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cuisses, les épaules, voir s’il n’y a point de crotte seche, & l’ôter s’il s’en trouve ; à chaque chien on doit bien nettoyer la brosse avec l’étrille ; en les pansant on doit examiner s’ils n’ont point de dentée de la nuit ; s’ils en ont, il faut leur couper le poil ; de même s’il y avoit quelques dartres qui voulussent venir on leur coupe le poil pour les panser suivant le mal. Quand on a fini de panser les chiens & qu’il ne s’en trouve plus par l’appel qui en est fait par les valets de chiens, chacun serre ses ustensiles ; on met au gras, c’est-à-dire qu’il doit y avoir un petit chenil à côté du grand, qui ait communication par une porte l’un dans l’autre, & on met dans le petit les chiens qui sont trop gras (pour bien chasser) ; quand l’on y a mis ceux que l’on juge à propos, le premier valet de chiens examine s’il y en a une grande quantité, on y fait rester le dernier valet de chiens, après quoi on entre les auges dans lesquelles on casse le pain ; on les laisse manger environ une heure ; on examine ceux qui ne mangent pas, s’ils n’ont point l’air triste ou fatigué de la chasse, ou mal au ventre, suivant ce qu’on leur remarque on les sépare ou on leur donne du lait ou du bouillon, de la soupe ou de la viande, ce qui paroît à propos ; quand on voit qu’ils ne mangent plus & qu’il se trouve assez de pain pour que les chiens gras & gourmands n’en mangent trop, on leur ouvre la porte, après quoi on finit le reste des autres, on ôte les auges & l’on panse les boiteux & les malades : on les laisse tranquilles jusqu’à quatre à cinq heures du soir qu’on recommence la même cérémonie, à la reserve du pansement, du peigne, & de la brosse, qu’on ne doit faire que le matin : dans l’hiver on ne les doit sortir qu’à huit heures & le soir à trois.

Le premier valet de chiens est chargé du pansement des boiteux, malades, ou blessés ; il a quatre sols par jour de plus que ses camarades ; ces pansemens se font toujours sous les yeux & les ordres de celui qui a la direction de la meute & qui en rend compte au commandant ; il lui fait part aussi de tous les détails qui concernent le service de la meute & prend ses ordres pour les chasses, les départs, les chiens à mettre aux relais, ceux qu’il faut reformer, généralement tout ce qui est du détail de la meute, & des valets de chiens.

Quand la meute doit chasser, celui qui en a la direction doit avoir un petit état de tous les chiens boiteux de la derniere chasse, des malades, fatigués, maigres, enfin de tous ceux qu’il ne croit point en état d’aller à la chasse ; arranger en conséquence le tout, par ordre de meute & de relais ; ayant ôté tout ce qui ne doit point marcher, il voit d’un coup d’œil ce qui lui reste de chiens pour la chasse, suivant l’heure du départ de la meute ; si c’est le matin, on avance l’heure ordinaire pour les sortir à l’ébat qu’on fait moins long ce jour là qu’un autre ; après qu’ils sont rentrés on met au gras, & on leur casse le quart du pain qu’ils ont coutume de manger, comme il a déja été dit ; un moment après on laisse venir les gras, quand ils ont fini, ce qui est bientôt fait, on sépare tous ceux que l’on a marqués ne devoir point aller à la chasse, relais par relais ; quand cela est arrangé de cette façon, & la séparation faite, on les sort dans la cour, & on les fait rentrer la porte entre-baillée pour les compter un à un ; vous devez trouver le compte que vous avez arrangé sur votre billet ; il faut panser les boiteux qui restent, & après vous faites préparer les couples pour le nombre des chiens qui vont à la chasse ; celui qui est de garde demeure au chenil pour avoir soin de ceux qui restent, & les autres vont se préparer, & doivent se trouver au chenil pour coupler ; il faut, en couplant les chiens, les égaliser autant qu’il est possible, tant du poil que de la taille, & s’il y a des chiens querelleurs

& de mauvaise humeur, il faut les mettre avec une lice, sans que cela dérange les places que les chiens tiennent à chaque relais. On couple une demi-heure avant celle du départ : quand l’heure dite est arrivée, on fait partir les chiens accompagnés de celui qui en a la direction ; c’est le premier piqueur qui ne va plus au bois, & à qui on donne deux chevaux pour conduire l’équipage au rendez-vous, se promener pendant la chasse, & se rendre utile suivant son savoir ; il doit y avoir deux valets de chiens à pié à la tête des chiens, & l’on donne des chevaux aux autres pour contenir les chiens, afin qu’ils ne s’écartent pas de la meute. Un d’eux va devant, pour faire arrêter & ranger les voitures ; si l’on doit séparer des relais en chemin, le valet de chien à pié, du relais qu’on sépare, prend les chiens dudit relais ; son camarade à cheval étant au rendez-vous, & ayant été au bois, ne peut point les accompagner ; il les conduit à l’aide des palfreniers du dit relais à l’endroit qu’on lui a nommé, où son compagnon va le rejoindre après avoir fait son rapport au commandant. Les chiens étant arrivés au rendez-vous, dans une place éloignée des chevaux, à l’ombre dans l’été & au soleil dans l’hiver, le rapport étant fait, celui qui a la conduite de l’équipage prend les ordres du commandant pour la distribution des relais qui sont venus au rendez-vous, les envoie aux endroits nommés, & se tient prêt avec les chiens de meute, pour les conduire où l’on doit attaquer sitôt que le roi est arrivé, ou qu’il en reçoit l’ordre ; étant à l’enceinte on fait prendre la meute avec les contre hardes, c’est une double couple au milieu de celle qui tient les deux chiens couplés ensemble ; chaque homme en prend huit ou dix, plus ou moins suivant le nombre de chiens qu’il y a de meute, & les hommes qui sont pour cela ; on fait un détachement d’une harde de six vieux chiens, avec lesquels on va fouler l’enceinte pour faire partir le cerf ; l’usage des vieux chiens est très-bon pour cela, il se pratique à petite meute, & ils s’en trouvent bien. Sitôt que le cerf est lancé, & qu’il s’est fait voir, on mene les chiens de meute sur la voie, on les découple, & ils chassent : les valets de chiens à pié suivent la chasse, ramassent les chiens traineurs, les menent doucement pour les donner dans un besoin, ou à la fin d’un cerf.

Quand un cerf se fait prendre bien loin du séjour de l’équipage, qu’il est tard quand la chasse est finie, on doit coucher au plus prochain endroit commode ; le lendemain on part du matin pour rentrer au séjour : on envoie les valets de chiens à cheval, dans tous les endroits où la chasse a passé, pour ramener les chiens qui n’ont pas pu suivre, ou qui se sont écartés après du change. L’usage de la vénerie est que sa majesté defraye hommes, chiens, & chevaux : quand les retraites sont longues, & qu’il y a assez de jour pour rentrer au logis, on doit faire manger un pain ou deux aux chiens en route ; cela les met en état de faire le chemin plus à leur aise ; on fait rafraîchir de même l’équipage sur le compte du roi.

On donne à chaque valet de chiens qu’on oblige à coucher dehors, vingt sols, & on leur rend le déboursé qu’ils ont faits pour leurs chevaux.

Curée. De retour de la chasse on attend que les valets de chiens à cheval soient rentrés ; en attendant on dépouille le cerf, on leve les morceaux, le commandant prend ce qu’il juge à propos, celui qui a la direction du chenil dispose du reste : ensuite on tient les membres, la carcasse, le cimier, & la pance vuidée & lavée, enfermés ou éloignés de l’endroit où on fait manger la mouée versée dans des auges : on ouvre la porte du chenil : il faut avoir la précaution qu’il y ait un homme à chaque porte en l’ouvrant, & qu’il s’y tienne jusqu’à ce que les chiens soient tous passés, de crainte qu’ils ne s’y heurtent,