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aussi cette moyenne dégradation, & conséquemment perdoient les droits de cité. Voyez l’hist. de la jurisprud. Rom. par M. Terrasson.

Parmi nous il n’y a que la naissance ou les lettres du prince qui attribuent les droits de cité. On confond quelquefois le droit de cité avec celui de bourgeoisie ; cependant le droit de cité est plus étendu que celui de bourgeoisie, il comprend aussi quelquefois l’incolat, & même tous les effets civils.

En effet, celui qui est banni d’un lieu ne perd pas seulement le droit de bourgeoisie, il perd absolument les droits de cité, c’est-à-dire tous les priviléges accordés aux habitans du lieu ; & si le bannissement est hors du royaume, il perd tous les effets civils.

On peut perdre les droits de cité sans perdre la liberté, comme il arrive dans celui qui est banni ; mais la perte de la liberté emporte toûjours la perte des droits de cité. Voyez Furgole, des testamens, tome I. p. 198. Dunod, tr. de la mainmorte, p. 39. au mot Bourgeoisie. (A)

CITEAUX, (Hist. ecelés.) ordre religieux réformé de celui de saint Benoît, & composé d’un très grand nombre de monasteres d’hommes & de filles, qu’on nomme Cisterciens, & le plus communément Bernardins & Bernardines. Voyez Bernardins.

Cet ordre commença en 1075 par vingt-un religieux du monastere de Molesme en Bourgogne, qui trouvant que la regle de saint Benoît n’étoit pas assez exactement observée dans cette maison, obtinrent, avec Robert leur abbé, permission de Hugues archevêque de Lyon & légat du saint siége, d’aller s’établir à quatre lieuës de Dijon, dans un lieu nommé Citeaux, Cistercium, à cause, dit-on, du grand nombre de citernes qu’on y avoit creusées. Othon ou Eudes I. du nom, duc de Bourgogne, leur y bâtit une maison où ils entrerent en 1098, & qu’il fonda très-richement. L’évêque de Châlons donna à Robert le bâton pastoral en qualité d’abbé. L’abbé de Cîteaux est général de l’ordre, & conseiller né au parlement de Bourgogne.

Les religieux de Cîteaux peuvent prendre des degrés dans l’université de Paris, & ont à cet effet dans la capitale un collége pour les étudians de leurs différentes maisons, qu’on nomme le collége des Bernardins. Leur ordre a été fécond en hommes illustres ; outre quatre papes qu’il a donnés à l’église, on compte un très-grand nombre de cardinaux, d’évêques, & d’écrivains distingués. L’ordre des Cîteaux est le premier qui ait établi des chapitres généraux par une bulle de Calixte II. en 1119. (G)

CITER, (Jurisprud.) c’est assigner quelqu’un devant un juge d’église. Voyez ci-devant Citation. (A)

CITERNE, s. f. (Architecture.) réservoir soûterrain d’eau de pluie, fait par art pour les divers besoins de la vie. On ne sauroit s’en passer dans plusieurs pays maritimes, dans plusieurs endroits de l’Asie, & d’autres parties du monde. Comme l’eau de toute la Hollande est saumache, toutes les maisons ont des citernes, & il y en a qui sont construites avec un soin, un goût, & une propreté admirable. Mais on dit que la plus belle citerne qu’il ait au monde, se trouve à Constantinople. Les voûtes de cette citerne portent sur deux rangs de 212 piliers chacun ; ces piliers, qui ont deux piés de diametre, sont plantés circulairement, & en rayons qui tendent à celui qui est au centre.

Ainsi un des grands avantages qu’on puisse tirer de l’eau de la pluie, c’est de la ramasser dans des réservoirs soûterrains qu’on appelle citernes, où quand elle a été purifiée en passant au-travers du sable de riviere, elle se conserve plusieurs années sans se corrompre. Cette eau est ordinairement la meilleure

de toutes celles dont on peut user, soit pour boire, soit pour l’employer à plusieurs usages, comme pour le blanchissage & pour les teintures, parce qu’elle n’est point mêlée d’aucun sel de la terre, comme sont presque toutes les eaux des fontaines, & même les plus estimées.

Ces citernes sont d’une très-grande utilité dans les lieux où l’on n’a point d’eau de source, ou bien lorsque toutes les eaux de puits sont mauvaises.

Dans ce cas, ceux qui sont curieux d’avoir de bonne eau, observent soigneusement de ne laisser point entrer l’eau des neiges fondues dans la citerne, ni celles des pluies d’orages. Pour ce qui est des neiges fondues, on a quelque raison de les exclure des citernes, non pas à cause des sels qu’on s’imagine qui sont enfermés & mêlés avec les particules de la neige ; mais seulement parce que ces neiges demeurent ordinairement plusieurs jours, & quelquefois des mois entiers sur les toits des maisons, où elles se corrompent par la fiente des oiseaux & des animaux, & plus encore par le séjour qu’elles font sur les tuiles, qui sont ordinairement fort sales.

Cependant les Hollandois parent à ces deux derniers inconvéniens, en entretenant leurs toits avec propreté, en en éloignant les animaux, & en filtrant leur eau par des pierres ou des fontaines sablées.

Ce seroit ici le lieu de parler de la construction de leurs citernes, de leur maçonnerie, de leur revêtement de marbre, de leur couverture, de leur propriété, du choix des matériaux qu’ils y employent : car ce n’est pas assez pour former une citerne, que d’avoir un lieu qui tienne bien l’eau, que les pierres & le mortier dont elles sont jointes ne puissent communiquer aucune qualité à cette eau qui y séjourne pendant un tems considérable ; il faut encore de l’art dans la forme, dans la structure, dans les fondemens d’une bonne citerne ; mais ce détail me meneroit trop loin, & seroit presque inintelligible sans les figures.

Comme toutefois ce n’est pas seulement dans des pays tels que la Hollande que des citernes sont nécessaires ; qu’il y a quantité de villes, de lieux, de châteaux dans toute l’Europe, & dans ce royaume, où des citernes seroient d’une très-grande utilité ; que d’ailleurs l’on ne peut douter par toutes les épreuves qu’on a faites, que l’eau de la pluie qui a été purifiée dans du sable de riviere, ne soit la meilleure de toutes celles qu’on puisse employer : M. de la Hire a imaginé, & a communiqué au public (Mém. de l’acad. des Sciences 1703.) les moyens suivans, pour pratiquer en tout pays des citernes qui fourniroient à chaque maison assez d’eau pour l’usage & les besoins de ceux qui y demeurent.

Premierement, il est certain qu’une maison ordinaire qui auroit en superficie 40 toises, lesquelles seroient couvertes de toits, peut ramasser chaque année 2160 piés cubiques d’eau, en prenant seulement 18 pouces pour la hauteur de ce qu’il en tombe, qui est la moindre hauteur que l’on observe communément. Mais ces 2160 piés cubiques valent 75600 pintes d’eau, à raison de 35 pintes par pié, qui est la juste mesure pour la pinte de Paris. Si l’on divise donc ce nombre de pintes par les 365 jours de l’année, on trouvera 200 pintes par jour. On voit par-là que quand il y auroit dans une maison, comme celle qu’on suppose, vingt-cinq personnes, elles auroient huit pintes d’eau chacune à dépenser, ce qui est plus que suffisant pour tous les usages de la vie.

Il ne faut pas négliger un avis de M. de la Hire, sur le lieu, & sur la maniere de construire ces sortes de citernes dans les maisons particulieres. On voit dans plusieurs villes de Flandres, vers les bords de