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gues, & avec tout Paris. Il cite des choses approchantes sur le témoignage de Busbeque, d’un M. Thoisnard d’Orléans, & d’une dame de la même ville ; mais de tels témoignages particuliers n’ont pas grande force ; & d’ailleurs M. Dodart lui-même convient qu’il n’étoit pas possible de soupçonner aucune préparation secrete dans les épreuves du sieur Richardson, comme dans le charlatan de Busbeque & son moine turc. Richardson faisoit également ses épreuves dans les occasions les plus imprévues, comme dans celles qu’il pouvoit prévoir, à la cour, à la ville, en public & en particulier, en présence des gens les plus éclairés comme devant tout un peuple.

M. Dodart dit aussi qu’il y a des plombiers qui vont quelquefois chercher au fond du plomb récemment fondu des pieces de monnoie que l’on y jette, & qu’on leur donne pour les engager à faire cette épreuve, qui a été souvent répétée dans les jardins de Versailles & de Chantilly ; mais vraissemblablement ces plombiers usoient auparavant de quelque ruse pour ne se pas brûler, ou-bien avoient les doigts fort calleux, ce qui n’étoit point, selon M. Dodart lui-même, le cas du sieur Richardson, en sorte que ce dernier exécutoit apparemment son épreuve du fer chaud par de certaines mesures qu’il prenoit pour le poser entre ses dents & sur sa main, foiblement & avec une grande prestesse.

Le charbon allumé m’étonne peu ; il n’est presque plus chaud dès le moment qu’il est éteint ; l’anglois pouvoit alors l’avaler ; le soufie ne rend pas le charbon plus ardent, il ne fait que le nourrir : sa flamme brûle foiblement ; le soufflet avec lequel cet anglois industrieux allumoit ce charbon, souffloit apparemment beaucoup plus sur sa langue que sur le charbon même. Le mélange de poix-résine, de poix noire & de soufre allumé n’est pas si chaud qu’une bouche calleuse & abreuvée de salive ne puisse bien le souffrir. Les résines ne se fondoient sans doute, & le soufre ne brûloit qu’à la surface, ce qui ne faisoit qu’une croûte, & néanmoins la tranche de viande se grilloit à merveille. Le bruit que faisoit le mélange allumé dans la bouche du mangeur de feu n’étoit pas l’effet d’une extrème chaleur, mais de l’incompatibilité du soufre allumé avec la salive, comme avec toutes les autres liqueurs aqueuses.

Outre que le mélange dont nous venons de parler n’est pas extrèmement chaud, il est gras, & par conséquent il ne peut toucher immédiatement, ou du moins il ne touche que légerement la langue qui est abreuvée de salive.

Mais pour conclure, puisque personne ne pouvoit faire les mêmes épreuves que cet anglois, il en faut toujours revenir à une conformation singuliere d’organes fortifiée par l’habitude, l’adresse & le tour de main. S’il étoit vrai qu’il y eût eu quelque secret dans les tours du sieur Richardson, comme il avoit intérêt de le laisser croire, il eût rendu quelqu’un capable de soutenir les mêmes épreuves. En ce cas son secret eût mérité une grande récompense, parce qu’on l’auroit appliqué à des usages plus importans & plus sérieux ; cependant il n’a donné ni vendu ce prétendu secret à personne, car depuis plus d’un siecle personne ne s’est présenté dans le public faisant les mêmes choses que faisoit à Londres & à Paris le sieur Richardson en 1677. (Le chevalier de Jaucourt.)

Tour de Londres, (Géog. mod.) forteresse d’Angleterre, ainsi nommée à cause d’une grande tour blanche & quarrée qui est au milieu. Cette forteresse a été bâtie en 1077 par Guillaume le conquérant, & son fils Guillaume II. l’environna d’un mur en 1098. Elle est située près de la Thamise, au-dessous du pont, & à l’orient de Londres. Aussi j’en ai déja parlé en décrivant cette ville.

Mais je dois ajouter ici, que c’est dans cette pri-

son d’état, qu’est né le premier jour de l’année 1656.

Fleetwood (Guillaume), savant théologien, mort évêque d’Ely en 1723. dans la soixante-septieme année de son âge.

C’étoit un homme d’un rare mérite, profond antiquaire, & en même tems habile prédicateur. Il étoit fort touché de voir que la différence d’opinions en matiere de religion, causoit tant de troubles ; persuadé que toute erreur qui n’influe point sur la pratique, devroit être parmi les hommes un objet de tolérance. L’histoire de sa vie est à la tête du recueil de ses sermons, imprimés en 1736. in-fol.

Son inscriptionum antiquarum sylloge, parut à Londres en 1691. in-8°. Ce recueil est en deux parties. La premiere contient des inscriptions payennes remarquables, tirées de Gruter, de Reinesius, de Spon, & d’autres auteurs, & rangées sous cinq classes : la premiere classe regarde les dieux ; la seconde les ouvrages publics ; la troisieme les empereurs ; la quatrieme les prêtres, les magistrats, les soldats, &c. & la derniere les particuliers, comme des peres & des meres, des enfans, des maris, des femmes, des freres ; des sœurs, &c.

On trouve dans la seconde partie, les anciens monumens chrétiens. Les remarques sont fort concises, formées des observations des autres, & de celles de l’auteur. Dans une nouvelle édition de cet ouvrage, il seroit nécessaire d’y ajouter des tables exactes, sur-tout des noms propres, car il n’y en a qu’une seule qu’on pourroit appeller un glossaire des antiquités, contenues dans les inscriptions. Il seroit encore bon qu’on mît au titre des inscriptions, la lettre G, ou R, ou S, ou A, ou B, ou P, ou F, ou W, pour indiquer qu’elles sont tirées de Gruter, ou de Reinesius, ou de Spon, Aringhus, Baronius, Papebroch, Ferretius, Wheler, &c. parce qu’on pourroit avoir recours aux sources, lorsqu’on soupçonneroit quelque faute d’impression, ou qu’on voudroit de plus amples éclaircissemens.

Son Essai sur les miracles fut imprimé à Londres en 1701, in-8°. Il y attaque les systèmes défectueux ou insoutenables de plusieurs théologiens modernes, lesquels attribuent au diable une puissance, qui détruit la plus forte preuve que les miracles fournissent en faveur du christianisme. C’est dommage que ce traité soit fait en forme de dialogues, qui ne conviennent guere aux matieres sérieuses.

En 1707 le docteur Fleetwood donna un petit livre d’un tout autre genre, mais dont on peut tirer de l’utilité ; c’est son chronicum pretiosum, ou histoire de la monnoie d’Angleterre, du prix du blé & d’autres denrées pour les six derniers siecles.

En 1712, il mit au jour, sans nom d’auteur, le jugement de l’église d’Angleterre, touchant le baptême des laïques & des non-conformistes. Il soutient dans cet ouvrage, que l’église anglicane n’a jamais décidé que le baptême des laïques est invalide. (Le chevalier de Jaucourt.

Tour de Roussillon, (Géog. mod.) tour de France dans le Roussillon, près de la Tet, à 2 milles de Perpignan. Ce sont les restes infortunés de l’ancienne ville de Ruscino, qui a donné le nom à tout le pays. Tite Live nous apprend que c’étoit une ville célebre du tems d’Annibal, où les petits rois des pays voisins s’assembloient pour délibérer sur leurs affaires. L’illustre & savant M. de Marca, croit que cette ville fut détruite vers l’an 828. lorsque Louis le Débonnaire châtia ceux auxquels la garde de la frontiere avoit été confiée, & qui l’avoient mal défendue contre les Sarrasins. (D. J.)

TOURAILLE, est le lieu où on fait sécher le grain pour faire la biére. Une touraille est faite comme une trémie, ou pour mieux dire, c’est le comble tronqué ou renversé d’un pavillon quarré ; elle ne