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de ce que les uns auront opéré sur une bile fraîche, & les autres sur une bile vieille & comme pourrie ; souvent aussi de l’inexactitude ou de l’ignorance des artistes ; pour ne rien dire de la mauvaise foi de ceux qui ont des systèmes favoris à protéger.

Huile. Le résidu de l’évaporation de la distillation de la bile est si huileux, qu’il en est inflammable. Les calculs de la vésicule du fiel prennent feu, & même se consument tout entiers. J’ai observé la même chose sur d’autres calculs sortis par les selles à la suite de violentes coliques duodénales & hépatiques, & qui conséquemment étoient faits d’une bile hépatique plus aqueuse, épaissie & putréfiée, soit dans le méat cholidoque, soit dans l’intestin. Homberg n’a t-il pas tiré de la bile une graisse verte & solide ? Hartman n’a-t-il pas vû dans les cochons un globe de graisse à l’endroit de la vésicule ? enfin l’origine de la bile, qui est constamment l’huile de l’épiploon fondue, n’est-elle pas la preuve évidente de ce que nous avançons, pour ne pas répéter ici les expériences précédentes ?

Sel. Il s’en trouve très-peu dans la bile, & toûjours de diverse nature. L’un, suivant la nature du sel humain, a de l’affinité avec le sel ammoniac, dont il ne differe qu’en ce qu’il s’alkalise par la distillation seule : l’autre est un sel fixe terrestre ou mêlé de terre, comme on l’a déjà insinué. On ne découvre au microscope ni l’un ni l’autre, suivant le témoignage vérifié de Leuwenhoeck. L’amertume de la bile ne vient point de son sel, mais de son huile, qui à force d’être broyée & échauffée dans les vaisseaux qui la préparent, dans le tamis qui la filtre, & le réservoir qui la garde, devient rance & amere : ce qui est confirmé par les deux faits suivans. La bile du lion & des autres animaux féroces est très-amere, parce qu’elle subit dans leurs vaisseaux l’action de ressorts très-violens ; au lieu que dans les personnes sédentaires, & qui ont le sang doux, on la trouve le plus souvent aqueuse & insipide.

Les esprits de la bile sont une huile si atténuée, qu’elle coule comme l’eau & avec l’eau, qu’elle rend laiteuse, comme on l’a vû dans les expériences de Vieussens & de Verheyen. En effet, la blancheur du lait vient de l’huile étroitement unie à ses parties : aussi cette blancheur diminue & disparoît avec l’huile, comme le fait voir clairement la coagulation du lait, dont la sérosité dépouillée des parties huileuses qui font le beurre & le fromage, devient enfin verdâtre. Il y a de plus beaucoup d’air dans la bile. Un calcul de la vésicule du fiel, donne 648 fois plus d’air que son volume ; ceux de la vessie urinaire, comme un peu moins rares, ou plus compactes, en contiennent un peu moins : cela ne passe pas 645, suivant les expériences de Hales.

La bile est une liqueur très-importante pour l’œconomie animale. Le docteur Woodward, qui a observé très-exactement ses effets par tout le corps, ne fait pas difficulté d’attribuer plusieurs maladies à la mauvaise disposition de la bile : il la regarde comme une des principales sources de la vie de l’animal ; d’où il conclut qu’elle est le principe essentiel de la bonne ou mauvaise disposition du corps : mais les anciens ne la regardoient que comme un excrément inutile. Plusieurs des modernes, à cause de la petite quantité de la bile, ont cru faussement que cette sécrétion n’étoit pas la seule fonction à quoi un viscere aussi considérable que le foie, fût destiné. Le docteur Keil observe que dans un chien, dont le canal cholidoque étoit presque aussi gros que celui de l’homme, il se filtra environ deux dragmes de bile par heure : ainsi il est à croire que dans un homme il s’en doit séparer une plus grande quantité.

Il se trouve de la bile dans tous les animaux, même dans les pigeons, &c. qui n’ont point de vésicule du

fiel ; puisque leur foie est toûjours très-amer. M. Tauvry remarque que la bile devient une des causes principales de la soif, en se mêlant avec la salive. Voyez Soif.

Quelquefois la bile devient verdâtre, de jaune qu’elle étoit ; quelquefois de couleur de verd de gris pâle, semblable au jaune d’œuf, & cela sans aucune autre cause apparente, qu’une émotion, une convulsion, ou un mouvement violent des esprits. Ces émotions causent de grandes maladies, comme le vomissement, le dégoût, la mélancholie, les soûpirs, les cardialgies, des vents, la diarrhée, la dyssenterie, les maladies aiguës, & des fievres très-dangereuses. Quelquefois la bile devient noire, & alors elle prend le nom de choler, & elle a le goût d’un vinaigre très-acide ; quelquefois elle ressemble à du sang pourri, qui corrode, brûle, détruit, dissout, occasionne des inflammations, des gangrenes, des mortifications, des douleurs vives, & des fermentations violentes. Boerhaave distingue trois sortes de bile noire : savoir 1°. la plus douce, provenant d’un mouvement trop violent du sang, d’où elle prend son nom d’aduste, ou bile brûlée. La seconde est dans un degré d’altération plus grand que la premiere, & vient des mêmes causes qui agissent avec plus de force. La troisieme est une bile corrompue & brûlée, qui, si elle devient de couleur verdâtre ou pâle, est la plus mauvaise de toutes.

La trop grande évacuation de bile, soit par haut, ou par bas, ôte à la chylification son principal instrument, & par là empêche la digestion, la sécrétion, & l’éjection des excrémens, occasionne des aigreurs, des frissons, des foiblesses, la pâleur, l’évanoüissement ; & si, lorsque la bile est préparée, elle ne se décharge pas comme il faut dans les intestins, elle cause la jaunisse. Voyez Jaunisse. (L)

* BILEDULGERID, (Géog.) l’une des cinq grandes contrées de l’Afrique ; elle est bornée au septentrion par la Barbarie, à l’orient par l’Egypte, à l’occident par la mer Atlantique, & au midi par les déserts de Zara. Elle est fertile en riz, en dattes, en chameaux, & en chevaux. Les habitans sont Mahométans & Juifs, & leurs rois sont tributaires de Tunis, d’Alger, & de Tripoli.

* BILHON ou BILLON, (Géog.) petite ville de France, dans l’Auvergne. Long. 21. lat. 45. 36.

BILIAIRE, adj. en Anatomie, nom d’un conduit qu’on appelle aussi hépatique, voyez Hépatique : il est enveloppé avec la veine-porte dans un faisceau commun de nerfs & de petites membranes. Il est fait de diverses tuniques, l’externe, ensuite la cellulaire, dans laquelle rampent de petits vaisseaux qui partent des petits troncs voisins des arteres & des veines. Les fibres transverses dont parle Glisson, se dérobent presqu’à la vûe. La membrane interne est veloutée & semblable en général à la tunique réticulaire de la vésicule du fiel. Son tronc droit & antérieur est placé auprès de la veine-porte. Il monte en-devant, & au-delà de la division de la veine-porte ; il se divise lui-même en deux rameaux, dont l’un à droit, l’autre à gauche, accompagnent toûjours la veine-porte, & donnent des rejettons qui escortent ses petits rameaux jusqu’à la fin & jusques dans les membranes des ligamens & de la vésicule du fiel, toûjours enveloppés de la membrane de Glisson, de laquelle tous les vaisseaux du foie tirent une membrane propre & commune. C’est pourquoi s’il y a cinq branches de la veine-porte, il y en a autant des principaux rameaux des pores biliaires. Haller, comment. Boerh.

Les pores biliaires, sont des canaux qui ont leur source dans les glandes du foie ; ils s’unissent en plusieurs troncs d’une grandeur égale aux branches hépatiques, & les accompagnent toutes à travers la