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donne lieu à cette conjecture, puisqu’il dit que ce dieu prit la figure d’un laboureur, celle d’un moissonneur, celle d’un vigneron, & enfin celle d’une vieille femme, pour désigner par-là les quatre saisons, le printems, l’été, l’automne & l’hiver.

Vertumne avoit un temple à Rome près du marché, ou de la place où s’assembloient les marchands, parce que Vertumne étoit regardé comme un des dieux tutélaires des marchands. Vertumnus, dit un ancien scholiaste, deus est præfes vertendarum rerum, hoc est, vendendarum, ac emendarum.

On célébroit au mois d’Octobre une fête en l’honneur de ce dieu, appellée vertumnalia. Il étoit représenté sous la figure d’un jeune homme, avec une couronne d’herbes de différentes especes, & un habit qui ne le couvroit qu’à demi, tenant de la main gauche des fruits, & de la droite une corne d’abondance.

Vertumne étoit, selon les commentateurs d’Ovide, un ancien roi d’Etrurie, qui par le soin qu’il avoit pris de la culture des fruits & des jardins, mérita après sa mort d’être mis au rang des dieux. (D. J.)

VERTUS, (Géog. mod.) ville de France, dans la Champagne, élection de Châlons, à six lieues au sud-ouest de Châlons, & à trente au nord-est de Paris, avec titre de comté-pairie, & justice royale. Cette ville est dans une plaine, au pié d’une montagne. Elle a dans son enceinte une collégiale & deux abbayes, l’une de bénédictins de la congrégation de S. Vanne, & l’autre de chanoines réguliers. Long. 21. 42. latit. 48. 53. (D. J.)

VERUCINI ou VERRUCINI, (Geog. anc.) peuples de la Gaule narbonnoise, selon Pline, l. III. c. iv. Le p. Hardouin croit qu’ils habitoient le quartier de la Provence où se trouve aujourd’hui Verignon. (D. J.)

VERVE, s. f. (Poésie.) c’est une vive représentation de l’objet dans l’esprit, & une émotion du cœur proportionnée à cet objet ; moment heureux pour le génie du poëte, où son ame enflammée, comme d’un feu divin, se représente avec vivacité ce qu’il veut peindre, & répand sur son tableau cet esprit de vie qui l’anime, & ces traits touchans qui nous séduisent & nous ravissent.

Cette situation de l’ame n’est pas facile à définir ; & les idées qu’en donnent la plûpart des auteurs, paroissent plutôt sortir d’une imagination échauffée que d’un esprit réfléchi. A les en croire, tantôt c’est une vision céleste, une influence divine, un esprit prophétique : tantôt c’est une ivresse, une extase, une joie mêlée de trouble & d’admiration, en présence de la divinité. Ont-ils dessein par ce langage emphatique de relever les arts & de dérober aux prophanes les mysteres des muses ? Pour nous, écartant ce faste allégorique qui nous offusque, considérons la verve telle qu’elle est réellement.

La divinité qui inspire les poëtes quand ils composent, est semblable à celle qui anime les héros : dans ceux-ci, c’est l’audace, l’intrépidité naturelle animée par la présence même du danger ; dans les autres c’est un grand fond de génie, une justesse d’esprit exquise, une imagination féconde, & sur-tout un cœur plein d’un feu noble, & qui s’allume aisément à la vue des objets. Ces ames privilégiées prennent fortement l’empreinte des choses qu’elles conçoivent, & ne manquent jamais de les reproduire avec un nouveau caractere d’agrément & de force qu’elles leur communiquent. Voilà la source de la verve ou de l’enthousiasme. Ses effets sont faciles à comprendre, si l’on se rappelle qu’un artiste observateur puise dans la nature tous les traits dont ses imitations peuvent être composées ; il les tire de la foule, les assemble, & s’en remplit. Bientôt son feu s’allume à la vue de l’objet ; il s’oublie ; son ame passe

dans les choses qu’il crée ; il est tour-à-tour Cinna, Auguste, Phedre, Hippolyte : & si c’est la Fontaine, il est le loup & l’agneau, le chêne & le roseau. C’est dans ces transports qu’Homere voit les chars & les coursiers des dieux : que Virgile entend les cris affreux de Phlégias dans les tenebres infernales : & qu’ils trouvent l’un & l’autre des choses qui ne sont nulle part, & qui cependant sont vraies.

Pœta cùm tabulas cepit sibi,
Quærit quod nusquam est gentium, reperit tamen.

Voilà la verve : voilà l’enthousiasme : voilà le dieu qui fait les vrais peintres, les musiciens & les poëtes. (D. J.)

VERUE, (Géog. mod.) ville d’Italie, dans le Piémont, au comté d’Asti, sur une colline, près du Pô, entre Casal & Turin, aux confins du Montferrat, Elle est bien fortifiée, & appartient au roi de Sardaigne. Long. 25. 40. latit. 45. 6. (D. J.)

VERVEILLE, s. f. (terme de Fauconnerie.) petite plaque qu’on attache aux piés des oiseaux de proie, & sur laquelle plaque sont empreintes les armes du seigneur, pour faire reconnoître l’oiseau. (D. J.)

VERVEINE, VERVENE, s. f. (Hist. nat. Bot.) verbena ; genre de plante à fleur monopetale, labiée dont la levre supérieure est droite & découpée ordinairement en deux parties, & l’inférieure en trois, de façon que cette fleur paroît au premier coup d’œil composée de cinq pieces. Le pistil sort du calice ; il est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur, & entouré de quatre embrions qui deviennent dans la suite autant de semences minces & oblongues ; elles remplissent presque toute la capsule qui a servi de calice à la fleur. Ajoutez aux caracteres de ce genre, que les fleurs naissent le plus souvent en gril sans être disposées en rond, & qu’elles sont réunies quelquefois en une sorte de tête. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

La verveine commune, verbena vulgaris, cæruleo flore, I. R. H. 200, est la principale des huit especes de Tournefort. Sa racine est oblongue, un peu moins grosse que le petit doigt, garnie de quelques fibres, blanche, d’un goût tirant sur l’amer. Elle pousse des tiges hautes d’un pié & demi, anguleuses ou quarrées, dures, un peu velues, quelquefois rougeâtres & rameuses. Ses feuilles sont oblongues, opposées deux-à-deux, découpées profondément, ridées, d’un verd plus foncé dessus que dessous, d’un goût amer & desagréable.

Ses fleurs naissent en épi long & grêle, petites, formées en gueule, ordinairement bleues, quelquefois blanchâtres ; chacune est un tuyau évasé par le haut & découpé en cinq parties presque égales, avec quatre petites étamines dans le milieu, à sommets recourbés. Quand cette fleur est tombée, le calice qui est fait en cornet, devient une capsule remplie de quatre semences jointes ensemble, grêles & oblongues. Cette plante croît aux lieux incultes, comme aussi le long des chemins, contre les haies & contre les murs ; elle fleurit en été, quelquefois même en automne. Voyez Verveine, (Littérature.) (D. J.)

Verveine, (Mat. méd.) il n’y a pas de plante que les anciens aient tant recommandée que celle-ci, en qualité de vulnéraire ; ils l’ont regardée comme capable de chasser les corps étrangers : ce qui lui a fait donner le nom de herba vulneraria. Il n’y a pas non plus de plante dont ils aient fait un plus grand usage dans les sacrifices : ce qui l’a fait appeller herba sacra, herbe sainte, è mensâ Jovis, table de Jupiter ; on en répandoit sur les autels, & on s’en servoit à les essuyer. Il n’y a pas de plante non plus sur laquelle les magiciens aient fait plus de contes ridicules. Si, par exemple, ont dit quelques-uns d’entr’eux, on