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genres, ne peuvent être comparés, & qu’ainsi il ne peut y avoir entr’eux de rapport, du moins que très-improprement.

Dans le second cas, c’est-à-dire lorsque le diviseur est un nombre abstrait, le quotient est un nombre concret ; & c’est la seconde proportion qui a lieu : ainsi divisant 6 sous par 3 (nombre abstrait), le quotient est 2 sous (nombre concret), & l’on dit : 6 sous est à 2 sous (quotient), comme 3 (diviseur) est à l’unité. Remarquez que dans les deux proportions l’unité est toûjours un nombre abstrait ; ainsi on peut présenter la division sous deux points de vûe différens : c’est chercher combien de fois une quantité est contenue dans une autre de même genre, comme dans le premier cas ; ou bien c’est chercher une quantité qui soit contenue un nombre de fois donné, dans une quantité donnée du même genre.

Nous nous servons ici du mot être contenu, parce que nous supposons jusqu’à présent que le diviseur soit plus petit que le dividende, & même que la division se fasse exactement & sans reste. Mais, 1° si le diviseur est plus petit, & que la division ne se fasse pas sans reste, la proportion entre le dividende, le diviseur, le quotient & l’unité, proportion qui constitue la division, n’en a pas moins lieu ; ainsi dans l’exemple ci-dessus, supposons qu’on divise 32035 par 469 toises, le quotient , indique que 469 toises sont contenues dans 32035, comme l’unité est contenue dans le nombre mixte  ; c’est-à-dire que 409 toises sont contenues dans 32035 toises, d’abord 68 fois entierement, & qu’ensuite il y a un reste de toises, qui est au diviseur 469 toises, comme le nombre abstrait 143, est au nombre abstrait 469. Supposons à-présent qu’on divise 32035 toises, non par 469 toises, mais par le nombre abstrait 469 ; c’est-à-dire qu’on cherche la 469e partie de 32035, le quotient indique d’abord 68 toises ; & que de plus si on divise une toise en 469 parties égales, & qu’on en prenne 143, ces 143 parties ajoûtées aux 68 toises completes, donneront la 469e partie exacte de 32035 toises.

2°. Si le diviseur est plus petit que le dividende, alors le quotient (suivant la proportion qui constitue la division) sera plus petit que l’unité, ou qu’une fraction d’unité. Ainsi si on divise 3 toises par 12 toises, c’est chercher, non combien 3 toises contiennent, mais combien elles sont contenues dans 12 toises ; & le quotient marquera que 3 toises sont un quart de 12 toises. Si on divise 3 toises par 12, c’est-à-dire si on cherche la 12e partie de 3 toises, on trouvera , c’est-à-dire 1 quart de toise ; en effet, 1 quart de toise pris 12 fois, fait 3 toises.

Si le diviseur est une fraction plus petite que l’unité, le quotient sera un nombre plus grand que le dividende ; car alors le dividende doit être plus petit que le quotient. Cela paroît d’abord paradoxe ; mais en y réfléchissant un peu, on observera que si le quotient est plus petit que le dividende dans la plûpart des divisions ordinaires, c’est que le diviseur y est plus grand que l’unité. Rendez le diviseur égal à l’unité, le quotient sera égal au dividende ; rendez-le plus petit, le quotient sera plus grand que le dividende. Ainsi, qu’est-ce que diviser 12 toises par  ? c’est chercher un nombre de toises qui soit à 12 toises comme l’unité est à , c’est-à-dire comme 3 est à 1 : donc le quotient sera 12 toises prises trois fois, c’est-à-dire 36 toises. De même diviser 12 toises par de toise, c’est chercher un nombre qui soit à l’unité comme 12 toises est à de toise ; or 12 toises contiennent 36 fois de toise, dont le quotient est 36. C’est ainsi qu’en réduisant les opérations à des notions claires, toutes les difficultés s’évanouissent. Il ne peut y en avoir ici, dès qu’on prendra la notion générale de la division, telle que nous l’avons

donnée. Mais on se trouvera embarrassé lorsqu’on se bornera à la notion imparfaite & incomplete de la division qu’on trouve dans la plûpart des arithméticiens ; savoir, que la division consiste à chercher combien de fois le diviseur est contenu dans le dividende. Nous parlerons plus au long au mot Fraction, de la division, dans le cas où le diviseur est une fraction, le dividende étant un nombre quelconque, entier ou rompu.

Bornons-nous présentement aux regles de la division ordinaire, & tâchons d’en donner en peu de mots une idée bien nette. Nous prendrons pour exemple celui même qui a été donné ci-dessus ; & les raisonnemens que nous ferons sur celui-là, pourront sans aucune peine s’appliquer à d’autres.

On propose de diviser 32035 par 469, c’est-à-dire de savoir combien de fois 469 est contenu dans 32035. Je vois d’abord que le dividende contient jusqu’à des dixaines de mille, & le diviseur des centaines ; ainsi, comme dix mille contient cent fois cent, il peut se faire que le diviseur renferme des centaines, mais il ne peut pas aller plus haut. Il faut donc savoir combien de centaines de fois, de dixaines de fois, & d’unités de fois il est contenu. Pour savoir combien de centaines de fois le dividende contient le diviseur, je prends d’abord de la gauche vers la droite autant de chiffres dans le dividende que dans le diviseur, c’est-à-dire que je prends la partie du dividende 320, qui représente réellement 32000, en négligeant pour un moment les deux derniers chiffres 35. Je divise 32000 par 469, pour voir combien 469 est contenu de centaines de fois dans 32000 : pour cela il suffit de diviser 320 par 469, & de remarquer que le chiffre qui viendra exprimera, non des unités simples, mais des centaines d’unités. Mais je vois que 320 ne peut se diviser par 469, ainsi le quotient ne doit point renfermer de centaines. Il en auroit renfermé, si au lieu de 320 j’avois eu, par exemple, 520, ou en général un nombre égal ou plus grand que 469 ; car alors on auroit eu au quotient au moins l’unité qui auroit marqué une centaine d’unités. Je vois donc que le quotient ne peut contenir que des dixaines d’unités ; mais il est évident qu’il en contiendra nécessairement, car dès que le dividende a deux chiffres de plus que le diviseur, il est nécessairement plus de dix fois plus grand : en effet, 469 pris dix fois, donne 4690 qui n’a que quatre chiffres, au lieu que 32035 en a cinq. Je cherche donc combien de dixaines de fois 32035 contient 469 ; ou, ce qui est la même chose, je cherche combien de fois 32030 contient 469, en négligeant le nombre 5 pour un moment ; ou, ce qui revient encore au même, je cherche combien de fois 3203 contient 469, en me souvenant que le nombre que je trouverai au quotient, donnera des dixaines d’unités : Or je remarque d’abord que jamais 3203 ne peut contenir 469 plus de fois, que le nombre 32 (qui est formé des deux premiers chiffres du dividende) ne contient le premier chiffre 4 du diviseur : car 32 contient 4 huit fois ; & si je mettois 9, par exemple, au lieu de 8, je trouverois en multipliant 9 par 469, un nombre plus grand que 3203 ; ce qui est évident, puisque 4 fois 9 étant 36, les deux premiers chiffres du nombre égal à 9 fois 469, seroient plus grands que les deux premiers chiffres 32 du nombre 3203 : ainsi il suffit (& cette remarque est évidemment applicable à tous les cas) de diviser par le premier chiffre du diviseur le premier chiffre du dividende, lorsque le dividende a autant de chiffres que le diviseur ; ou les deux premiers chiffres, lorsque le dividende a un chiffre de plus.

Ce n’est pas à dire pour cela que cette opération ne donne jamais trop, on va voir le contraire ; mais