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Le terme de suis semble pourtant dénoter que ces officiers étoient attachés à l’empereur d’une maniere particuliere ; qu’ils travailloient dans son palais, faisoient la fonction de secrétaires de l’empereur. Il y a d’autant plus lieu de le croire, que les Romains ayant fait la conquête des Gaules, & y ayant introduit leurs mœurs & les noms des offices usités chez eux, on voit que sous les rois de la premiere race, ceux qui faisoient la fonction de secrétaires du roi étoient pareillement nommés chanceliers.

Il est néanmoins certain que les magistrats des provinces avoient aussi leurs chanceliers, qui faisoient près d’eux la fonction de secrétaires ou de greffiers. Il en est fait mention en plusieurs endroits du code, & notamment au titre de assessoribus, domesticis, & cancellariis judicum ; c’étoient ceux qui mettoient les actes en forme, ou du moins qui souscrivoient les jugemens & autres actes publics, & les délivroient aux parties. Ils furent ainsi appellés, non pas de ce qu’ils pouvoient canceller l’écriture, mais du barreau du juge appellé cancelli, & quia cancellis præerant, comme dit Agathias liv. I. & Cassiodore liv. XII.

Ce dernier l’explique encore bien mieux en l’épître premiere du II. liv. où écrivant à son chancelier ; il lui dit : respice quo nomine nuncuperis ; latere non potes, quod intrà cancellos egeris ; tenes quippe lucidas fores, claustra patentia, fenestratas januas ; & quamvis studiosè claudas, necesse est ut cunctis aperias. Nam si fortè steteris, meis emendaris obtutibus ; si intus ingrediaris, observantium non potes declinare conspectus. Vide quò te antiquitas voluerit collocari : undique conspicieris, qui in illâ claritate versaris.

Les principales dispositions des lois romaines par rapport à ces chanceliers, sont qu’on les pouvoit accuser en cas de faux ; que leur emploi n’étoit pas perpétuel ; qu’après l’avoir quitté ils devoient demeurer encore cinquante jours dans la province, afin que chacun eût le tems & la liberté de faire ses plaintes contre eux, s’il y avoit lieu ; que ceux qui avoient fait cette fonction ne devoient point y rentrer après leur commission finie.

Au commencement les présidens & autres gouverneurs des provinces se servoient de leurs clercs domestiques pour chanceliers ou greffiers, ou bien ils les choisissoient à volonté ; ce qui fut changé par les empereurs Honorius & Théodose en la loi nullus judicum, cod. de assessor. où ces greffiers sont appellés cancellarii. Il est dit que dorénavant ils seront pris par élection solennelle de l’office, c’est-à-dire du corps & compagnie des officiers ministres ordonnés à la suite du gouverneur, à la charge que ce corps & compagnie répondroit civilement des fautes de celui qu’il auroit élu pour chancelier.

Les chanceliers n’étoient pas les seuls scribes attachés aux juges ; il y avoit avant eux ceux qu’on appelloit exceptores & regerendarii. Les premiers étoient ceux qui recevoient le jugement sous la dictée du juge ; les autres transcrivoient les actes judiciaires dans des registres. Le propre du chancelier étoit de souscrire les jugemens & autres actes, & de les délivrer aux parties. Il y avoit aussi ceux que l’on appelloit ab actis, ou actuarii, qui étoient préposés pour les actes de jurisdiction volontaire, comme émancipations, adoptions, contrats & testamens.

Quoique le chancelier fût d’abord le dernier dans l’ordre de tous les scribes du juge, comme il paroît au liv. de la notice de l’empire, & au titre du code de assessoribus, domestitis & cancellariis judicum ; il devint néanmoins dans la suite en plus grande considération que les autres, parce que c’étoit le seul auquel les parties eussent affaire : on en peut juger par ce que dit Cassiodore à son chancelier en son épît. j. liv. II. Quamvis statutis gradibus omnis militia peragatur, tuus

honor cognoscitur solemni ordine non teneri, qui suis primatibus meruit anteponi. Tibi enim reddunt obsequia qui te præire noscuntur, & reflexâ conditione justitiæ, illis reverendus aspiceris, quos subsequi posse monstraris. Cassiodore ajoûte que l’honneur du juge dépendoit de lui, parce qu’il gardoit, signoit & délivroit aux parties les expéditions ; jussa nostra sine studio venalitatis expedias, omnia sicque geras ut nostram possis commendare justitiam : actus enim tui, judicis opinio est ; & sicut penetrale domus de foribus potest congruenter intelligi, sic mens præsulis de te probatur agnosci.

Dans la premiere épît. du liv. XII. il dit encore à son chancelier : fasces tibi judicum parent ; & dum jussa prætorianæ sedis portare crederis, ipsam quodam modo potestatem reverendus assumis. Cette même épître nous apprend que c’étoit alors le préfet du prétoire qui choisissoit les chanceliers des gouverneurs des provinces, qu’il leur donna comme des contrôleurs de leurs actions, ce qui augmenta beaucoup la considération dans laquelle étoit déjà l’office de chancelier, de sorte qu’enfin on entendit sous ce nom ceux qui faisoient toutes les expéditions des grands magistrats. Voyez au code, liv. I. tit. 51. Loyseau, de off. liv. II. ch. v. n. 18 & suiv. & liv. IV. ch. ij. n. 24.

Chanceliers de Russie sont de deux sortes ; il y a le grand chancelier de l’empire qui a la garde de la couronne, du sceptre, & du sceau impérial. La couronne & le sceptre sont gardés dans une chambre à Moscou, dont il a la clef & le sceau, on n’y entre qu’en sa présence. Il y a des chancelleries particulieres auprès des juges des principales villes de Russie, comme à Pétersbourg. Voyez la Martiniere.

Chancelier de la societé littéraire d’Arras. Voyez Chanceliers des Académies.

Chancelier du Souviguier de Narbonne, étoit celui qui avoit la garde du scel royal dans la viguerie de Narbonne ; il en est parlé dans des lettres de Philippe VI. dit de Valois, du 14 Juin 1345, rapportées dans le recueil des ordonnances de la troisieme race, tome II. p. 230.

Chancelier de Suede, qu’on appelle grand chancelier, est le quatrieme des cinq grands officiers de la couronne, qui sont les tuteurs du roi, & gouvernent le royaume pendant sa minorité.

Il est le chef du conseil de la chancellerie où il préside, assisté de quatre sénateurs, & des secrétaires d’état, & de la police, en corrige les abus, & fait tous les réglemens nécessaires pour le bien & l’utilité publique. Il est le dépositaire des sceaux de la couronne ; il expédie toutes les affaires d’état, & c’est lui qui expose les volontés du roi aux états généraux, avant la tenue desquels les nobles sont obligés de faire inscrire leurs noms pour être portés à la chancellerie.

Enfin il préside au conseil de police, & c’est en ses mains que le roi dépose la justice pour la distribuer & la faire rendre à ses sujets.

Il y a cependant au-dessus de lui le drossart ou grand justicier, qui est le premier officier de la couronne, qui préside au conseil suprème de justice auquel on appelle de tous les autres.

Il y a un chancelier de la cour différent du chancelier de justice. Voyez la Martiniere à l’article de Suede, & les voyages de Payen.

Chancelier de Théologie, voyez ci-devant Chancelier des facultés de l’université de Montpelier.

Chancelier dans les universités est celui qui a la garde du sceau de l’université, dont il scelle les lettres des différens grades, provisions & commissions que l’on donne dans les universités. Chaque université a son chancelier ; il y en a même deux dans