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On appelloit juges à bâton traînant, ceux qui étoient chargés de l’exécution de cet édit, soit par rapport à la maniere rigoureuse & sommaire dont ils faisoient leurs exécutions, soit par rapport au bâton qu’ils portoient comme une marque de leur autorité, & qu’ils tenoient à la main en jugeant les malfaiteurs. (G)

* Baton, (en Mythol.) on distingue particulierement l’augural & le pastoral : l’augural, appellé par les Latins lituus, étoit façonné en crosse par le bout ; il servoit à l’augure pour partager le ciel dans ses observations ; celui de Romulus avoit de la réputation chez les Romains : ceux d’entre eux qui ne se piquoient pas d’une certaine force d’esprit, croyoient qu’il avoit été conservé miraculeusement dans un grand incendie. Quintus tire de ce prodige & de la croyance générale qu’on lui accordoit, une grande objection contre le Pyrrhonisme de son frere Ciceron, qui n’y répond que par des principes généraux dont l’application vague seroit souvent dangereuse : Ego Philosophi non arbitror testibus uti qui aut casu veri, aut malitia falsi fictique esse possunt. Argumentis & rationibus oportet, quare quidque ita sit, docere ; non eventis, iis præsertim quibus mihi non liceat credere… omitte igitur lituum Romuli, quem maximo in incendio negas potuisse comburi… Nil debet esse in Philosophia commentitiis fabellis loci. Illud erat Philosophi, totius augurii primum naturam ipsam videre, deinde inventionem, deinde constantiam… quasi quidquam sit iam valde, quam nihil sapere vulgare ? aut quasi tibi ipsi in judicando placeat multitudo.

Ciceron a beau dire ; il y a cent mille occasions où la sorte d’examen qu’il propose ne peut avoir lieu ; où l’opinion générale, la croyance non interrompue, & la tradition constante, sont des motifs suffisans ; où le jugement de la multitude est aussi sûr que celui du philosophe : toutes les fois qu’il ne s’agira que de se servir de ses yeux, sans aucune précaution antérieure, sans le besoin d’aucune lumiere acquise, sans la nécessité d’aucune combinaison ni induction subséquente, le paysan est de niveau avec le philosophe : celui-ci ne l’emporte sur l’autre que par les précautions qu’il apporte dans l’usage de ses sens ; par les lumieres qu’il a acquises, & qui bientôt ôtent à ses yeux l’air de prodige à ce qui n’est que naturel ; ou lui montrent comme surnaturel ce qui est vraiment au-dessus des forces de la nature, qui lui sont mieux connues qu’à personne ; par l’art qu’il a de combiner les expériences, d’évaluer les témoignages, & d’estimer le degré de certitude, & par l’aptitude qu’il a de former des inductions ou de la supposition, ou de la vérité des faits.

Le baton pastoral est de deux sortes : c’est ou celui qu’on voit dans les monumens anciens à la main des Faunes, des Sylvains ; en un mot des dieux des bois & des forêts : il est long, noüeux, & terminé en crosse : ou c’est la crosse même que nos évêques portent à la main dans les jours de cérémonie ; c’est un assemblage de différentes pieces façonnées d’or & d’argent, entre lesquelles on peut distinguer le bec de corbin ou la crosse d’en-haut, les vases, les fonds de lanterne, les dômes, les douilles, & les croisillons.

Il y a encore des bâtons de chantre & de confrairie. Le bâton de confrairie, n’est autre chose qu’un long morceau de bois, tourné au tour, façonné, doré, ou argenté, à l’extrémité duquel est fichée l’image du patron de la confrairie.

Le baton de chantre en usage dans quelques cathédrales, ressemble assez au bâton pastoral, quant à la richesse, & même quant à la forme, à l’exception qu’il n’est pas terminé en haut par la crosse, mais qu’il a quelqu’autre forme relative, soit à la dignité du chantre, soit aux prérogatives de l’église.

Baton, en terme de Blason, sorte de bande qui n’a qu’un tiers de la largeur ordinaire. Voyez Bande.

Le bâton ne va pas d’un côté à l’autre de l’écusson, comme fait la bande ou l’écharpe, mais il est coupé court en forme de tronçon ; il est d’usage pour marquer la bâtardise. (V)

Batons à deux bouts ; ce sont de longs bâtons que les gardes des forêts & des parcs, &c. portent comme une marque de leur emploi, & dont ils se servent aussi comme d’une arme.

Batons ou Baculi, en Pharmacie, compositions façonnées en cylindre, ayant la figure de bâtons. C’est ainsi que l’on figure les magdaleons des emplâtres officinales.

C’est sous cette figure que l’on met les chandelles galeniques, les bougies medicamenteuses. Voyez Chandelle, Bougie.

C’est aussi sous cette forme que l’on réduit certaines préparations bechiques, ou que l’on ordonne dans la toux, comme le suc de réglisse de Blois, les tablettes ou bâtons de sucre d’orge. Voyez Tablettes, Suc de Reglisse. (N)

Baton d’Arpenteur ; voyez Equerre d’Arpenteur. (E)

Baton de Jacob, instrument dont on se sert en mer pour mesurer les hauteurs des astres. On l’appelle autrement arbalestrille. Voyez Arbalestrille. (T)

Baton à meche, (Marine.) c’est une meche qu’on entretient toûjours brûlante sur le château-d’avant.

Baton de Pavillon, ou d’Enseigne (Marine.) c’est un petit matereau, ou longue gaule de sapin, ou d’autre bois léger, qui sert à arborer le pavillon. Voyez en la figure & la position dans la Pl. I. à la lettre G.

Baton de Girouette, c’est un matereau très-petit, ou gaule, dans lequel est plantée la verge de fer qui tient la giroüette. Voyez à la Planche I. les giroüettes marquées g.

Baton de Flamme, c’est un bâton qui n’est long qu’autant que la flamme est large par le haut. C’est ce bâton qui la tient au haut du mât.

Baton de Vadel, Baton ou Manche de Guipon, (Marine.) ce sont certains bâtons où l’on attache les bouchons d’étoupe ou de penne, dont se sert le calfateur pour goudronner ou braier le vaisseau. (Z)

Batons de Neper. Voyez Neper.

Baton, en Architecture, c’est une moulure usitée dans la base des colonnes. Voyez Tore.

Baton, en Musique, est une barre épaisse qui traverse perpendiculairement une ou plusieurs lignes de la portée, & qui, selon ses différentes longueurs, selon le plus ou le moins de ces lignes qu’elle embrasse, exprime un plus grand ou moindre nombre de mesures qu’on doit compter en silence.

Anciennement, les bâtons représentoient autant de différentes valeurs de notes, depuis la ronde jusqu’à la maxime qui en valoit huit, & dont la durée en silence s’évaluoit par un bâton, qui, partant d’une ligne, traversoit trois intervalles, & alloit joindre la quatrieme ligne.

Aujourd’hui le plus grand bâton est de quatre mesures ; il faut que, partant d’une ligne, il traverse la suivante, & arrive à la troisieme ainsi :

On le répete une fois, deux fois, ou autant de fois qu’il faut pour exprimer huit mesures, ou douze, ou tout autre multiple de quatre, & l’on ajoûte ordinai-