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levé sur les nobles en 1529, pour contribuer à la rançon des deux fils de François Ier.

Depuis ce tems, on ne trouve point que le dixieme ait été imposé jusqu’en 1710, qu’il fut établi par une déclaration du 14 Octobre 1710, registrée en vacations. On attendoit un secours si prompt de cette imposition, que le 2 Décembre suivant il y eut une autre déclaration pour l’emprunt de trois millions, dont le remboursement fut assigné sur les deniers qui proviendroient de la levée du dixieme. Il fut dit que ceux qui préteroient 100000 liv. sur ces 3 millions, seroient réputés nobles ; qu’à cet effet il leur seroit expédié des lettres de noblesse : mais ces noblesses acquises à prix d’argent, ne furent pas de longue durée, d’autant plus que les prêteurs étoient bien dédommagés par l’intérêt de leur argent qu’on leur payoit au denier dix.

Le clergé obtint au mois d’Octobre 1711 une déclaration du Roi, qui déclara les biens ecclésiastiques exempts du dixieme à perpétuité, tant pour le passé que pour l’avenir.

Cette imposition qui avoit commencé d’être perçûe à compter du premier Octobre 1710, fut ôtée par l’édit du mois d’Août 1717, à commencer du premier Janvier 1718, à l’exception du dixieme des pensions.

La guerre qui fut déclarée au mois d’Octobre 1733 donna lieu à rétablir l’imposition du dixieme, par une déclaration du 17 Novembre suivant. L’arrêt d’enregistrement fixa le commencement de cette imposition à compter du 1 Janv. 1734. Il fut supprimé par arrêt du conseil du premier Janvier 1737, à compter dudit jour.

Comme la déclaration du 17 Novembre 1733, assujettissoit à la levée du dixieme tous les sujets du Roi privilégiés ou non-privilégiés, le clergé pour se rédimer de cette imposition, paya au Roi par forme de don gratuit une somme de douze millions, pour tenir lieu du dixieme ; ensorte que l’exemption qui sembloit lui avoir été accordée à perpétuité, en 1733 n’eut pas lieu.

La derniere occasion où le dixieme a été rétabli, a été lors de la guerre qui fut déclarée en 1741, il fut imposé par une déclaration du 29 Août 1741, à compter du premier Octobre suivant.

Par un édit du mois de Décembre 1746, le Roi ordonna la levée des deux sous pour livre du dixieme, pour commencer au premier Janvier 1747, & finir au dernier Décembre 1756.

Par un autre édit du mois de Mai 1749, le Roi ordonna que l’on cesseroit de percevoir le dixieme, à compter du premier Janvier 1750 ; mais par le même édit, il ordonna la levée du vingtieme au lieu du dixieme, sans préjudice des deux sous pour livre du dixieme, établis par l’édit du mois de Décembre 1746. Ces deux impositions se perçoivent actuellement.

Pour avoir une idée de la maniere dont se percecevoit le dixieme, il suffit de rappeller les principales dispositions de l’édit de 1741.

Il ordonne que tous propriétaires nobles ou roturiers, privilégiés ou non, même les apanagistes ou engagistes, payeront le dixieme du revenu de tous les fonds, terres, prés, bois, vignes, marais, paccages, usages, étangs, rivieres, moulins, forges, fourneaux, & autres usines ; cens, rentes, dixmes, champarts, droits seigneuriaux, péages, passages, droits de ponts, bacs & rivieres, droits de canaux, & généralement pour tous autres droits & biens de quelque nature qu’ils soient, tenus à rente, affermés ou non affermés.

On devoit aussi payer le dixieme du revenu des maisons de toutes les villes & fauxbourgs du royaume, loüées ou non ; & de celles de la campagne,

qui étant loüées procurent un revenu au propriétaire ; même pour les parcs & enclos de ces maisons étant en valeur : de maniere que le dixieme ne devoit être levé qu’eu égard au revenu, déduction faite des charges sur lesquelles les propriétaires ne pouvoient pas retenir le dixieme. A l’égard des forges, étangs, & moulins, le dixieme ne se payoit que sur le pié des trois quarts du revenu.

L’édit portoit aussi que le dixieme du revenu de toutes les charges, emplois, & commissions, soit d’épée ou de robe ; des maisons royales, des villes, de police, ou de finance, compris leurs appointemens, gages, remises, taxations, & droits y attribués de quelque nature qu’ils fussent, continueroit d’être perçû sur tous ceux sur qui on le percevoit alors, & encore actuellement ; qu’il seroit pareillement levé sur ceux sur qui on auroit oublié de le percevoir, ou qui en auroient été exempts, le Roi dérogeant pour cet effet à toute loi contraire.

Il ordonnoit aussi la retenue du dixieme de toutes les rentes sur le clergé, sur les villes, provinces, pays d’états, & autres, à l’exception des rentes perpétuelles & viageres sur l’hôtel-de-ville de Paris & sur les tailles ; des quittances de finance, portant intérêt à deux pour cent, employées dans les états du Roi, & des gages réduits au denier cinquante.

Le dixieme se levoit aussi sur toutes les rentes à constitution sur des particuliers, des rentes viageres, doüaires, & pensions créées & établies par contrats, jugemens, obligations, ou autres actes portant intérêts, & aussi sur tous les droits, revenus, & émolumens de quelque nature qu’ils fussent, attribués tant aux officiers royaux qu’autres particuliers ; corps ou communautés, soit qu’ils leur eussent été aliénés ou réunis. Il en étoit de même des octrois & revenus patrimoniaux, communaux, & autres biens & héritages des villes, bourgs, villages, hameaux, & communautés ; droits de messageries, carosses, & coches, tant par terre que par eau, & généralement de tous les autres biens, de quelque nature qu’ils fussent, qui produisent un revenu.

Et comme les propriétaires des fonds & héritages, maisons & offices, qui devoient des rentes à constitution, rentes viageres, doüaires, pensions, ou intérêts, payoient le dixieme de la totalité du revenu des fonds sur lesquels les rentiers, pensionnaires, & autres créanciers avoient à exercer, ou pouvoient exercer leurs créances ; le dixieme dû par ces rentiers, pensionnaires, ou autres créanciers, étoit à la décharge des propriétaires des fonds, à l’effet de quoi ils étoient autorisés en payant les arrérages de rentes, pensions, ou intérêts, d’en retenir le dixieme, en justifiant par eux de la quittance du payement du dixieme des revenus de leurs fonds.

Il en étoit de même des particuliers, officiers, corps & communautés qui jouissent des droits, revenus & émolumens, octrois, revenus patrimoniaux, communaux, & autres biens & héritages, & droits de messageries, carrosses, coches & autres : comme ils payoient le dixieme de la totalité du revenu, il leur étoit aussi permis de retenir le dixieme des charges.

Les particuliers commerçans & autres dont la profession est de faire valoir leur argent, devoient aussi payer le dixieme de l’industrie, c’est-à-dire à proportion de leurs revenus & profits.

Les rôles du dixieme, lorsqu’il a lieu, sont arrêtés au conseil, & le dixieme est payable en quatre termes égaux, aux quatre quartiers accoûtumés de l’année, par préférence à toutes autres créances, même aux autres deniers du roi.

Les fermiers, locataires, receveurs & autres qui exploitent les biens d’autrui, ne peuvent vuider