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On pense que les chapeaux ne sont en usage que depuis le quinzieme siecle. Le chapeau avec lequel le roi Charles VII. fit son entrée publique à Roüen l’année 1449, est un des premiers chapeaux dont il soit fait mention dans l’histoire. Ce fut sous le regne de ce prince que les chapeaux succéderent aux chaperons & aux capuchons ; & ils firent dans leur tems presqu’autant de bruit que les paniers & les robes sans ceinture en ont fait dans le nôtre. Ils furent défendus aux ecclésiastiques sous des peines très-grieves. Mais lorsqu’on proscrivoit, pour ainsi dire, en France les têtes ecclésiastiques qui osoient se couvrir d’un chapeau, il y avoit deux cents ans qu’on en portoit impunément en Angleterre. Le pere Lobineau dit qu’un évêque de Dole, plein de zele pour le bon ordre & contre les chapeaux, n’en permit l’usage qu’aux chanoines, & voulut que l’office divin fût suspendu à la premiere tête coëffée d’un chapeau qui paroîtroit dans l’église. Il semble cependant que ces chapeaux si scandaleux n’étoient que des especes de bonnets dont les bonnets quarrés de nos ecclésiastiques sont descendus en ligne directe.

La forme du chapeau vêtement, la partie qu’il couvre, sa fonction, &c. ont fait employer par métaphore le nom de chapeau en un grand nombre d’occasions différentes, dont on va donner les principales ci-dessous.

Chapeau, terme d’Architecture, c’est la derniere piece qui termine un pan de bois, & qui porte un chamfrain pour le couronner & recevoir une corniche de plâtre. (P)

Chapeau de lucarne ; c’est une piece de bois qui fait la fermeture supérieure d’une lucarne, & est assemblée sur les poteaux montans. (P)

Chapeau d’étaie, piece de bois horisontale, qu’on met en-haut d’une ou plusieurs étaies. (P)

* Chapeau. On donne ce nom dans certains bâtis de charpente à un assemblage de trois pieces de bois, dont deux posées verticalement & emmortoisées avec une troisieme sur ses extrémités, tiennent cette troisieme horisontale. Voyez un pareil assemblage, Pl. II. des ardoises, premiere vignette dans l’engin en MMLL. Voyez à l’art. Ardoise la description de cet engin.

Chapeau, (Hydraulique.) est une piece de bois attachée avec des chevilles de fer sur les couronnes d’un fil de pieux, soit dans un bâtardeau, ou dans une chaussée. (K)

Chapeau, (Tireur d’or.) est une espece de bobine sur laquelle les tireurs d’or roulent l’or avant que d’être dégrossi. On l’appelle ainsi parce qu’elle a effectivement beaucoup de ressemblance avec un chapeau dont les bords seroient abattus.

Chapeau à sauterelle, (Péche.) voyez Grenadiere.

Chapeau, (Commerce.) mesure de dix tonnes (voyez Tonne) sur laquelle on évalue en Hollande les droits d’entrée & de sortie du tan ; mesure de quinze viertels d’Anvers (voyez Viertels), sur laquelle on mesure les grains à Delft.

Chapeau, se dit du marc qui reste au fond des alembics, après certaines distillations de végétaux, telle que celles des roses.

Chapeau ; c’est un présent, ou plus souvent une espece d’exaction qui a lieu dans certains commerces, au-delà des conventions. Ainsi un maître de navire demande tant pour le fret, & tant pour son chapeau.

Chapeau ou chapel de roses, (Jurisprud.) est un leger don que le pere fait à sa fille en la mariant, pour lui tenir lieu de ce qui lui reviendroit pour sa part & portion. On a voulu par ce nom faire

allusion à cette guirlande ou petite couronne de fleurs, qu’on appelle aussi le chapeau de roses, que les filles portent sur la tête lorsqu’elles vont à l’église pour y recevoir la benédiction nuptiale. Anciennement ces guirlandes ou garlandes étoient quelquefois d’or & quelquefois d’argent, comme on le peut voir dans certaines coûtumes locales d’Auvergne, entr’autres dans celles d’Yssat & de la Torrecte, où il est dit que la femme survivante gagne une guarlande d’argent, &c. La coûtume locale de la châtellenie de Proussat dit que la femme survivante recouvre ses lit, robes & joyaux, ensemble une guarlande ou chapel à l’estimation du lit nuptial. Les coûtumes d’Anjou, de Tours, Lodunois, & Maine, parlent du chapeau de roses comme d’un leger don de mariage fait à la fille en la mariant. Dupineau, dans ses observations sur la coûtume d’Anjou, p. 212. col. j. remarque que dans les anciens coûtumiers d’Anjou & du Maine, au lieu de chapel de roses, il y a une noix. Dans l’ancienne coûtume de Normandie, les filles n’avoient aussi pour toute légitime qu’un chapeau de roses ; mais par la nouvelle coûtume elles peuvent demander mariage avenant, c’est-à-dire le tiers de tous les biens des successions de leurs pere & mere. Voyez Mariage avenant.

Dans quelques coûtumes, telles que celles de Tours & d’Auvergne, la fille mariée par ses pere & mere, ne fût-ce qu’avec un chapeau de roses, ne peut plus venir à leur succession.

La même chose a lieu entre nobles dans les coûtumes de Touraine, Anjou & Maine.

On peut cependant rappeller à la succession par forme de legs la fille ainsi mariée. Voyez la coûtume de Normandie, art. 258 & 259. Renusson, tr. des propres, ch. ij. sect. 8. n. 19. & 20.

Sur le chapeau de roses, voyez Bald. lib. 6. consil. cap. v. in princip. Mos. Majemon, de jejunio, cap. v. n. 13. Ducange, gloss. verbo corona, & in Graco, verbo σέφανοι (A)

Chapeau, (Musique) est le nom que plusieurs donnent à ce trait circulaire dont on couvre deux ou plusieurs notes, & qu’on appelle plus communément liaison. Voyez Liaison. (S)

Chapeau, (Blason.) se prend quelquefois pour le bonnet ou pour la couronne armée d’hermine que portent les ducs, &c.

Le cimier se porte sur le chapeau, & le chapeau sépare le cimier de l’écu, parce que dans le blason c’est une regle que le cimier ne touche jamais immédiatement l’écu. Voyez Cimier, &c.

CHAPELAIN, (Jurisprud.) est celui qui est pourvû d’une chapelle ou chapellenie formant un titre de bénéfice. On appelle aussi chapelain celui qui dessert une chapelle particuliere, soit domestique soit dans quelque église. Enfin il y a dans plusieurs églises cathédrales & collégiales des chapelains ou clercs, qui sont destinés à aider au service divin : ces chapelains sont ordinairement en titre de bénéfice.

Les chapelains des cathédrales & collégiales doivent porter honneur & respect aux chanoines : ordinairement ils n’ont point d’entrée ni de voix au chapitre, & ne peuvent prétendre à tous les honneurs qui sont déférés aux chanoines. Les distinctions qui s’observent entre eux dépendent de l’usage de chaque église, de même que les distributions auxquelles les chapelains doivent participer. Les chanoines doivent aussi les traiter avec douceur, comme des aides qui leur sont donnés pour le service divin, & non comme des serviteurs. Sur les chapelains, voyez Pinson, de divisione benefic. § 27. Lucius, liv. I. tit. v. art. 4. Biblioth. canon. tome I. p. 220. & 676.