Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 17.djvu/760

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fin, il réservoit le vingt-cinquieme pour une histoire littéraire complette, dont il avoit donné un essai.

On convient généralement que l’ouvrage de Lambecius est utile, curieux, & propre à perfectionner l’histoire littéraire ; mais l’auteur est beaucoup trop diffus. Daniel Nesselius, successeur de Lambecius, a donné un abrégé & une continuation de ce vaste ouvrage sous ce titre : breviarium & supplementum commentariorum Lambecianorum, &c. Vienne & Nuremberg, 1690, in-fol. Cet ouvrage n’a pas réussi autant que celui de Lambecius. Jacques-Frédéric Reimman a entrepris de donner un abrégé des deux ouvrages en un seul volume in-8°. imprimé à Hanovre 1712, sous le titre bisarre de Bibliotheca acroamatica, &c. C’est une méchante rapsodie. (D. J.)

BOULAF, s. m. (Hist. de Pologne.) c’est ainsi qu’on nomme en polonois le bâton de commandement que le grand & le petit général de la république reçoivent du roi, pour marque de leur charge.

Le boulaf est une masse d’armes fort courte, finissant par un bout en grosse pomme d’argent ou de vermeil, qu’on enrichit quelquefois de pierreries. Ce bâton de commandement n’est pas celui qui figure dans les armées, mais une grande lance ornée d’une queue de cheval, propre à être vue de loin dans la marche, dans le combat, ou dans un camp. Les deux généraux campent l’un à droite, l’autre à gauche de la ligne, avec cette marque du généralat qui se nomme bontchouk. M. l’abbé Coyer. (D. J.)

BROUET noir, (Littérat.) c’étoit un des mets exquis des anciens Spartiates, mets dont les auteurs grecs & latins ont parlé tant de fois, & que le docte Meursius, par des conjectures tirées d’Athénée, croit avoir été composé de chair de porc, de vinaigre & de sel. Le lecteur a peut-être bien vu dans les questions tusculanes ce que Cicéron rapporte agréablement de Denys, tyran de Sicile, qui avoit été si fort tenté de goûter du brouet noir, qu’il fit venir exprès un cuisinier de Lacédémone pour le mieux apprêter. Au premier essai le tyran s’en rebuta, & s’en plaignit au cuisinier qui lui dit qu’il avoit raison, & qu’il y manquoit une sauce. Denys ayant demandé quelle sauce : « c’est le travail de la chasse, poursuivit le cuisinier ; ce sont les courses sur le rivage de l’Eurotas, & la faim & la soif des Lacédémoniens ». (D. J.)

BULLE de Composition, (Hist. mod.) On inventa depuis la bulle de la Croisade, celle de la composition, en vertu de laquelle il est permis de garder le bien qu’on a volé, pourvu que l’on n’en connoisse pas le maître. De telles superstitions sont bien aussi fortes que celles que l’on reprochoit aux Hébreux. La sottise, la folie, & les vices font par-tout une partie du revenu public. La formule de l’absolution qu’on donne à ceux qui ont acheté cette bulle, est celle-ci : « par l’autorité de Dieu tout-puissant, de S. Pierre, de S. Paul, & de notre saint pere le pape, à moi commise, je vous accorde la rémission de tous vos péchés confessés, oubliés, ignorés, & des peines du purgatoire ». Essai sur l’hist. genér. par M. de Voltaire. (D. J.)

C

CABOTAGE, s. m. (Navigation.) le cabotage est une navigation qui se fait d’un port à l’autre dans un royaume ; il est pour le transport des marchandises & denrées par mer, ce que sont les rouliers pour le charroi des marchandises & denrées d’une ville & d’une province dans une autre. Ce cabotage est absolument abandonné aux Hollandois ; & quoiqu’on les ait assujettis en France au droit de cent sols par tonneau, ce droit est si foible & leur économie si grande, que les sujets du roi ne sont pas encore suffisamment encouragés à l’entreprendre ; il en dérive

un mal sensible en ce que les Hollandois continuant, pour ainsi dire, seuls à le faire, augmentent à-peu-près d’autant le prix du fret, lequel retombe nécessairement sur celui des marchandises que nous faisons passer d’un port dans un autre de ce royaume. On ne viendra jamais plus sûrement à-bout de transporter aux sujets du roi le cabotage, que nous laissons ainsi usurper aux Hollandois, au grand préjudice de cet état, qu’en coupant le nœud gordien qui nous lie les mains ; c’est-à-dire en rendant une ordonnance du roi dans l’esprit de l’acte de navigation passé au parlement d’Angleterre en 1660, que les Anglois regardent comme leur palladium. (D. J.)

CÆSAR, (Hist. rom.) les empereurs communiquoient le nom de Cæsar à ceux qu’ils destinoient à l’empire ; mais ils ne leur donnoient point les titres d’imperator & d’augustus ; c’eût été les associer actuellement. Ces deux derniers titres marquoient la puissance souveraine. Celui de Cæsar n’étoit proprement qu’une désignation à cette puissance, qu’une adoption dans la maison impériale. Avant Dioclétien on avoit déjà vu plusieurs empereurs & plusieurs Cæsars à-la-fois : mais ces empereurs possedoient l’empire par indivis. Ils étoient maitres solidairement avec leurs collégues de tout ce qui obéissoit aux Romains. Dioclétien introduisit une nouvelle forme de gouvernement, & partagea les provinces romaines. Chaque empereur eut son département. Les Cæsars eurent aussi le leur : mais ils étoient au-dessous des empereurs. Ils étoient obligés de les respecter comme leurs peres. Ils ne pouvoient monter au premier rang que par la permission de celui qui les avoit fait Cæsar ou par sa mort. Ils recevoient de sa main leurs principaux officiers. Ordinairement ils ne portoient point le diadème, que les augustes avoient coutume de porter depuis Dioclétien. Cette remarque est de M. de la Bléterie. (D. J.)

CAHUCHU, (Hist. des drogues.) prononcez cahoutchou, c’est la résine qu’on trouve dans les pays de la province de Quito, voisins de la mer. Elle est aussi fort commune sur les bords du Maranon, & est impénétrable à la pluie. Quand elle est fraîche, on lui donne avec des moules la forme qu’on veut ; mais ce qui la rend le plus remarquable, c’est sa grande élasticité. On en fait des bouteilles qui ne sont pas fragiles, & des boules creuses qui s’applatissent quand on les presse, & qui dès qu’elles ne sont plus gênées, reprennent leur premiere figure.

Les Portugais du Para ont appris des Omaguas à faire, avec la même matiere, des seringues qui n’ont pas besoin de piston. Elles ont la forme de poires creuses, percées d’un petit trou à leurs extrémités, où l’on adapte une cannule de bois ; on les remplit d’eau, & en les pressant lorsqu’elles sont pleines, elles font l’effet d’une seringue ordinaire. Ce meuble est fort en usage chez les Omaguas.

Quand ils s’assemblent entr’eux pour quelque fête, le maître de la maison ne manque pas d’en présenter une par politesse à chacun des conviés, & son usage précede toujours parmi eux le repas de cérémonie. En 1747, on a trouvé l’arbre qui produit cette resine dans les bois de Cayenne, où jusqu’alors il avoit été inconnu. Hist. de l’acad. des Scienc. année 1745. (D. J.)

CANGE, s. m. (Comm.) liqueur faite avec de l’eau & du ris détrempé. Les Indiens s’en servent pour gommer les chites. Voyez Chites.

CANONNIERE, terme de Bijoutier, se dit de la gorge d’un étui, sur laquelle se glisse la partie supérieure de l’étui, appellée bonnet.

CANTHARUS, (Littérature.) c’est proprement le nom qu’on donnoir à la coupe dont Bacchus se servoit pour boire, ce qui fait juger qu’elle étoit de bonne mesure, gravis, pesante, comme dit Virgile, Pline,