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bloient encore pour les jugemens qui avoient donné lieu à l’établissement de leurs comices & qui procédoient, ou des ajournemens que les tribus décernoient contre les particuliers, ou de la liberté que les particuliers avoient d’appeller au peuple de tous les magistrats ordinaires : le peuple jouissoit de ce droit dès le tems des rois, & il lui fut depuis sous les consuls confirmé par trois différentes fois, & toujours par la même famille, c’est-à-dire par les trois lois Valeria ; la premiere, de l’an 246 ; la seconde, de l’an 304 ; & la derniere, de l’an 422.

Il faut néanmoins remarquer qu’il n’y avoit que les centuries qui eussent droit de juger à mort, & que les tribus ne pouvoient condamner au plus qu’à l’exil ; mais cela n’empêchoit pas que leurs comices ne fussent redoutables au sénat ; premierement, parce qu’ils se tenoient sans son autorité ; secondement, parce que les patriciens n’y avoient point de part ; & troisiemement, parce qu’ils n’étoient point sujets aux auspices ; car c’étoit-là d’où ils tiroient tout leur pouvoir, & ce qui servoit en même tems à les distinguer des autres.

Ces comices, au reste, continuerent de se tenir toujours régulierement depuis leur institution, si on en excepte les deux années que le gouvernement fut entre les mains des décemvirs ; & quoique Sylla eût entrepris dans les derniers tems d’en diminuer l’autorité, en ôtant aux tribuns du peuple le pouvoir de publier des lois, pour les punir d’avoir favorisé le parti de Marius ; comme cette suspension de la puissance tribunicienne n’empêcha pas les tribus de s’assembler à l’ordinaire, & ne dura même que jusqu’au consulat de Pompée, les comices des tribus conserverent toute leur liberté jusqu’au tems des empereurs ; mais César ne fut pas plutôt dictateur qu’il s’empara d’une partie de leurs droits, afin de pouvoir disposer des charges, & d’être plus en état de changer la forme du gouvernement. L’histoire nous apprend à la vérité qu’Auguste les rétablit dans tous leurs droits dès qu’il fut parvenu à l’empire, mais il est certain qu’ils ne s’en servirent plus que pour prévenir ses ordres ou pour les exécuter, & qu’enfin Tibere les supprima entierement, & en attribua toute l’autorité au sénat, c’est-à-dire à lui-même.

Depuis ce tems, les tribus n’eurent plus de part au gouvernement, & le dessein qu’eut Caligula de rétablir leurs comices n’eut point d’exécution ; mais elles ne laisserent pas néanmoins de subsister jusqu’aux derniers tems de l’empire, & nous voyons même que leur territoire fut encore augmenté sous Trajan de quelques terres publiques par une suscription qu’elles firent élever en son honneur, & qu’on nous a conservée comme un monument de leur reconnoissance envers ce prince.

Telle est l’idée générale qu’on peut se former sur l’origine des tribus romaines, l’ordre de leurs établissemens, leur situation, leur étendue, leur forme politique, & leurs différens usages selon les tems ; M. Boindin, dont j’ai tiré ce détail, a épuisé la matiere par trois belles & grandes dissertations insérées dans le recueil de l’académie des Belles-Lettres. (Le chevalier de Jaucourt.)

TRIBULE, s. m. tribulus, (Hist. nat. Botan.) genre de plante à fleur en rose, composée de plusieurs pétales disposés en rond ; le pistil sort du calice, & devient dans la suite un fruit en forme de croix ou turbiné, & composé le plus souvent de plusieurs parties faites en forme de chausse-trape, & réunies en maniere de tête qui contiennent des semences ordinairement oblongues, & placées dans de petites loges comme dans une niche. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

Tournefort en établit quatre especes, & nomme la premiere tribulus terrestris, ciceris folio, fructu aculeato,

I. R. H. 265. Sa racine est simple, blanche, fibreuse. Elle pousse plusieurs petites tiges, couchées par terre, rondes, noueuses, velues, rougeâtres, divisées en plusieurs rameaux. Ses feuilles sont aîlées ou rangées par paires le long d’une côte, semblables à celles du pois chiche, velues. Ses fleurs sortent des aisselles des feuilles portées sur des pédicules assez longs, composées chacune de cinq pétales ou feuilles jaunes, disposées en rose, avec dix petites étamines dans le milieu. A ces fleurs succedent des fruits durs, armés d’épines longues & aiguës ; ce fruit est composé de quatre ou cinq cellules, dans lesquelles se trouvent renfermées des semences oblongues.

Cette plante croît abondamment dans les pays chauds, en Espagne, en Provence & en Languedoc aux environs de Montpellier ; elle sort de terre sur la fin de Mai, fleurit en Juillet, & graine en Août ; elle est fort incommode aux jardiniers, parce que ses fruits qui tombent dès qu’ils sont mûrs, leur blessent rudement les piés nuds par leurs piquans aiguillons ; cependant sa graine est d’usage : elle passe pour être astringente & bienfaisante dans la diarrhée. (D. J.)

Tribule aquatique, (Botan.) tribulus aquaticus, C. B. J. B. Parkinson, Tournef. &c. C’est la seule espece du genre de plante que Tournefort a caractérisé sous le nom de tribuloïdes, & Ray sous celui de potamogiton.

Cette plante aquatique pousse des tiges longues, grêles, succulentes, garnies par espace de beaucoup de fibres, qui lui servent de racines pour s’attacher ; ces tiges grossissent vers la superficie de l’eau ; elles jettent des feuilles larges presque semblables à celle du peuplier, mais plus courtes, & ayant en quelque maniere la forme rhomboïde, relevées de plusieurs nervures crenelées en leur circonférence, attachées à des queues longues & grosses. Ses fleurs sont petites, blanches, soutenues par un pédicule arrondi, solide, couvert d’un petit duvet ; il leur succede des fruits semblables à des petites châtaignes, mais armés chacun de quatre grosses pointes ou épines dures, de couleur grise, revêtu d’une membrane qui se sépare ; ensuite ce fruit devient noir, presque comme du jais, lisse, poli ; on appelle ce fruit vulgairement châtaigne-d’eau : sa substance est une sorte d’amande formée en cœur, dure, blanche, couverte d’une peau très-fine, & bonne à manger. On en peut faire de la farine qui ressemble à celle de feves, & en paîtrir du pain. Cette plante croît dans les ruisseaux, sur le bord des lacs & des rivieres en Italie & en Allemagne. (D. J.)

TRIBUN, (Hist. rom.) tribunus ; mot général qui signifioit chef, & le mot qu’on ajoutoit à celui-ci, désignoit la chose commise à la garde, aux soins, à l’inspection ou à l’administration de ce chef. Ainsi le tribun du peuple étoit le chef, le défenseur du peuple. Tribun militaire, étoit un magistrat qui commandoit les armées. Tribuns des légions étoient des officiers qui commandoient tour-à-tour pendant deux mois à toute la légion. Tribun des céleres étoit le commandant de ce corps de cavalerie.

Le nom de tribun se donnoit encore à d’autres sortes d’officiers. Les tribuns de la marine, par exemple, tribuni marinorum, étoient des intendans des côtes & de la navigation des rivieres. Les tribuns du trésor public, tribuni ærarii, étoient des trésoriers établis pour payer les milices ; comme sont aujourd’hui nos trésoriers des guerres. Les tribuns des fabriques, tribuni fabricarum, présidoient à la fabrique des armes. Les tribuns des notaires, tribuni notariorum, étoient les premiers secrétaires des empereurs. Les tribuns des plaisirs, tribuni voluptatum, dans le code Théodosien, l. XIII. de scenic. avoient soin des jeux, des spectacles & autres divertissemens semblables du