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verse passe de l’extrémité d’un des piliers de derriere à l’extrémité de l’autre pilier de derriere, que ces quatre piliers soient consolidés par une traverse qui s’assemble d’un bout avec la traverse des piliers d’en-haut, & de l’autre bout avec la traverse des piliers d’en-bas ; que les deux piliers d’en-haut ou les plus grands, soient de même hauteur ; que les deux piliers d’en-bas soient aussi entr’eux de la même hauteur, mais plus bas que les piliers d’en-haut ; que toutes ces parties soient assemblées les unes avec les autres, & leur assemblage formera la cantre.

La cantre en deux mots n’est donc autre chose qu’un chassis oblong, soutenu sur quatre piliers, dont les deux derniers sont plus hauts que les deux de devant, & partagé en deux parties égales par une traverse percée d’autant de trous qu’on veut à égale distance, dont chacun correspond à deux autres trous pratiqués aux grands côtés du chassis, capables de recevoir de petites broches de fer, & de les tenir paralleles aux petits côtés.

Il est nécessaire de donner plus d’élévation à la cantre d’un côté ou d’un bout que d’un autre. Cette différence d’hauteur empêche les branches des roquetins de se mêler ; & on peut à chaque instant appercevoir quand il y en a quelques-uns de cassés, ce qui ne pourroit pas paroître, si la hauteur étoit égale par-tout.

Nous supposerons ici les côtés de la cantre percés de 25 trous seulement.

La cantre se place entre les piliers de derriere du métier, & s’avance presque jusqu’à la traverse qui soutient les marches.

On a de petites broches toutes prêtes, avec des especes de petites bobines, qu’on appelle de roquetins.

Les broches sont fort minces, elles servent aux roquetins d’axes sur lesquels ils peuvent se mouvoir.

Il faut distinguer dans ces roquetins deux moulures principales ; l’une garnie de soie, & l’autre d’un fil, à l’extrémité duquel pend un petit morceau de plomb. La soie & le fil étant dévidés chacun sur leur moulure, en sens contraire, il est évident que si l’on prend un bout de la soie, & qu’on le tire, il ne pourra se dévider de dessus sa moulure, qu’en faisant monter le petit poids qui réagira contre la force qui tirera le bout de soie. Cette réaction tiendra toujours le fil de soie tendu, & ne l’empêchera pas de se dévider, la bobine entiere ou le roquetin pourront se mouvoir sur la petite broche de fer dans laquelle il est enfilé par un trou qui le traverse dans toute sa longueur.

On charge chacune des petites broches d’un nombre égal de roquetins, tous garnis de leur soie & de leur plomb ; ce nombre de roquetin est partagé sur chaque broche en deux parties égales par la traverse du chassis de la cantre, il faut observer en enfilant les roquetins dans les verges du chassis, de tourner le plomb de maniere que la soie se dévide en-dessus & non en-dessous.

La soie est de la même ou de différentes couleurs sur tous les roquetins, selon l’espece de velours qu’on se propose d’exécuter.

C’est le dessein qui fait varier le nombre des roquetins.

Nous supposerons ici que chaque verge portoit 8 roquetins.

La cantre étoit composée de 200 roquetins ; elle l’est ordinairement de huit cens & de mille. On voit maintenant l’usage de la traverse qui divise le chassis en deux parties égales, & qui met dans la supposition présente cent roquetins d’un côté, & cent de l’autre, ou quatre roquetins par broche d’un côté, & quatre de l’autre.

Des maillons, des mailles de corps & des aiguilles de plomb. Après qu’on a formé la cage du métier, garni la cantre de ses roquetins, & placé cette cantre entre les piliers de derriere du métier, de maniere que la chute de l’inclinaison du chassis soit tournée vers les marches.

On se pourvoit au-moins d’autant de petits anneaux de verre, tels que nous les allons décrire, qu’il y a des roquetins. Je dis au-moins ; car à parler exactement, on ne se regle point sur les roquetins de la cantre pour la quantité de maillons, aiguilles, &c. Au contraire, on ne forme la cantre que sur la quantité de cordages dont on veut monter le métier, parce qu’on fait des velours à 800 roquetins & à 1000, suivant la beauté qu’on veut donner à l’étoffe, les velours à 1000 étant plus beaux que ceux de 800. Dans ce cas, le métier est la premiere chose qu’on dispose, après quoi on se conforme à la quantité convenable des roquetins, ou à-proportion du cordage. Ces petits anneaux sont oblongs ; ils sont percés à leur extrémité de deux petits trous ronds ; & au milieu, ou entre ces deux petits trous ronds, d’un troisieme beaucoup plus grand, & à-peu-près quarré ; les bords de ces trois trous sont très-polis & très-arrondis. On appelle ces petits corps ou anneaux de verre, maillons.

Il faut avoir autant d’aiguilles de plomb qu’il y a de roquetins ou de maillons. Ces aiguilles de plomb sont percées à l’une de leur extrémité d’un petit trou, ont environ 3 lignes de longueur, & pesent à-peu-près chacune 2 onces.

On prend un fil fort, on en passe un bout dans un des trous ronds d’un maillon ; on ramene ce bout à l’autre bout, & on fait un nœud ordinaire avec tous les deux : on passe un autre fil dans l’autre trou rond du même maillon qu’on noue, comme on l’a prescrit pour le premier trou.

On garnit de la même maniere tous les maillons de deux fils doubles, passés chacun dans un de leurs trous ronds.

Puis on prend un maillon avec ces deux fils doubles ; on passe le nœud d’un de ces fils doubles dans le trou de l’aiguille, on prend le nœud de l’autre fil double, on le passe entre les deux brins de fil qui sont unis par le premier nœud, & l’aiguille de plomb se trouve attachée à l’extrémité nouée du premier des fils doubles.

On en fait autant à toutes les aiguilles, & l’on a quatre choses qui tiennent ensemble. Un premier fil double, dont les deux extrémités sont nouées ensemble, & qui forme une boucle dans laquelle l’un des trous ronds d’un maillon est enfilé ; le maillon ; un second fil double, dont les deux extrémités sont nouées ensemble, & qui forme une boucle dans laquelle l’autre trou rond du maillon est enfilé, & l’aiguille qui tient à l’extrémité nouée de ce second double fil.

Le premier fil double s’appelle maille de corps d’en-haut.

Le second fil double s’appelle maille de corps d’en-bas.

Il y a donc autant de mailles de corps d’en-haut que de maillons ; autant de maillons que de mailles de corps d’en-bas ; autant de mailles de corps d’en-bas que d’aiguilles, & autant d’aiguilles de mailles de corps d’en-bas, de maillons, de mailles de corps d’en-haut, que de roquetins.

Après ces premieres dispositions, on commence à monter le métier, ou à faire ce que les ouvriers appellent remettre.

Pour cet effet, on prend une tringle de bois, on la passe entre les fils des mailles de corps d’en haut, de maniere que tous les nœuds soient à côté les uns des autres ; on suppose cette tringle aux deux estases, en-