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lytiques, topiques & elenchiques. Voyez Syllogisme, Topique, , &c.

La cinquieme est la dialectique des Stoïciens, qu’ils appellent une partie de philosophie, & qu’ils divisent en rhétorique & dialectique, auxquelles on ajoûte quelquefois la définitive, par laquelle on définit les choses avec justesse ; on y comprend aussi les regles ou le criterium de la vérité. Voyez Evidence, Vérité, &c.

Les Stoïciens, avant que d’arriver au traité des syllogismes, s’arrêtoient à deux objets principaux, sur la signification des mots, & sur les choses signifiées. A l’occasion du premier article, ils considéroient la multitude des choses qui sont du ressort des Grammairiens, ce que l’on doit entendre par lettres, combien il y en a ; ce que c’est qu’un mot, une diction, une parole ou un discours, &c.

Quant au second article, ils considéroient les choses elles-mêmes, non pas en tant qu’elles sont hors de l’esprit, mais en tant qu’elles y sont reçûes par le canal des sens : ainsi leur premier principe est qu’il n’y a rien dans l’entendement qui n’ait passé par les sens, nihil est in intellectu quod prius non fuerit in sensu ; & que cela vient aut incursione sui, comme un objet que l’on voit ; aut similitudine, comme par un portrait ; aut proportione, soit par l’augmentation comme un géant, soit par la diminution comme un pygmée ; aut translatione, comme un cyclope ; aut compositione, comme un centaure ; aut contrario, comme la mort ; aut privatione, comme un aveugle. Voyez Stoïciens.

La sixieme est la dialectique d’Epicure ; car quoiqu’il semble que ce philosophe ait méprisé la dialectique, il l’a cultivée avec beaucoup d’ardeur : il rejettoit seulement celle des Stoïciens, qui attribuoient, selon lui, à leur dialectique beaucoup plus qu’ils ne devoient, parce qu’ils disoient que le seul sage étoit celui qui étoit bien versé dans la dialectique. Pour cette raison Epicure paroissant ne faire aucun cas de la dialectique commune, eut recours à un autre moyen, c’est-à-dire à certaines regles ou principes qu’il substitua en sa place, & dont la collection fut appellée canonica. Et comme toutes les questions en Philosophie roulent sur les choses ou sur les mots, de re ou de voce, il fit des regles particulieres pour chacun de ces objets. Voyez Epicuriens. Chambers.

DIALÉLE, s. m. (Logique.) argument des Sceptiques ou Pyrrhoniens, & le plus formidable de tous ceux qu’ils employent contre les Dogmatiques : c’est ainsi qu’en a jugé M. Bayle, si versé lui-même dans toutes les ruses du scepticisme. Il consistoit à faire voir que la plûpart des raisonnemens reçûs dans les Sciences, sont des cercles vicieux qui prouvent une chose obscure & incertaine, par une autre également obscure & incertaine, & ensuite cette seconde par la premiere.

Pour concevoir ce que c’est que le dialéle, imaginons-nous que deux personnes inconnues nous viennent trouver. Titius que nous ne connoissons pas, nous assûre que Mévius, que nous connoissons aussi peu, est un fort honnête homme ; & pour preuve qu’il dit vrai, il nous renvoye à Mévius, qui nous assûre que Titius n’est pas un menteur. Pouvons-nous avoir la certitude que Mévius est un honnête homme, & que Titius qui le dit n’est pas menteur ? Pas plus que si ni Titius ni Mévius ne nous rendoient aucun témoignage l’un en faveur de l’autre. Voilà l’image d’un dialéle. Si deux hommes sont tels que je ne puisse connoître le premier que par le second, ni le second que par le premier, il est impossible que je connoisse certainement ni le premier ni le second. De même, si deux choses sont telles que je ne puisse connoître la premiere que par la seconde, ni la seconde que par la premiere, il est impossible que

je connoisse avec aucune certitude ni la premiere ni la seconde. Voilà le principe sur lequel un pyrrhonien se fonde, pour faire voir que nous n’avons presqu’aucune idée de quoi que ce soit, & que presque tous nos raisonnemens ne sont que des cercles vicieux. Le principe est incontestable. Le pyrrhonien raisonne ainsi, en suivant son principe.

Il faudroit, selon lui, trouver le secret de restraindre ce principe dans de certaines bornes, au-delà desquelles il ne fût plus recevable ; mais qui les posera ces bornes ? Vous croyez avoir l’idée d’un arbre, par exemple ; point du tout, un pyrrhonien vous prouvera que vous n’en avez aucune. Ou votre idée, vous dira-t-il, est conforme à l’objet, ou elle n’y est pas conforme : si elle n’y est pas conforme, vous n’en avez pas l’idée ? Si vous dites qu’elle y est conforme, comment prouverez-vous cela ? Il faudra que vous connoissiez cet objet avant que d’en avoir l’idée, afin que vous puissiez dire & être assûré que votre idée y est conforme. Mais bien loin de cela, vous ne sauriez pas même si cet objet existe, si vous n’en aviez l’idée, & vous ne le connoissez que par l’idée que vous en avez ; au lieu qu’il faudroit que vous connussiez cet objet avant toutes choses, pour pouvoir dire que l’idée que vous en avez est l’idée de cet objet. Je ne puis connoître la vérité de mon idée, que par la connoissance de l’objet dont elle est l’idée ; mais je ne puis connoître cet objet que par l’assûrance que j’aurai de la vérité de mon idée. Si vous répondez que vous connoissez la vérité de votre idée par votre idée elle-même, ou par l’évidence, vous vous exposerez à des objections très-embarrassantes que l’on vous fera sur les idées fausses & vraies, sur l’évidence, & enfin sur ce qu’une opinion contestée & non prouvée, ne peut pas se servir de preuve à elle-même. Pourquoi, vous dira-t-on, voulez-vous que l’idée que vous avez d’un arbre soit plus conforme à ce qui est au-dehors de vous, que l’idée que vous avez de la douceur ou de l’amertume, de la chaleur ou du froid, des sons & des couleurs ? Or on convient qu’il n’y a rien hors de nous & dans les objets, qui soit semblable aux idées que leur présence nous donne : donc vous n’avez aucune preuve démonstrative qu’il y ait au-dehors de vous quelque chose qui soit conforme à l’idée que vous avez d’un arbre. Voilà ce qui fait dire aux Pyrrhoniens que nous pouvons bien dire que nous croyons appercevoir tels & tels objets, telles & telles qualités ; mais que nous n’en pouvons rien conclure pour l’existence réelle de ces objets & de ces qualités. Au fond on pourroit leur répondre par un concedo totum. Mon existence est certaine : il est certain que je sens ce que je sens, & que j’ai telles idées présentes à l’esprit. Il n’est pas également certain si les objets extérieurs répondent à ces idées ; mais qu’importe, c’est sur mes idées que je raisonne, ce sont elles que j’examine, que je compare, & dont je tire des conclusions qui sont incontestables, quand même il n’existeroit rien hors de moi. Lisez la préface que M. Huart a mise à la tête de sa traduction des hypotheses pyrrhonionnes, imprimée en 1728. Voyez Corps. Cet article est de M. Formey.

DIALIES. s. m. (Hist. anc. & Myth.) sacrifice que faisoit chez les anciens le dialis. Voyez Dialis.

Ce n’étoit pas tellement une nécessité que les dialies fussent faits par le flamen dialis, que d’autres ne pûssent les offrir : on voit même dans Tacite, ann. lib. III. cap. lviij. que s’il étoit malade ou retenu par quelque fonction publique, les pontifes prenoient sa place. Struv. antiq. rom. (G)

DIALIS, s. m. terme d’Antiquaire, mot formé de διός génitif de ζεύς, qui signifie ce qui appartient à Jupiter. On appelloit ainsi un des flamen, ou prêtres de Jupiter. Les fonctions de ce prêtre furent établies à Ro-