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Cabalistes Chrétiens entrent dans le combat avec une bonne foi qui déconcerte, parce qu’elle fait connoître qu’ils ont dessein de prouver ce qu’ils avancent, & qu’ils sont convaincus que toute la religion chrétienne se trouve dans la Cabale ; ils insultent ceux qui s’en moquent, & prétendent que c’est l’ignorance qui enfante ces soûris méprisans. On peut employer cette science contre les rabbins qui en sont entêtés, afin d’ébranler leur incrédulité par les argumens que l’on tire de leur propre sein ; & l’usage qu’on fait des armes qu’ils nous prêtent, peut être bon quand on les tourne contre eux-mêmes : mais il faut toûjours garder son bon sens au milieu du combat, & ne se laisser pas ébloüir par l’éclat d’une victoire qu’on remporte facilement, ni la pousser trop loin. Il faut sentir la vanité de ces principes, & n’en pas faire dépendre les vérités solides du Christianisme ; autrement on tombe dans deux fautes sensibles.

En effet, le Juif converti par des argumens cabalistiques, ne peut pas avoir une véritable foi. Elle chancellera dès le moment que la raison lui découvrira la vanité de cet art ; & son christianisme, s’il n’est tiré que du fond de la Cabale, tombera avec la bonne opinion qu’il avoit de sa science. Quand même l’illusion dureroit jusqu’à la mort, en seroit-on plus avancé ? On feroit entrer dans l’église chrétienne un homme dont la foi n’est appuyée que sur des roseaux. Une connoissance si peu solide peut-elle produire de véritables vertus ? Mais, de plus, le prosélyte, dégagé des préjugés de sa nation, & de l’autorité de ses maîtres, & de leur science, perdra peu à peu l’estime qu’il avoit pour elle. Il commencera à douter : on ne le ramenera pas aisément, parce qu’il se défiera de ses maîtres qui ont commencé par la fraude ; & s’il ne rentre pas dans le Judaïsme par intérêt, il demeurera Chrétien sans religion & sans piété. (C)

Voilà bien des chimeres : mais l’histoire de la Philosophie, c’est-à-dire des extravagances d’un grand nombre de savans, entre dans le plan de notre ouvrage ; & nous croyons que ce peut être pour les Philosophes même un spectacle assez curieux & assez intéressant, que celui des reveries de leurs semblables. On peut bien dire qu’il n’y a point de folies qui n’ayent passé par la tête des hommes, & même des sages ; & Dieu merci, nous ne sommes pas sans doute encore au bout. Ces Cabalistes qui découvrent tant de mysteres en transposant des lettres ; cette lumiere qui sort du crâne du grand Anpin ; la flamme bleue que les brachmanes se cherchent au bout du nez ; la lumiere du Tabor que les ombilicaux croyoient voir à leur nombril ; toutes ces visions sont à peu-près sur la même ligne : & après avoir lû cet article & plusieurs autres, on poura dire ce vers des Plaideurs :

Que de fous ! je ne fus jamais à telle fête. (O)

CABALIG, (Géog.) ville d’Asie dans le Turquestan. Long. 103. lat. 44.

CABALISTE, terme de Commerce usité à Toulouse & dans tout le Languedoc. C’est un marchand qui ne fait pas le commerce sous son nom, mais qui est intéressé dans le négoce d’un marchand en chef. (G)

CABALISTES, s. m. plur. (Hist.) secte des Juifs qui suit & pratique la Cabale, qui interprete l’Ecriture selon les regles de la Cabale prise au second sens que nous avons expliqué. Voyez Cabale.

Les Juifs sont partagés en deux sectes générales ; les Karaïtes, qui ne veulent par recevoir les traditions, ni le thalmud, mais le seul texte de l’Ecriture (Voyez Karaïtes.) ; & les Rabbinistes, ou Thalmudistes, qui outre cela reçoivent encore les traditions, & suivent le Thalmud. Voyez Rabbinistes.

Ceux-ci sont encore divisés en deux partis ; sçavoir, Rabbinistes simples, qui expliquent l’Ecriture selon le sens naturel, par la grammaire, l’histoire, ou la tradition ; & en Cabalistes, qui pour y découvrir les sens cachés & mysterieux que Dieu y a mis, se servent de la Cabale, & des principes sublimes que nous avons rapportés dans l’article précédent.

Il y a des visionnaires parmi les Juifs, qui disent que ce n’est que par les mysteres de la Cabale, que J. C. a opéré ses miracles. Quelques sçavans ont cru que Pythagore & Platon avoient appris des Juifs en Egypte l’art cabalistique, & ils ont cru en trouver des vestiges bien marqués dans leurs philosophies. D’autres croyent au contraire que c’est la Philosophie de Pythagore & de Platon qui a produit la Cabale. Quoi qu’il en soit, il est certain que dans les premiers siecles de l’Eglise, la plûpart des hérétiques donnerent dans les vaines idées de la Cabale. Les Gnostiques, les Valentiniens, les Basilidiens, y furent surtout très attachés. C’est ce qui produisit l’ΑΒΡΑΞΑΣ, & tant de talismans, dont il nous reste encore une grande quantité dans les cabinets des antiquaires. Voyez Talisman, &c. (G)

CABAMITEN ou CABAMITAN, (Geog.) petite contrée d’Asie dans la Tartarie.

CABANE, s. f. (Architecture.) du Latin capana ; c’est aujourd’hui un petit lieu bâti avec de la bauge (espece de terre grasse) & couvert de chaume, pour mettre à la campagne les pauvres gens à l’abri des injures du tems. Anciennement les premiers hommes n’avoient pas d’autres demeures pour habitation : l’Architecture a commencé par les cabanes, & a fini par les palais. Voyez Architecture. (P)

Cabane, s. m. (en terme de Marine.) c’est un petit logement de planches pratiqué à l’arriere, ou le long des côtés du vaisseau, pour coucher les pilotes ou autres officiers ; ce petit réduit est long de six piés, & large de deux & demi ; & comme il n’en a que trois de hauteur, on n’y peut être debout.

On donne le même nom à l’appartement pratiqué à l’arriere des bûches qui vont à la pêche du hareng, & qui est destiné pour les officiers qui les conduisent. Voyez Pl. XII. fig. 2.

C’est aussi un bateau couvert de planches de sapin, sous lequel un homme peut se tenir debout & à couvert ; il a un fond plat, & on s’en sert sur la Loire.

Les bateliers appellent aussi cabane un bateau couvert du côté de la poupe, d’une toile que l’on nomme banne, soûtenue sur des cerceaux pliés en forme d’arc, pour mettre les passagers à couvert du soleil & de la pluie. Voyez Bateau. (Z)

CABANIA ou KABANIA, (Géog.) ville & forteresse de la Russie septentrionale, dans la province de Burati.

CABARER, verb. neut. est un terme de brasserie, qui signifie jetter les métiers ou l’eau d’un vaisseau dans un autre, soit avec le jet ou avec le chapelet. Voyez l’article Brasserie.

CABARET, s. m. (Hist. nat. bot.) asarum. Genre de plante à fleurs sans pétales, composée de cinq ou six étamines qui sortent d’un calice découpé en trois parties. La partie postérieure de ce calice devient dans la suite un fruit qui est pour l’ordinaire anguleux, divisé en six loges, & rempli de quelques semences oblongues. Tournefort Inst. rei herb. Voyez Plante.

L’asarum offic. germ. a la racine purgative & émétique ; elle desobstrue le foie, provoque les regles, expulse l’arrierefaix, & même le fœtus. On la recommande dans la jaunisse, l’hydropisie, les douleurs des reins, & la goutte : on l’appelle la panacée des fievres quartes. Les paysans en font leur fébrifuge. Une emplâtre de ses feuilles appliquée sur la région