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apportée d’Espagne, & qui porte le nom d’un Isidore, que quelques-uns surnomment le marchand, Isidorus mercator : elle contient les canons orientaux d’une version plus ancienne que celle de Denys le Petit, plusieurs canons des conciles de Gaule & d’Espagne, & un grand nombre de décrétales des papes des quatre premiers siecles jusqu’à Sirice, dont plusieurs sont fausses & supposées. Voyez Decretales.

On fit ensuite plusieurs compilations nouvelles des anciens canons, comme celle de Réginon, abbé de Prum, qui vivoit l’an 900 ; celle de Burchard, évêque de Vormes, faite l’an 1020 ; celle d’Yves de Chartres, qui vivoit en 1100 ; & enfin Gratien, Bénédictin de Boulogne en Italie, fit la sienne vers l’an 1151 ; c’est celle qui est la plus citée dans le Droit canon. Fleury, Instit. au Dr. ecclés. tome I. part. I. ch. j. page 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. & 10.

Gratien mit à sa collection des textes de la Bible, les sentimens des peres sur les plus importantes matieres ecclésiastiques, & intitula son ouvrage la Concordance des canons discordans ; il le partagea par ordre de matieres, & non par ordre de tems, comme on avoit fait avant lui. Cette compilation fait partie du Droit canonique, & est appellée Decret. Voyez Decret & Canonique (droit).

On nous a depuis donné diverses collections des conciles, où l’on en a conservé les canons, comme celle des PP. Labbe & Cossart, Hardoüin, &c.

Les canons des conciles sont pour l’ordinaire conçûs en forme de lois, en termes impératifs, quelquefois conditionnels, & où l’injonction est presque toûjours accompagnée de la peine infligée à ceux qui la violeront : quand il s’agit du dogme, les canons sont quelquefois conçûs en forme d’anathème ; c’est-à-dire. que les PP. du concile y disent anathème, ou excommunient quiconque soûtiendra telle ou telle erreur qu’ils ont condamnée.

Canons des Apôtres ; on appelle ainsi une espece de collection des canons ou lois ecclésiastiques que l’on attribue à S. Clément pape, disciple de S. Pierre, comme s’il l’eût reçûe de ce prince des apôtres. Mais les Grecs même n’assûrent pas que ces canons ayent été faits par les apôtres, & recueillis de leur bouche par S. Clément ; ils se contentent de dire que ce sont des canons, λεγόμενοι τῶν ἀποστόλων, que l’on appelle des apôtres : & apparemment ils sont l’ouvrage de quelques évêques d’Orient, qui vers le milieu du iiie. siecle rassemblerent en un corps les lois qui étoient en usage dans les églises de leurs pays, & dont une partie pouvoit avoir été introduite par tradition dès le tems des apôtres, & l’autre par des conciles particuliers. Il y a quelque difficulté tant sur le nombre que sur l’autorité de ces canons. Les Grecs en comptent communément 85 : mais les Latins n’en ont reçû que 50, dont même plusieurs ne sont pas observés. Les Grecs comptent les 50 premiers à peu-près comme nous : mais ils en ajoûtent d’autres dans la plûpart desquels il y a des articles qui ne sont pas conformes à la discipline ni même à la créance de l’Église Latine ; & c’est pour cette raison qu’elle rejette les 35 derniers canons, comme ayant été la plûpart insérés ou falsifiés par les hérétiques & schismatiques. A l’égard de l’autorité de ces canons, le pape Celase, dans un concile tenu à Rome l’an 494, met le livre de ces canons des Apôtres entre les apocryphes ; & cela après le pape Damase, qui semble avoir été le premier qui détermina quels livres il falloit recevoir ou rejetter. Par cette raison Isidore les condamne aussi, dans le passage que Gratien rapporte de lui dans la seizieme distinction. Le pape Leon IX. au contraire excepte cinquante canons du nombre des apocryphes. Avant lui Denys le Petit avoit commencé son code des canons ecclésiastiques par ces cinquante canons. Gratien,

dans la même distinction seizieme, rapporte qu’Isidore ayant changé de sentiment, & se contredisant lui-même, met au-dessus des conciles ces canons des apôtres, comme approuvés par la plûpart des peres, & reçûs entre les constitutions canoniques ; & ajoûte que le pape Adrien I. a approuvé les canons en recevant le quatrieme concile où ils sont insérés : mais on peut dire que Gratien se trompe, & qu’il prend le second concile in trullo, que les Grecs appellent souvent le quatrieme concile, pour le premier concile tenu in trullo, qui est véritablement le sixieme œcuménique ou général. Quant à Isidore, le premier passage est d’Isidore de Séville, & le second est d’Isidore mercator ou peccator, selon la remarque d’Antoine Augustin, archevêque de Tarragone, qui dit que pour concilier ces diverses opinions il faut suivre le sentiment de Léon IX. qui est qu’il y a cinquante de ces canons des apôtres qui ont été reçûs, & que les autres n’ont aucune autorité dans l’église Occidentale. Il est certain que ces canons ne sont point des apôtres : mais ils paroissent fort anciens, & ont été cités par les anciens sous le nom de canons anciens, canons des Peres, canons ecclésiastiques. S’ils sont quelquefois appellés ou intitulés canons apostoliques, ce n’est pas à dire pour cela qu’ils soient des apôtres : mais il suffit qu’il y en ait quelques-uns qui ayent été faits par des évêques qui vivoient peu de tems après les apôtres, & que l’on appelloit hommes apostoliques. L’auteur des Constitutions apostoliques est le premier qui attribue ces canons aux Apôtres. Ils contiennent des réglemens qui conviennent à la discipline du second & du troisieme siecle de l’Église : ils sont cités dans les conciles de Nicée, d’Antioche, de Constantinople, & par plusieurs anciens. On ne fait pas en quel tems cette collection de canons a été faite ; il se peut faire que ce soit en différens tems ; non-seulement les cinquante premiers, mais les trente-cinq derniers, sont fort anciens ; les Grecs les ont toûjours reçûs : Jean d’Antioche, qui vivoit du tems de Justinien, les cite dans sa sixieme novelle ; ils sont approuvés dans le synode in trullo, & loüés par Jean Damascene & par Photius. Parmi les Latins ils n’ont pas toûjours eu le même sort : le cardinal Humbert les a rejettés ; Celase les a mis au nombre des livres apocryphes : Denys le Petit a traduit les cinquante premiers, & les a mis à la tête de sa collection ; remarquant toutefois que quelques personnes ne les avoient pas voulu reconnoître ; c’est peut-être pour cette raison que Martin de Brague ne les fit point entrer dans sa collection : mais Isidore ne fit point difficulté de les mettre dans la sienne ; & depuis ils ont toûjours fait partie du Droit canon. Aussi-tôt qu’ils parurent en France ils furent estimés, & allégués pour la premiere fois dans la cause de Prétextat du tems du roi Chilperic, & on y déféra. Hincmar témoigne qu’ils étoient à la tête d’une collection de canons faite par l’Église de France, & les croit anciens, quoiqu’ils ne soient pas des Apôtres. Voyez Beveregius, dans la Defense du code des canons de l’Église primitive. Daillé, de Pseud. epigraphis. Dupin, Dissertations préliminaires sur la Bible, chap. iij. Doujat, Hist. du Droit. (G)

Canon, (Chronol.) ce mot, autant qu’on en peut juger en parcourant les Chronologistes, est employé en différens sens : quelquefois il signifie simplement des tables chronologiques, telles que les tables du nombre d’or, des épactes, & de la pâque ; quelquefois il signifie la méthode ou regle pour résoudre certains problèmes de chronologie ; comme trouver les épactes, les pleines lunes, les fêtes mobiles, &c. (O)

* Canon Paschal, (Hist. ecclés.) c’est une table des fêtes mobiles où l’on marque pour un cycle de dix-neuf ans le jour auquel tombe la fête de Pâque, & les autres fêtes qui en dépendent.