Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 17.djvu/365

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mais l’on n’obtient de toutes ces substances qu’une très-petite quantité de vitriol, relativement aux besoins de la société ; c’est pour cela qu’on cherche à en tirer une quantité plus grande, en employant les secours de l’art.

En effet, toutes les pyrites n’ont point la propriété de se décomposer d’elles-mêmes à l’air ; & celles à qui cela arrive le font quelquefois très-lentement. On est donc obligé de commencer par les griller ; pour cet effet, on commence par former des aires, que l’on couvre de bois, & l’on arrange par dessus les pyrites en tas ; on met le feu à ce bois, & par ce moyen on dégage la plus grande partie du soufre qui empêchoit l’acide vitriolique de se mettre en action. Voyez l’article Soufre. Lorsque les pyrites ont été grillées suffisamment, on les laisse exposées en un tas à l’air, & alors il s’y forme du vitriol, que l’on en retire en lavant ces pyrites calcinées, ou ce qui vaut encore mieux, en les faisant bouillir avec de l’eau dans des chaudieres de plomb ; on laisse reposer cette eau pendant quelque tems, afin qu’elle puisse se dégager des matieres étrangeres qui se déposent au fond. Alors on la met dans de nouvelles chaudieres de plomb, dont le fond est plat & peu profond, & qui sont placées sur un fourneau. On y fait bouillir l’eau chargée de vitriol, ayant soin d’en remettre de nouvelle à mesure que l’évaporation s’en fait, de maniere que la chaudiere demeure toujours pleine. On continue à faire bouillir l’eau vitriolique, jusqu’à ce qu’elle devienne d’une consistance épaisse, & qu’elle soit prête à se crystalliser, ce que l’on reconnoît à la pellicule saline qui se forme à sa surface ; alors on vuide cette eau dans des auges ou cuves de bois, où elle séjourne quelque tems pour se clarifier, après quoi on la remet dans d’autres auges ou cuves, dans lesquelles on place des bâtons de bois branchus. Par ce moyen le vitriol, sous la forme de crystaux, s’attache aux parois de ces auges, & aux bâtons qu’on n’y a mis que pour présenter un plus grand nombre de surfaces au vitriol qui se forme. L’eau qui surnage aux crystaux se remet en évaporation avec de nouvelle eau chargée de vitriol, & on la fait bouillir de nouveau dans les chaudieres de plomb, de la maniere qui vient d’être décrite. Mais il faut prendre garde pendant la cuisson, qu’il ne tombe aucune matiere grasse dans la chaudiere, parce que cela nuiroit à l’opération.

Telle est la maniere qui se pratique pour obtenir le vitriol des pyrites grillées ; elle peut avoir quelques variations dans les différens pays, mais ces différences ne sont point essentielles. Quand on a obtenu le vitriol de cette maniere, il se met dans des tonneaux à l’abri du contact de l’air, & il est propre à entrer dans le commerce.

On sent aisément qu’il est presque impossible qu’un vitriol soit parfaitement pur, vû que les pyrites contiennent souvent, outre le fer, une portion plus ou moins grande de cuivre, ce qui est cause que le vitriol est quelquefois mélangé ; & il peut aussi s’y trouver des portions d’alun. Ainsi quand on veut faire des opérations exactes avec le vitriol, il faut le purifier de nouveau, ou bien le faire artificiellement. Si l’on veut avoir un vitriol martial bien pur, on n’aura qu’à faire dissoudre dans l’eau le vitriol que l’on soupçonne de contenir quelques portions de cuivre, on y trempera un morceau de fer, & par ce moyen la partie cuivreuse se précipitera sur le fer qui deviendra d’une couleur de cuivre, & les parties du fer prendront la place du cuivre qui se sera précipité.

Le vitriol bleu ou cuivreux, se trouve quelquefois formé naturellement, quoiqu’en petite quantité ; il est rare qu’il ne contienne point une portion de fer, parce qu’il est produit par des pyrites qui contiennent toujours nécessairement ce métal. Ce vitriol se

fait artificiellement, en mettant en cémentation des lames & des rognures de cuivre avec du soufre, on en fait des couches alternatives, l’acide qui se dégage du soufre s’unit au cuivre, & forme avec lui un vitriol bleu, que l’on obtient en lavant le mélange, & en le faisant crystalliser.

Le vitriol blanc n’est pas non-plus parfaitement pur, comme celui qui vient de Goslar est produit par une mine très-mélangée, qui contient du fer, du cuivre, du zinc, & du plomb ; il renferme souvent des portions de toutes ces substances.

On trouve quelquefois de ce vitriol blanc tout formé par la nature, dans les souterrains de la mine de Ramelsberg, au Hartz, dans le voisinage de la ville de Goslar. Mais c’est par l’art que l’on en obtient la plus grande quantité. Pour cet effet, on commence par griller la mine, qui comme nous l’avons observé, est très-mélangée ; après le grillage on lave cette mine dans de l’eau, que l’on laisse séjourner pour qu’elle se clarifie. Alors on la décante, & on la verse dans des chaudieres de plomb, où on la fait bouillir ; on la laisse reposer de nouveau, après quoi on la fait crystalliser. On calcine de nouveau les crystaux de vitriol blanc qui se sont formés ; on les dissout dans de l’eau ; on laisse reposer la dissolution ; on décante ensuite la partie qui est claire & limpide ; on la fait bouillir de nouveau, & lorsqu’elle est devenue d’une consistence solide, on la met dans des moules triangulaires, où ce vitriol acheve de se sécher : & on la débite de cette maniere. Malgré ces précautions, ce vitriol ne peut être que très-mélangé, quoique le zinc en fasse le principal ingrédient. En effet, on peut en retirer ce demi-métal ; pour cela l’on n’a qu’à dissoudre le vitriol blanc dans de l’eau ; on précipitera la dissolution par un alkali fixe ; on mêlera le précipité qu’on aura obtenu avec du charbon pulvérisé ; on mettra ce mélange en distillation dans une cornue de verre, & l’on trouvera qu’il se sera attaché dans le col de la cornue du zinc sublimé, qui mêlé avec le cuivre, le jaunira : propriété qui caractérise ce demi-métal. Voyez Zinc. On voit par ce qui précede, que quand on voudra avoir du vitriol blanc, bien pur, le plus sûr sera de le faire soi même, en combinant de l’acide vitriolique avec du zinc.

L’alun, comme nous l’avons fait observer, est aussi un vrai vitriol, il est formé par la combinaison de l’acide vitriolique & d’une terre dont la nature est peu connue des chimistes ; M. Rouelle la regarde comme une terre végétale produite sur-tout par la décomposition des bois qui ont été ensevelis en terre. Ce savant académicien croit que tout l’alun qui se trouve tout formé dans la nature est produit des volcans & des feux souterreins. Il est certain que ce sel se trouve en grande abondance en Italie, près du Vésuve, de l’Etna, près de Rome, dans la Solfatara, &c. on tire aussi l’alun de quelques terres grasses & bitumineuses qui se trouvent près des charbons de terre, & qui paroissent formées par la décomposition de bois fossiles & bitumineux.

On donne quelquefois aux différens vitriols les noms des pays d’où ils nous viennent ; c’est ainsi qu’on dit du vitriol romain, d’Hongrie, d’Angleterre, de Chypre, &c. Ces vitriols sont plus ou moins purs en raison du soin que l’on apporte à les faire, & de la nature des substances d’où on les tire. Avant que de s’en servir dans les opérations de la chimie, il est à propos de les purifier, pour les dégager des matieres étrangeres qui peuvent s’être jointes à ces vitriols par le peu de soin que l’on a pris dans les atteliers où on les travaille en grand ; pour les purifier, il faut dissoudre les vitriols dans de l’eau pure, filtrer la dissolution, la faire évaporer, & ensuite la porter dans un lieu frais pour qu’elle se crystallise. On pourra,