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Contrats nommés, sont ceux à chacun desquels le droit civil avoit attribué un nom propre qui les distinguoit les uns des autres, & des contrats innommés qui n’avoient point de nom propre. Ainsi l’on mettoit au nombre des contrats nommés le prêt, le commodat, le dépôt, le gage, la stipulation proprement dite, l’obligation qui se contracte par écrit, la venté, le loüage, la société, & le mandat.

La permutation & la transaction n’étoient pas des contrats nommés, parce que ces noms convenoient à plusieurs sortes d’affaires, & que l’action qu’ils produisoient, suivant le droit civil, n’étoit pas propre à une seule sorte de convention.

L’origine des contrats nommés vient de ce que les jurisconsultes qui composerent la loi des douze tables, choisirent les conventions qui leur parurent les plus ordinaires & les plus nécessaires pour le commerce de la société civile, & donnerent à chacune de ces conventions un nom propre pour la distinguer des autres, dont ils abandonnerent l’exécution à la bonne-foi des parties, ne croyant pas juste que celui qui auroit promis trop légerement quelque chose, pût être contraint de l’exécuter.

Ceux qui interpreterent la loi des douze tables crurent devoir suppléer à cette loi, en ajoûtant que les autres conventions ne laisseroient pas de produire une obligation civile lorsqu’elles auroient une cause légitime, & qu’elles seroient exécutées par l’une des partiés ; mais comme ils ne donnerent point de nom particulier à chacune de ces conventions, elles furent appellées contrats innommés : & de-là vint la distinction des contrats nommés & des contrats innommés. Voyez Contrats innommés. (A)

Contrat devant Notaire, est celui qui est passé devant deux notaires ou tabellions, ou devant un notaire & deux témoins. Voyez Notaire. (A)

Contrat nul, est celui qui ne peut produire aucun effet, soit que la nullité en ait lieu de plein droit par quelque vice de la convention, soit qu’elle ait été prononcée en justice, ou consentie par les parties. Voyez Nullité. (A)

Contrat en parchemin, est celui qui est expédié sur parchemin, soit que ce soit la grosse du contrat en forme exécutoire, ou une simple expédition en parchemin. Voyez Forme exécutoire. (A)

Contrat perpétuel, signifie en général tout contrat qui est fait pour perpétuelle demeure, & non pour un tems seulement ; ainsi la vente est un contrat perpétuel, au lieu que la location est un contrat à tems.

Il y avoit chez les Romains une espece particuliere de contrat appellé perpétuel, contractus perpetuarius, qui étoit un bail à location perpétuel ; c’est pourquoi on l’appelloit aussi locatio perpetua. C’est de ce contrat qu’il est parlé en la loi x. au code de locato conducto, l. I. §. qui in perpetuum, & au dig. si ager vectigalis vel emphit. pet. Au commencement ce contrat étoit différent de l’emphytéose, parce que celle-ci étoit alors seulement à tems ; mais depuis que l’on eut admis l’emphytéose perpétuelle, il n’y eut plus de différence entre cette sorte d’emphytéose & le contrat perpétuel, ou de location perpétuelle. Ce même contrat est encore usité au parlement de Toulouse, sous le titre de bail à locaterie perpétuelle. Voyez le traité des droits seign. de Boutarie. (A)

Contrat de Poissy, est un traité qui fut fait à Poissy en 1561 entre Charles. IX. & le clergé de France, lequel se trouvoit alors assemblé dans ce lieu à l’occasion du colloque qui s’y tint, appellé le colloque de Poissy. Par ce traité le clergé s’obligea de payer au roi pendant six ans 1600000 l. par an, revenant le tout à 9600000 liv. il s’obligea de plus d’acquitter & racheter dans les dix autres années suivan-

tes le sort principal des rentes alors constituées sur la ville de Paris, montant à 7560056 livres 16 sous 8 den. & cependant de payer les arrérages de ces rentes en l’acquit du roi, à compter du premier Janvier 1658. Ce contrat est le premier de ceux que le roi a passé avec le clergé, à l’occasion des subventions qu’il est obligé de fournir au Roi. Pour l’exécution de ce contrat, il fut nécessaire d’assembler plusieurs fois le clergé ; & c’est de-là qu’est venu l’usage des assemblées que le clergé tient de tems en tems par rapport aux subventions : au lieu qu’avant ce contrat ces sortes d’assemblées étoient fort rares, & que les levées sur le clergé se faisoient quelquefois sans attendre le consentement des ecclésiastiques.

Ce contrat de Poissy est rapporté dans Fontanon, tome IV. des ordonnances, tit. xxjv. n°. 3. & 9. & dans les mémoires du clergé, tome I. part. III. tit. jv. n. 1. Il en est parlé dans le mémoire de Patru sur les assemblées du clergé, & dans son mémoire sur les décimes. (A)

Contrat pignoratif, est un contrat de vente d’un héritage sait par le débiteur à son créancier, avec faculté au vendeur de retirer l’héritage pendant un certain tems, & convention que le vendeur joüira de ce même héritage à titre de loyer, moyennant une somme par an, qui est ordinairement égale aux intérêts de la somme prêtée, & pour laquelle la vente a été faite.

Ce contrat est appellé pignoratif, parce qu’il ne contient qu’une vente simulée, & que son véritable objet est de donner l’héritage en gage au créancier, & de procurer au créancier des intérêts d’un prêt, en le déguisant sous un autre nom.

Le Droit civil & le Droit canon ont également admis ces sortes de contrats, pourvû qu’il n’y ait pas de fraude.

Ils sont reçus dans certaines coûtumes, comme Touraine, Anjou, Maine & quelques autres. Comme dans ces coûtumes un acquéreur qui a le tenement de cinq ans, c’est-à-dire qui a possedé paisiblement pendant cinq années, peut se défendre de toutes rentes, charges & hypoteques ; les créanciers, pour éviter cette prescription, acquierent par vente la chose qui leur est engagée, afin d’en conserver la possession fictive jusqu’à ce qu’ils soient payés de leur dû.

Les contrats pignoratifs different de la vente à faculté de rémeré & de l’antichrese, en ce que la premiere transmet à l’acquéreur la possession de l’héritage, & n’est point mêlée de relocation ; & à l’égard de l’antichrese, elle a bien pour objet, comme le contrat pignoratif, de procurer les intérêts d’un prêt : mais avec cette différence que dans l’antichrese c’est le créancier qui jouit de l’héritage, pour lui tenir lieu de ses intérêts ; au lieu que dans le contrat pignoratif c’est le débiteur qui jouit lui-même de son héritage, & en paye le loyer à son créancier pour lui tenir lieu des intérêts de sa créance.

Quoique ces sortes de contrats semblent contenir une vente de l’héritage, cette vente est purement fictive, tellement qu’après l’expiration du tems stipulé pour le rachat, l’acquéreur, au lieu de prendre possession réelle de l’héritage, proroge au contraire la faculté de rachat & la relocation ; ou, à la fin, lorsqu’il ne veut plus la proroger, il fait faire un commandement au vendeur de lui payer le principal & les arrérages sous le nom de loyers ; & faute de payement il fait saisir réellement l’héritage en vertu du contrat : ce qui prouve bien que la vente n’est que simulée.

Dans les pays où ces contrats sont usités, ils sont regardés comme favorables au débiteur, pourvû qu’il n’y ait pas de fraude, & que le créancier ne