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Zone torride, est une partie de la terre ou du globe terrestre, laquelle est située sous la ligne, & s’étend de l’un & de l’autre côté vers les deux tropiques, ou jusqu’à environ 23 degrés & demi de latitude. Voyez Tropique, &c.

Ce mot vient du latin torreo, je rôtis, je brûle, parce que cette zone est comme brûlée par l’ardeur du soleil, qui est toujours au-dessus.

Les anciens croyoient que la zone torride étoit inhabitable, mais nous apprenons des voyageurs, que la chaleur excessive du jour y est tempérée par la fraîcheur de la nuit. Car les nuits sont plus longues dans la zone torride, que partout ailleurs, & sous la ligne où la chaleur doit être la plus grande, elles sont égales aux jours pendant toute l’année ; on voit même par la relation curieuse que MM. Bouquet & de la Condamine ont donnée de leur voyage sous l’équateur, qu’il y a au Pérou sous le milieu de la ligne des endroits qui jouissent d’un printems perpétuel, & d’une chaleur très-modérée. (O)

TORRISDAIL, le, (Géog. mod.) riviere d’Ecosse, dans la province de Strath-Navern. Elle tire sa source des hautes montagnes de cette province, coule à côté du Navern, fait d’abord un assez grand lac de dix à douze milles de longueur, où se trouve une île, qui est habitée pendant l’été. Ce lac est environné de forêts. En sortant de ce lac, le Torrisdail en forme un autre ; & au sortir de ce dernier, il va se jetter dans l’Océan, à trois milles de l’embouchure du Navern. (D. J.)

TORSE, adj. (Architect.) ce mot se dit des colonnes dont le fût est contourné en vis, ou à moitié creux, & à moitié rebondi, suivant une ligne qui rampe le long de la colonne en forme d’hélice. Le baldaquin du Val-de-grace est soutenu par de belles colonnes torses. On appelle colonne torse cannelée, celles dont les cannelures suivent le contour de son fût en ligne spirale dans toute sa longueur. Colonne torse rudentée, celle dont le fût est couvert de rudentes en maniere de cables menus & gros, qui tournent en vis. Colonne torse ornée, celle qui étant cannelée par le tiers d’en-bas, a sur le reste de son fût des branchages & autres ornemens. Colonne torse évidée, celle qui est faite de deux ou trois tiges grêles, tortillées ensemble, de maniere qu’elles laissent un vuide au milieu. Daviler. (D. J.)

Torse, (Sculpture.) ou tronc d’une figure, de l’italien torso, qui signifie tronqué. C’est un corps sans tête, sans bras, sans jambes, tel qu’est ce beau torse de marbre qui est au Vatican, & que quelques-uns croyent être le reste d’une figure d’Hercule, & un des plus savans ouvrages de l’antiquité.

TORSER, v. act. (Archit.) mot dérivé du latin torquere, tordre. C’est tourner le fût d’une colonne en spirale ou vis, pour la rendre torse. (D. J.)

TORSILIA ou TORSIL, (Géog. mod.) petite ville de Suede, dans la Sudermanie, sur le bord méridional du lac Maler, à quelques lieues de l’occident de Strégnes.

TORT, INJURE, (Synonymes.) le tort regarde particulierement les biens & la réputation ; il ravit ce qui est dû. L’injure regarde proprement les qualités personnelles ; elle impute des défauts. Le premier nuit, la seconde offense.

Le zèle imprudent d’un ami fait quelquefois plus de tort que la colere d’un ennemi. La plus grande injure qu’on puisse faire à un honnête homme, est de le calomnier. (D. J.)

Tort, (Droit moral.) on peut définir le tort, injuria, une action libre qui ôte son bien au possesseur.

S’il n’y avoit point de liberté, il n’y auroit pas de crime réel. S’il n’y avoit point de droit légitime, il n’y auroit point de torts faits. L’injustice suppose donc

un droit contre lequel on agit librement.

Or il y en général deux especes de droits ; l’un naturel, gravé dans le cœur de tous les hommes ; l’autre civil, qui astreint tous les citoyens d’une même ville, d’une même république, tous les sujets d’un même royaume, à faire ou à ne pas faire certaines choses, pour le repos & l’intérêt commun. On ne peut violer cette loi sans être mauvais citoyen. On ne peut violer la loi naturelle, sans offenser l’humanité.

Or l’injustice qu’on fait à quelqu’un, le blesse & l’irrite ordinairement jusqu’au fond de l’ame ; c’est pourquoi Métellus fut si piqué de voir qu’on lui donnoit Marius pour successeur en Numidie ; c’est ce qu’à l’égard de Junon Virgile peint par ces mots, manet altâ mente repostum, expression qui pour l’énergie, n’a point d’équivalent dans notre langue. C’est ainsi que Salluste dit du tort qu’on fait par de simples paroles : Quod verbum in pectus Jugurthæ altiùs quàm quisquam ratus erat, descendit ; & Séneque : natura comparatum est ut altiùs injuriæ quàm beneficia descendant, & illa cito defluant, has tenax memoria retineat. Voyez Injure. (D. J.)

TORTELLE, voyez Velar.

TORTICOLIS, s. m. maladie qui fait pancher la tête de côté : les anciens n’en ont point parlé ; les modernes l’ont appellé caput obstipum, dénomination employée par les meilleurs auteurs latins pour signifier la tête panchée. Il ne faut pas confondre le caput obstipum permanent, avec la tension & la roideur du col, à l’occasion d’une fluxion rhumatismale sur cette partie ; ni avec le panchement de tête qui est un effet de la mauvaise disposition des vertebres, tel que l’avoit le poëte Scaron, qui dit en parlant de lui-même :

Parmi les torticolis,
Je passe pour des plus jolis.

Cette façon de porter la tête de côté peut avoir été contractée par mauvaise habitude dès l’enfance, ou dans un âge plus avancé par affectation ; car il y a des gens qui seroient bien naturellement, & qui par air, se rendent ridicules. Cette tournure de tête est un geste de tartuffe, & Horace le conseille à ceux qui veulent tromper par flatterie, stes capite obstipo.

Suétone reproche à Tibere qu’il portoit la tête roide & de côté par orgueil ; les secours de la chirurgie ne sont point utiles à ceux dont le corps n’est vicié que par des causes morales. Les progrès de cet art n’ont pas fait imaginer aux chirurgiens françois d’opération pour redresser la tête inclinée par la convulsion des muscles.

Tulpius, savant médecin d’Amsterdam, au milieu du dernier siecle, rapporte l’histoire de la guérison d’un enfant de 12 ans, qui dès son plus bas âge portoit la tête panchée sur l’épaule gauche par la contraction du muscle scalene : on avoit essayé en vain des fomentations pour relâcher les parties dont la roideur & la corrugation causoient la maladie ; les colliers de fer n’avoient pu parvenir à redresser la tête : il fut décidé dans un consultation faite par l’auteur avec deux autres médecins très-habiles, qu’on commettroit l’enfant aux soins d’Isaac Minnius, chirurgien très-renommé, qui avoit opéré avec succès dans plusieurs cas de la même espece. Il forma d’abord une grande escarre par l’application d’une pierre à cautere ; il coupa ensuite avec un bistouri le muscle qui tiroit la tête ; mais Tulpius qui fait un tableau assez embrouillé de cette opération, remarque qu’elle fut pratiquée avec beaucoup de lenteur & de peine, effet de la timidité & de la circonspection avec lesquelles on agissoit dans la crainte de blesser les arteres & les veines jugulaires.