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tance, leurs derniers discours, le genre de leurs supplices, les circonstances de leurs accusations, & surtout la cause & le motif de leur condamnation. Et afin que ces notaires ne pûssent pas falsifier ces actes, l’Église nommoit encore des soûdiacres & d’autres officiers, qui veilloient sur la conduite de ces hommes publics, & qui visitoient les procès-verbaux de la mort de chaque martyr, auquel l’Église, quand elle le jugeoit à propos, accordoit un culte public & un rang dans le catalogue des saints. Chaque évêque avoit le droit d’en user de même dans son diocese, avec cette différence, que le culte qu’il ordonnoit pour honorer le martyr qu’il permettoit d’invoquer, ne s’étendoit que dans les lieux de sa jurisdiction, quoiqu’il pût engager les autres évêques, par lettres, à imiter sa conduite ; s’ils ne le faisoient pas, le martyr n’étoit regardé comme bienheureux que dans le premier diocese : mais quand l’église de Rome approuvoit ce culte, il devenoit commun à toutes les églises particulieres. Ce ne fut que long tems après qu’on canonisa les confesseurs.

Il est difficile de décider en quel tems cette discipline commença à changer, ensorte que le droit de canonisation, que l’on convient avoir été commun aux évêques, & sur-tout aux métropolitains, avec le pape, a été réservé au pape seul. Quelques-uns prétendent qu’Alexandre III. élû pape en 1159, est le premier auteur de cette réserve, qui ne lui fut contestée par aucun évêque. Les Jésuites d’Anvers assûrent qu’elle ne s’est établie que depuis deux ou trois siccles par un consentement tacite & une coûtume qui a passé en loi, mais qui n’étoit pas généralement reçûe dans le x. & le xi. siecle : on a même un exemple de canonisation particuliere, faite en 1373 par Witikind, évêque de Mindon en Westphalie, qui fit honorer comme saint l’évêque Félicien, par une fête qu’il établit dans tout son diocese. Cependant on a des monumens plus anciens, qui prouvent que les évêques qui connoissent le mieux leurs droits & qui y sont les plus attachés, les évêques de France, reconnoissoient ce droit dans le pape. C’est ce que firent authentiquement l’archevêque de Vienne & ses suffragans, dans la lettre qu’ils écrivirent à Grégoire IX. pour lui demander la canonisation d’Etienne, évêque de Die, mort en 1208. Quia nemo, disoient-ils, quantâlibet meritorum prærogativâ polleat, ab ecclesiâ Dei pro sancto habendus aut venerandus est, nisi prius per sedem apostolicam ejus sanctitas fuerit approbata.

Quoi qu’il en soit, le saint siege apostolique est en possession de ce droit depuis plusieurs siecles, & l’exerce avec des précautions & des formalités qui doivent écarter tout soupçon de surprise & d’erreur.

Le cardinal Prosper Lambertini, aujourd’hui pape sous le nom de Benoît XIV. a publié sur cette matiere de savans ouvrages, qui prouvent qu’il ne peut rien s’introduire de faux dans les procès-verbaux que l’on dresse au sujet de la canonisation des saints.

Le P. Mabillon distingue aussi deux especes de canonisation : l’une générale, qui se fait par toute l’Église assemblée en concile œcuménique, ou par le pape ; & l’autre particuliere, qui se faisoit par un évêque, par une église particuliere, ou par un concile provincial. On prétend aussi qu’il y a eu des canonisations faites par de simples abbés. Voy. Pompe Tyrrhenique. (G)

CANONISTE, s. m. (Jurisprud.) docteur, ou du moins homme versé dans le droit canonique. (H)

* CANOPE, s. m. (Myth.) dieu des Egyptiens, dont Suidas raconte ainsi l’origine : il s’éleva, dit-il, un grand différend entre les Egyptiens, les Chaldéens, & les autres peuples voisins, sur la primauté de leurs dieux ; après bien des contestations il fut arrêté qu’on les opposeroit les uns aux autres, & que celui qui res-

teroit vainqueur seroit reconnu pour souverain. Or les Chaldéens adoroient le feu, qui eut bientôt dévoré les dieux d’or, d’argent, de pierre, & de bois qu’on lui exposa ; & il alloit être déclaré le maître des dieux, quand un prêtre de Canope, ville d’Égypte, s’avisa de prendre une cruche de terre, qui servoit à la purification des eaux du Nil, d’en boucher les trous avec de la cire, de la remplir d’eau, & de la placer sur la tête du dieu de Canope, qui devoit lutter contre le feu. A peine le dieu de Canope fut-il sur le feu, que la cire qui bouchoit les petits trous du vase s’étant fondue, l’eau s’écoula, éteignit le feu, & que la souveraineté sur les autres dieux fut acquise au dieu de Canope, grace à l’invention de son ministre. On raconte la chose d’une autre maniere, qui est un peu plus honorable pour le dieu, & où la prééminence fut une suite toute simple de ses qualités personnelles. On dit que le dieu même étoit représenté sous la forme d’un vase percé d’une infinité de petits trous imperceptibles, du milieu duquel s’élevoit une tête d’homme ou de femme, ou de chien, ou de bouc, ou d’épervier, ce qui ne laisse au ministre que le mérite d’avoir bouché avec de la cire les petits trous de la divinité.

* CANOPIEN, adj. (Myth.) surnom donné à Hercule, de la ville de Canope, dans la basse Égypte, où il étoit particulierement honoré.

CANOPINA, (Géog.) petite ville d’Italie, dans l’état de l’Église.

CANOPUS, (Astron.) étoile de la premiere grandeur, située dans l’hémisphere austral, à l’extrémité la plus australe de la constellation appellée argo ou le navire argo. Voyez Argo. Voyez l’ascension droite de cette étoile pour 1750, à l’article Ascension. (O)

CANOSA, (Géog.) ville d’Italie, au royaume de Naples, près de la mer, dans la province de Bazi.

CANOT, sub. m. (Marine.) c’est une petite chaloupe ou petit bateau destiné au service d’un grand bâtiment.

Canot de bois ; on appelle ainsi un canot, qui est fait d’un seul tronc d’arbre creusé.

Canot de Sauvages & Canot d’écorces ; ce sont de petits bateaux faits d’écorce d’arbre, dont se servent les Sauvages de l’Amérique pour pêcher à la mer, & pour voyager & aller en course & en traite sur les rivieres. Ils les nomment piroques. Ceux du Canada les font d’écorce de bouleau, & assez grands quelquefois pour contenir quatre ou cinq personnes.

Les François du Canada, qu’on appelle coureurs de bois & traiteurs, s’en servent aussi-bien que les Sauvages pour aller jusques dans leurs habitations leur porter des marchandises & en rapporter des pelleteries. Deux hommes conduisent ces canots ; & quand à cause des sauts des rivieres il faut faire portage, ils chargent canots & marchandises sur leurs épaules, & les transportent au-dessus & au-dessous des sauts, selon qu’ils montent ou qu’ils descendent les rivieres.

Les canots des Indiens & des Caraïbes sont faits de troncs d’arbres qu’on creuse, & ces sortes de bateaux sont plus grands ou plus petits, selon la grandeur & grosseur des arbres qu’on employe pour les faire. On dresse ces troncs d’arbres selon la forme qu’on veut donner au canot, & l’on les creuse. On les conduit avec des pagaies & des rames, & on y ajoûte quelquefois une petite voile ; on met la charge au fond : mais comme ils ne sont point lestés, ils tournent souvent sens-dessus dessous. Ils n’ont point de gouvernail, & ce sont les rames de l’arriere qui leur en servent.

La plûpart des canots ont à l’avant & à l’arriere des avances comme les navettes, & quelques-unes de ces avances se terminent aussi de même en pointe. D’autres ont l’avant & l’arriere tout plat ; il n’y en a presque point qui ayent un avant arrondi. Lorsqu’on veut y ajoûter une voile, on éleve un petit mât