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de choses qui imposent au peuple & qui contribuent à faire rendre au magistrat le respect qui lui est dû.

En France le Roi accorde, quand il le juge à-propos, des dispenses d’âge, soit pour s’inscrire dans une université & pour y prendre des degrés, soit pour être reçu dans quelqu’office, soit de robe, d’épée, ou de finance.

Ces dispenses s’accordent par des lettres de la grande chancellerie.

On accordoit ci-devant des dispenses d’âge à de jeunes magistrats pour être reçus avant 25 ans, soit par rapport à leur mérite personnel, soit dans l’espérance qu’ils commenceroient plûtôt à se former dans les fonctions de la magistrature : mais depuis quelque tems il n’est plus d’usage d’accorder de ces sortes de dispenses pour les offices de cour souveraine avant l’âge de 25 ans.

On obtient aussi des dispenses d’âge pour prendre les ordres, ou pour posséder des bénéfices avant l’âge requis par les canons.

Le pape est seul en droit d’accorder ces sortes de dispenses, comme de prendre l’ordre de prêtrise devant 24 ans. Il peut par la plénitude de sa puissance dispenser un enfant au-dessous de sept ans pour tenir un bénéfice simple, mais il ne peut pas dispenser un enfant de prendre la tonsure devant l’âge de sept ans. Voyez les défin. canon. au mot dispense.

Les dispenses que le pape accorde pour recevoir les ordres avant l’âge requis par les canons, ne sont ordinairement que pour 13 ou 14 mois, & il est d’usage présentement que celui qui demande cette dispense rapporte une attestation de l’évêque en sa faveur. Voyez le traité de la pratique de cour de Rome, tom. II. ch. ij. (A)

Dispense de bans de mariage, ou pour parler plus correctement, dispense de la publication des bans, est une dispense que l’évêque diocésain ou ses grands-vicaires accordent, quand ils le jugent à-propos, à ceux qui sont sur le point de se marier, pour les affranchir de la nécessité de faire publier à l’ordinaire les bans de leur mariage, ou du moins un ou deux de ces bans.

Le concile de Trente ne prononce pas la nullité des mariages célebrés sans proclamation de bans ; il remet expressément à la prudence de l’évêque d’en dispenser comme il le jugera à-propos.

L’ordonnance de Blois, art. 40. ordonne que l’on ne pourra obtenir dispense de bans, sinon après la premiere proclamation faite, & ce seulement pour quelque urgente & légitime cause, & à la requisition des principaux & plus proches parens communs des parties contractantes.

Cette requisition des parens n’est nécessaire que quand il s’agit du mariage d’un mineur ou fils de famille en puissance de pere & mere.

Les évêques accordent quelquefois dispense des trois bans ; mais ces dispenses sont rares, & elles ne s’accordent qu’à des majeurs seulement.

Les causes pour lesquelles on accorde dispense des bans, & même du premier, sont lorsque l’on craint que quelqu’un ne mette par malice empêchement au mariage ; lorsque les futurs conjoints veulent éviter l’éclat, à cause de l’inégalité d’âge, de condition, ou de fortune ; lorsqu’ayant vêcu en concubinage, ils passoient néanmoins pour mari & femme, & qu’on ne veut pas révéler leur turpitude ; si celui qui a abusé d’une fille veut l’épouser, on accélere de peur qu’il ne change de volonté ; si après les fiançailles le fiancé est obligé de s’absenter pendant un tems considérable ; enfin lorsqu’un homme, in extremis, veut épouser sa concubine pour réparer sa faute, assûrer l’état de celle avec laquelle il a vêcu, & celui de ses enfans s’il y en a.

Il a été fait plusieurs défenses aux évêques, à leurs

grands-vicaires & officiaux, d’accorder dispense des trois bans sans cause légitime, suivant les arrêts rapportés par Brodeau sur M. Louet, lett. M. somm. vj. n. 17. Bardet, tom. II. liv. III. chap. xxiij. & l’arrêt du 22. Décembre 1687, au journal du palais.

Les dispenses de bans doivent être insinuées avant la célébration du mariage, & l’on en doit faire mention, aussi-bien que de l’insinuation, dans l’acte de célébration. Voyez la déclaration du 16 Février 1692. Brillon, au mot mariage, dispense. (A)

Dispense de batardise, appellée par les canonistes dispensatio natalium, n’est pas un acte qui ait pour objet de légitimer des bâtards ; car il n’y a que le Roi qui puisse accorder des lettres de légitimation. La dispense de bâtardise est donc seulement un acte qui habilite un bâtard à l’effet de recevoir les ordres ecclésiastiques, ou de posséder un bénéfice.

Ces sortes de dispenses s’accordent en deux manieres, aut à jure, aut ab homine.

La dispense qui est de droit, à jure, est celle qui s’opere tacitement par la profession du bâtard dans un ordre religieux. Cette profession le rend capable de la promotion aux ordres sacrés, & de posséder des bénéfices simples sans qu’il ait besoin d’autre dispense ; tel est le sentiment de Davila, part. X V I I. disp. 3. Rebuff. tract. de pacif. possess. n. 2. & 25.

On appelle dispense ab homine, celle qui est accordée par le pape ou par l’évêque. Dans ces dispenses expresses on doit expliquer la qualité du vice de la naissance.

Un bâtard peut obtenir dispense de l’évêque pour la tonsure & les ordres mineurs, & même pour tenir des bénéfices simples, cap. j. de filiis presbyt. in 6°.

Mais lorsqu’il s’agit des ordres majeurs, de bénéfices-cures, de dignités ou canonicats dans une église cathédrale, le pape seul peut dispenser.

Quelques-uns tiennent que quand le pape accorde la dispense, cum indulto non faciendi mentionem, on n’est pas obligé de faire mention du défaut de la naissance de l’impétrant dans sa supplique, pour impétrer un bénéfice après la dispense ; mais l’impétration seroit nulle suivant le chap. si is cum quo, ij. de filiis presbyt, in 6°. & tel est le sentiment de Rebuffe.

Lorsqu’un bâtard est dispensé pour tenir des bénéfices, il est aussi dispensé pour posséder des pensions ; c’est le style de ces sortes de dispenses.

Si un bâtard avoit été promû aux ordres sacrés, & avoit célebré sans dispense, il ne seroit pas pour cela irrégulier : mais s’il veut obtenir dispense pour le défaut de sa naissance, il doit l’exprimer, & faire mention de sa promotion aux ordres.

Il ne seroit pas non plus irrégulier, si le collateur ordinaire lui a conféré quelque bénéfice après sa promotion aux ordres, & le collateur ne pourroit lui-même le priver de ce bénéfice ; mais le pape pourroit en disposer. Voyez les définit. canon. au mot dispenses ; Selva, part. III. tract. quæst. 61. Rebuffe, prax. benef. part. II. ch. xij xiij. xxviij. xlij. Chenu, quæst. not. cent, 2. quæst. 1. (A)

Dispense pour les Bénéfices, est un acte par lequel un ecclésiastique est autorisé à posseder un bénéfice, nonobstant quelque défaut de capacité en sa personne, ou quoique le bénéfice soit incompatible avec celui qu’il possede déjà.

Les dispenses qui ont rapport aux bénéfices, sont les dispenses d’âge & celles de bâtardise, dont il est parlé ci-devant, les dispenses de tems d’étude, celles de degrés, les dispenses d’ordres, d’irrégularités, & de résidence.

Ces sortes de dispenses sont accordées par le pape, ou par l’évêque, ou par le roi, selon que le bénéfice ou le fait dont il s’agit est de leur compétence.

L’usage des dispenses pour les bénéfices est devenu commun en cour de Rome, sur-tout depuis Paul III.