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comme on va le voir dans ces exemples.

Quand je ne devrois pas vivre long-tems, je veux cependant améliorer cette terre ; c’est-à-dire, quand je serois sûr que je ne dois pas vivre : or je dois vivre est évidemment le futur positif indéfini de l’indicatif, employé ici avec relation à une époque actuelle ; & il ne prend la place de je devrois vivre, qu’autant que je devrois vivre, est également rapporté à une époque actuelle ; c’est donc ici un futur actuel.

Nous lui avons souvent entendu dire qu’il vouloit aller à ce siége, quand même il y devroit périr ; c’est-à-dire, quand même il seroit sûr qu’il y devoit périr : or il devoit périr est le futur positif antérieur de l’indicatif, & puisqu’il tient ici la place de il devroit périr, c’est que il devroit périr, est employé dans le même sens, & que c’est ici un futur antérieur.

Tous les tems du suppositif sont donc indéfinis ; on vient de le prouver en détail de chacun en particulier : en voici une preuve générale. Les tems en eux-mêmes sont susceptibles partout des mêmes divisions que nous avons vues à l’indicatif, à-moins que l’idée accessoire qui constitue la nature d’un mode, ne soit opposée à quelques-uns des points de vue de ces divisions, comme on l’a vu pour les tems de l’impératif. Mais l’idée d’hypothese & de supposition, qui distingue de tous les autres le mode suppositif, s’accorde très-bien avec toutes les manieres d’envisager les tems ; rien n’y répugne. Cependant l’usage de notre langue n’a admis qu’une seule

forme pour chacune des especes qui sont soudivisées dans l’indicatif par les diverses manieres d’envisager l’époque : il est donc nécessaire que cette forme unique, dans chaque espece de suppositif, ne tienne à aucune époque déterminée, afin que dans l’occurrence elle puisse être rapportée à l’une ou à l’autre selon les besoins de l’élocution ; c’est-à-dire, que chacun des tems du suppositif doit être indéfini.

Cette propriété, dont j’ai cru indispensable d’établir la théorie, je n’ai pas cru devoir l’indiquer dans la nomenclature des tems du suppositif ; parce qu’elle est commune à tous les tems, & que les dénominations techniques ne doivent se charger que des épithetes nécessaires à la distinction des especes comprises sous un même genre.

§. IV. Des tems du subjonctif. Nous avons au subjonctif les mêmes classes générales de tems qu’à l’indicatif ; des présens, des prétérits & des futurs. Les prétérits y sont pareillement soudivisés en positifs, comparatifs & prochains ; & les futurs, en positifs & prochains. Toutes ces especes sont analogues, dans leur formation, aux especes correspondantes de l’indicatif & des autres modes : les présens y sont simples ; les prétérits positifs sont composés d’un tems simple de l’un des deux auxiliaires avoir ou être ; les comparatifs sont surcomposés des mêmes auxiliaires, & les prochains empruntent le verbe venir : les futurs positifs prennent l’auxiliaire devoir ; & les prochains, l’auxiliaire aller.

SYSTÈME DES TEMS DU SUBJONCTIF.
I. II. III.
PRÉSENS, indéfini. que je chante. j’arrive. je me révolte.
défini antérieur. je chantâsse. j’arrivâsse. je me révoltâsse.
PRÉTÉRITS, Positifs, indéfini. j’aye chanté. je sois arrivé
ou
vée.
je me sois révolté
ou
tée.
défini antérieur. j’eûsse je fûsse je me fûsse
Comparatifs, indéfini. j’aye eu chanté. j’aye été arrivé
ou
vée.
je me sois eu révolté ou tée.
défini antérieur. j’eûsse eu j’eûsse été je me fûsse eu
Prochains, indéfini. je vienne de chanter. je vienne d’arriver. je vienne de me révolter.
défini antérieur. je vînsse de je vînsse je vînsse de me
FUTURS, Positifs, indéfini. je doive chanter. je doive arriver. je doive me révolter.
défini antérieur. je dûsse je dûsse je dûsse me
Prochains, indéfini. j’aille chanter. j’aille arriver. j’aille me révolter.
défini antérieur. j’allâsse j’allâsse j’allâsse me

Il n’y a que deux tems dans chaque classe ; & je nomme le premier indéfini, & le second défini antérieur : c’est que le premier est destiné par l’usage à exprimer le rapport d’existence, qui lui convient, à l’égard d’une époque envisagée comme actuelle par comparaison, ou avec un présent actuel, ou avec un présent postérieur ; au lieu que le second n’exprime le

rapport qui lui convient, qu’à l’égard d’une époque envisagée comme actuelle, par comparaison avec un présent antérieur. En voici la preuve dans une suite systématique d’exemples comparés, dont le second, énoncé par le mode & dans le sens indicatif, sert perpétuellement de réponse au premier, qui est énoncé dans le sens subjonctif.