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bre, dont le bois est d’une extrème dureté ; le P. Labat dit que cet arbre n’a guere qu’un pié de diametre ; son écorce est blanchâtre ; ses feuilles sont clair-semées, de médiocre grandeur, ovales, dentelées, & comme brûlées du soleil, ensorte que cet arbre paroît tout rougeâtre de loin. (D. J.)

TENDREMENT, adv. terme de Musique qui, à la tête d’un air, marque un mouvement lent & doux, des sons filés gracieusement & animés d’une expression tendre & touchante ; les Italiens se servent du mot amoroso pour indiquer à-peu-près la même chose. (S)

TENDROCOSSÉ, (Hist. nat. Botan.) plante de l’île de Madagascar ; on assure que sa décoction fait venir & augmente le lait aux femmes, & qu’elle est tonique & fortifiante.

TENDRON, s. m. (Gram.) partie tendre d’un animal, d’une plante. On dit des tendrons de veau, ce sont des parties cartilagineuses qui tiennent aux os. Des tendrons d’artichaux, de choux, de laituë ; ce sont les parties plus solides auxquelles les feuilles sont attachées.

TENEBRES, OBSCURITÉ, NUIT, (Synonyme.) les ténebres semblent signifier quelque chose de réel & d’opposé à la lumiere. L’obscurité est une pure privation de clarté. La nuit est la cessation du jour, c’est-à-dire le tems où le soleil n’éclaire plus.

On dit des ténebres qu’elles sont épaisses ; de l’obscurité qu’elle est grande ; de la nuit qu’elle est sombre.

On marche dans les ténebres, à l’obscurité & pendant la nuit. L’abbé Girard. (D. J.)

Ténebres, (Critiq. sacrée.) obscurité ; les ténebres dans le sens figuré, se prennent 1°. pour malheur. disgrace ; fuit illa dies tenebrarum. Esther, xj. 8. ce fut là un jour de calamité : 2°. pour la mort ; connoîtra-t-on les merveilles de Dieu dans les ténebres. Ps. lxxxvij. 13. c’est-à-dire dans le tombeau : 3°, pour l’ignorance de la vérité ; les hommes, dit S. Jean. iij. 19. ont mieux aimé les ténebres que la lumiere : 4°. pour le péché ; rejettons les œuvres de ténebres. Rom. xiij. 12.

Les œuvres de ténebres dont parle ici S. Paul, τὰ ἔργα τοῦ σκότου, sont les péchés qui tirent leur source de l’idolatrie. C’est dans le même sens que l’apôtre dit, II. Corinth. vj. 14. Quel rapport y a-t-il entre la lumiere & les ténebres ? c’est-à-dire du chrétien & de l’idolatrie. Et ailleurs, Ephes. v. 8. vous étiez autrefois ténebres, c. à. d. vous étiez autrefois idolâtres. De même, être appellé des ténebres, I. Pierre, ij. vers. 9. c’est sortir de l’idolatrie où l’on étoit plongé. « Ceux qui se jettent dans l’idolatrie, dit Philon, préferent les ténebres à une lumiere éclatante ». Tous ces passages prouvent que les ténebres dans le nouveau Testament, désignent spécialement l’idolatrie.

Les chaines des ténebres, Sapience, xvij. 2. les chaînes d’obscurité, I. Pierre, ij. 4. signifient la même chose, le péché, l’idolatrie ; c’est une métaphore prise de l’idée que les Juifs avoient du sort des méchans ; ils les croyoient gardés dans des cachots obscurs, & garrottés de chaînes. (D. J.)

Ténebres de la passion, (Critiq. sacrée.) c’est ainsi qu’on nomme l’obscurcissement, ou les ténebres qui arriverent à la mort de J. C. & qui arriverent, disent les évangélistes, depuis la sixieme heure (midi), jusqu’à la neuvieme : A sextâ autem horâ, tenebræ factæ sunt super universam terram, usque ad horam nonam.

On demande avec beaucoup d’empressement, si les ténebres dont il s’agit, s’étendirent réellement sur la plus grande partie de notre hémisphere, ou si elles ne couvrirent qu’une partie de la Judée, qui est quelquefois désignée dans l’Ecriture sous le nom de toute la terre.

Sans prétendre décider cette question, je remarquerai 1°. que pour chercher des traces de ces ténebres hors de la Judée, il faudroit être bien sûr qu’elles se sont étendues par-tout, & c’est ce qui est fort incertain, pour ne rien dire de plus fort ; la plupart des interpretes ont suivi le sentiment d’Origene, qui a prétendu que par toute la terre, il ne faut entendre dans le récit des évangélistes que la Palestine ; c’est assez leur style, & il y a beaucoup d’apparence qu’ils n’ont parlé que de la Terre-Sainte, du-moins ne peut-on prouver le contraire ; par conséquent vouloir chercher des traces de cet événement dans d’autres auteurs, c’est chercher une chose de l’existence de laquelle on n’est pas certain.

Il faudroit qu’on fût bien d’accord sur l’année & le jour précis de la mort de J. C. sans quoi l’on se donne encore une peine inutile ; or tout le monde sait que les savans ne sont pas d’accord sur ce sujet ; la plupart mettent cet événement au vendredi 3 Avril de l’an 33 de l’ere chrétienne, & en adoptant cette époque, tout ce qu’on trouve dans l’histoire profane ne peut avoir le moindre rapport aux ténebres dont il s’agit. On cite ordinairement le témoignage de Phlegon, affranchi d’Adrien, rapporté par divers anciens, qui parle d’une éclipse de soleil mémorable arrivée en la deux cent deuxieme olympiade, la seconde année selon les uns, & la quatrieme selon les autres : or lequel de ces deux calculs qu’on adopte, il ne concourt point avec l’an 33, mais avec l’an 30 ou 32 ; on verra dans la suite que la même chose a lieu par rapport à l’éclipse mentionnée dans les annales de la Chine.

Pour pouvoir faire quelque fonds sur ce que les historiens profanes disent, il faudroit que les témoins fussent bien unanimes, au-lieu qu’ils different dans des circonstances essentielles. On ne parle point de ce qu’on cite de Denys l’aréopagite ; presque tous les critiques conviennent que les pieces publiées sous le nom de Denys sont supposées. Il ne s’agit donc que du témoignage de Phlegon & de celui des annales de la Chine. Parlons d’abord du premier en peu de mots, car nous y reviendrons ensuite.

Cet auteur avoit écrit une histoire des olympiades, dont plusieurs anciens nous ont conservé un passage sur le sujet dont il s’agit ; mais ils le citent d’une maniere si différente qu’on ne peut en rien conclure. 1. Georges Syncelle fait dire à Jules africain, que Phlegon rapporte, que sous l’empire de Tibere il se fit dans la pleine lune, une éclipse de soleil, depuis six heures jusqu’à neuf heures ; mais il n’est point parlé de la pleine lune dans Eusebe, & dans les autres auteurs qui citent le même passage ; & Origene nie expressément que Phlegon ait marqué cette circonstance. 2. Aucun de ces auteurs n’a dit que cette éclipse avoit duré jusqu’à neuf heures ; Eusebe & Cedrenus font dire à Phlegon, qu’à six heures le jour fut changé en nuit. 3. Les uns disent la seconde année, & les autres la quatrieme année de la deux cent deuxieme olympiade.

A l’égard de l’éclipse arrivée à la Chine, on ne convient pas sur l’année ; les uns la mettent l’an 31 & d’autres l’an 32 de J. C. Selon M. Kirch, elle n’a été que de neuf doigts & demi, ou neuf doigts quarante minutes ; & selon le P. Gaubil, elle a été centrale annulaire. Selon le premier, elle étoit finie à dix heures du matin ; & selon l’autre, elle a été centrale annulaire à dix heures & demie.

Je sai que les Jésuites ont prétendu que les annales de la Chine disent qu’au mois d’Avril de l’an 32 de J. C. il y eut une grande éclipse de soleil, qui n’étoit pas selon l’ordre de la nature, & qui par conséquent pourroit bien être celle qu’on vit au tems de la passion de J. C. lequel mourut au mois d’Avril selon quelques auteurs. C’est pourquoi les missionnai-