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& les autres n’exigent aucune culture particuliere, si ce n’est qu’on ne les élague jamais, & qu’on accourcit seulement leurs branches latérales, selon les différentes figures auxquelles on les destine.

Plantation des grandes charmilles. Les palissades de charmille, lorsqu’elles se trouveront dans une terre franche & fraîche, s’éleveront à une grande hauteur : elles réussiront même dans un terrein sec & leger, & exposé aux vents froids & impétueux ; mais on ne pourra les amener qu’à une hauteur moyenne dans ces sortes de terreins. La transplantation des charmilles devroit se faire en automne, suivant le principe reçû en Agriculture, s’il n’arrivoit pas souvent que leur tige se trouve desséchée au printems jusqu’à fleur de terre, par les frimats & les vicissitudes de la gelée & du dégel. Pour éviter cet inconvénient, on pourra ne les planter dans ces sortes de places qu’au printems, mais de bonne heure, & dès la fin de Février ; cela exigera seulement quelques arrosemens pendant le premier été, dans les sécheresses. Le mois de Mars sera le tems le plus convenable pour la transplantation des charmilles dans les lieux frais & dans les bonnes terres. Il n’y a pas long-tems que les Jardiniers avoient encore la mauvaise pratique de ne planter aucunes charmilles sans les recéper un peu au-dessus de terre ; ce qui jettoit dans un grand retard pour l’accroissement, & dans l’inconvénient que les branches qui ont peu de disposition à se dresser, se chiffonnent, & contrarient continuellement le redressement de la palissade, & le peu d’épaisseur qu’on cherche à lui laisser autant qu’il est possible. Mais pour arriver bien plus promptement à une grande hauteur, qui est l’objet desiré, & avoir en trois ans ce qu’on n’obtenoit pas en dix, on plante tout de suite les charmilles d’une bonne hauteur, par exemple, de huit à dix piés dans les mauvais terreins, & de douze ou quinze dans les bonnes terres. On a la facilité dans les campagnes de tirer des bois du plant, que l’on peut même, dans quelques terreins, faire enlever avec de petites mottes de terre. Ceux d’un pouce de diametre sont les meilleurs : on leur coupe toutes les branches latérales, en laissant toûjours des chicots pour les amener à la garniture, & on réduit toutes les têtes à la hauteur qu’on se propose de donner à la palissade : on fait un fossé profond d’environ un pié & demi, & large d’autant ; on y range à droite ligne les plants, à la distance de douze à quinze pouces, avec de petits plants qu’on réduit à un pié de hauteur, & qu’on place alternativement entre les grands : on les recouvre d’une terre meuble, & on entretient l’alignement de sa palissade avec des perches transversales, & quelques piquets où il en est besoin. Comme les plants pris au bois sont moins bien enracinés, & plus difficiles à la reprise que ceux de pépiniere, il faudra avoir la précaution d’en planter à part une provision, qui servira à faire les remplacemens nécessaires pendant les deux ou trois premieres années, qui suffisent pour joüir des palissades : on les retient alors, si on les trouve au point où on les veut, ou bien on les laisse aller à toute la hauteur qu’elles peuvent atteindre, & qui dépend toûjours de la qualité du terrein.

Petites charmilles. Ce même arbre que l’on fait parvenir à une grande hauteur pour certains compartimens de jardin, peut aussi pour d’autres arrangemens être réduit dans un état à rester sous la main : on en fait des haies à hauteur d’appui, qui servent à border des allées, à séparer différens compartimens, & à enclorre un terrein : pour ce dernier cas, on réunit une ligne de plants d’aubepin, qui défend des atteintes du dehors, à une premiere ligne de charmille qui embellit le dedans, sans se nuire l’une à l’autre.

Entretien & culture des charmilles. Le principal en-

tretien des palissades de charmille, est de les tondre régulierement : cette opération se fait après la premiere séve, & ordinairement au commencement de Juillet : la plus grande attention qu’on doit y donner est de les tondre de droit alignement, & de les tenir étroites ; ce qui contribue en même tems à leur durée, & à les faire garnir. Elles n’exigent pour leur culture, que ce qui se pratique à l’ordinaire pour les autres arbres ; c’est sur-tout de ne souffrir ni mauvaises herbes, ni gason au-dessus de leurs racines.

On ne trouve qu’une chose à redire à cet arbre ; c’est qu’il retient pendant l’hyver ses feuilles mortes, qui font dans cette saison un coup d’œil desagréable, & une malpropreté continuelle dans un jardin bien tenu. On pourroit répondre que cela peut même avoir son utilité, pour empêcher les vûes qu’on veut éviter, & sur-tout pour défendre un terrein des vents, à la violence desquels le charme résiste mieux qu’aucun autre arbre. Mais ce défaut ne balancera jamais l’agrément que les charmilles donnent dans la belle saison par leur verdure claire & tendre, & par leur figure réguliere & uniforme, dont le noble aspect est connu de tout le monde.

Autres especes. Outre le charme commun, qui est celui dont on vient de parler, il y en a encore sept especes, dont les Botanistes font mention, & qu’on ne trouve guere que dans leurs catalogues. Il y a tout lieu de croire que ces arbres seroient moins rares, s’ils avoient plus d’utilité ou d’agrément que l’espece commune.

Le charme à feuille panachée. C’est une variété de l’espece commune, qui n’a pas grande beauté, & qu’on peut multiplier par la greffe.

Le charme à feuille plus longue & plus étroite. C’est une autre variété qui n’a nul mérite.

Le charme de Virginie à larges feuilles. Ce n’est peut-être aussi qu’une variété de l’espece commune : mais quand la feuille de cet arbre seroit en effet plus grande, cela ne décideroit pas qu’on dût lui donner la préférence, attendu que la feuille du charme commun, quoique plus étroite, est plus convenable pour l’usage qu’on fait de cet arbre dans les jardins. On peut le multiplier de branches couchées.

Le charme à fleur de Virginie. Cet arbre est encore peu connu, & très-rare en France. Quelques auteurs Anglois font mention seulement qu’il est aussi robuste que l’espece commune, & qu’on peut le multiplier de branches couchées : mais ils ne rapportent rien des qualités de sa fleur ; ce qui n’en fait rien augurer de beau.

Le charme d’Orient. Il paroît que cet arbre n’est qu’un diminutif de l’espece commune : sa graine & sa feuille sont plus petites ; l’arbre même ne s’éleve pas si haut à beaucoup près : il y a cependant entre eux quelques différences, qui sont à l’avantage du charme d’Orient ; c’est que ses feuilles sont moins plissées, plus lisses, & qu’elles tombent de l’arbre avant l’hyver : cela fait croire que cet arbre conviendroit mieux que le charme ordinaire pour les petites palissades. On peut le multiplier de graine & de branches couchées.

Le charme à fruit de houblon. Il a la même apparence que l’espece commune ; ses feuilles sont cependant moins plissées ; mais comme il les quitte entierement avant l’hyver, il ne feroit pas dans les jardins au printems, la malpropreté qu’on reproche au charme ordinaire. C’est aussi, je crois, tout ce qu’il y a d’avantageux cet arbre, qui est d’ailleurs plus petit que l’espece commune. Il se trouve fréquemment dans les bois d’Allemagne, où il croît indifféremment avec le charme ordinaire : on peut juger par là de son tempérament. Il se multiplie du même, & il se tond tout aussi-bien.

Le charme de Virginie à fruit de houblon. Cet ar-