiquée par la nature, & non pas par l’éducation : le troisieme, que le consentement de toutes les nations est un caractere infaillible de la vérité. De ces trois principes il n’y a que le dernier qui se rapporte aux questions de droit ; les deux autres sont une matiere de fait : car puisque l’on prouve le second par le