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chassa le roi de Macédoine, & délivra la ville d’Argos de ses usurpateurs. Philippe II. roi de Macédoine, le fit empoisonner, vers l’an 214 avant J. C. Il mourut à Egion, & son corps fut porté à Sicyone, où on lui éleva un monument qui subsistoit encore du tems de Pausanias. Aratus avoit écrit l’histoire des Achéens, qui s’est perdue, & dont Polybe fait un grand éloge.

Prascilla, qui se rendit illustre par ses poésies lyriques, étoit aussi de Sicyone. Elle vivoit en la 28e. olympiade, selon Eusebe. Suidas & Athénée la citent quelquefois. Phylarque naquit, selon quelques-uns, à Sicyone, & mit au jour plusieurs ouvrages historiques, entr’autres une histoire de l’expédition de Pyrrhus dans le Péloponnese. Plutarque parle de cet auteur grec. Athénée & les scholiastes de Pindare, citent l’histore de Sicyone donnée par Menechme, qui y étoit né, & qui florissoit du tems des premiers successeurs d’Alexandre. Si cette histoire nous fût parvenue, nous serions instruits de mille choses curieuses que nous ignorons sur le royaume de ce nom.

La ville de Sicyone a été souvent endommagée par des tremblemens de terre. Celle que l’on a rebâtie sur son territoire, se nomme présentement Vasilica, ou Basilica ; elle appartient au turc ; elle avoit encore quelque apparence, lorsque les Vénitiens étoient maîtres de la Morée ; mais ce n’est plus à présent qu’un monceau de ruines ; ce monceau est situé sur une montagne, à une lieue du golfe de Lépante, & la riviere Asopus passe au-dessous. Voyez Sicyonie. (D. J.)

Sicyone, (Lexicog. medic.) σικυώνη ; ce mot dans les médecins grecs désigne tantôt une figue sauvage, tantôt la coloquinte, & tantôt une ventouse conique, ouverte par son extrémité pointue. (D. J.)

SICYONIE, (Géog. anc.) Sicyonia, contrée du Péloponnèse, dans l’Achaïe propre, & séparée du territoire de Corinthe par le fleuve Némée. Tite-Live, l. XXIII. c. xv. remarque qu’on la nomma d’abord Micone, & ensuite Ægialée : cette contrée avoit deux villes dans les terres ; savoir, Phlius & Sicyone.

Les Sicyoniens, dit Pausanias, veulent qu’Egialé, originaire de leur pays, en fût le premier roi ; que sous son regne, cette partie du Péloponnèse, qui s’appelle encore aujourd’hui l’Egiale, prît sa dénomination ; que dans cette contrée, il bâtit en rase campagne la ville d’Egialée, avec une citadelle, qui occupoit tout le terrein où ils ont à présent un temple de Minerve.

Dans la suite des tems, Lamédon ayant fait épouser sa fille à Sicyon, né dans l’Attique, Sicyon acquit le royaume ; ce fut sous son regne que tout le pays changeant de nom fut appellé la Sicyonie, & que la ville qui s’appelloit autrefois Egialée, se nomme Sicyone.

Les Sicyoniens devinrent dans la suite Doriens, & commencerent à faire partie des états d’Argos. Ils sont à présent misérables, ajoute Pausanias, & fort différens de ce qu’ils étoient autrefois. D’en vouloir rechercher la cause, continue l’historien, c’est peut-être ce qu’il ne nous est pas permis : il vaut donc mieux se contenter de celle qu’Homere donne de la décadence de tant d’autres villes ; du puissant Jupiter la volonté suprême. Ils étoient déja réduits à cet état de foiblesse, lorsque par surcroit de malheur ils furent assiégés d’un tremblement de terre, qui fit de leur ville une solitude, & renversa beaucoup de monumens & d’édifices publics, qui étoient d’une grande beauté. Le même accident ruina plusieurs villes de la Carie & de la Lycie, & l’île de Rhodes en fut ébranlée.

Les Sicyoniens enterroient leurs illustres morts

d’une maniere assez convenable ; ils jettoient le corps dans une fosse, & le couvroient de terre ; ils construisoient un petit mur tout-à-l’entour ; puis ils élevoient quatre colonnes qui soutenoient un toit fait en forme d’aîle déployée & panchée ; ils ne mettoient aucune inscription sur la sépulture, mais en rendant les derniers devoirs au mort, ils l’appelloient seulement par son nom, sans y ajouter celui de son pere, & tout-de-suite ils lui donnoient le dernier adieu.

Les Sicyoniens, continue Pausanias, ont plusieurs statues, qu’ils renferment dans une espece de sacristie : mais chaque année durant une certaine nuit, ils les tirent de ce lieu pour les porter dans le temple ; ils allument des flambeaux afin d’éclairer la cérémonie, & chantent des hymnes composées en vieux langage. La statue qu’ils nomment le Bacchéus, tient le premier rang à cette procession ; c’est une statue qu’ils croyent avoir été consacrée par Andromadas, fils de Philias ; ensuite paroit le Lysius, autre statue que Phanès, disent-ils, transporta de Thèbes à Sicyone par ordre de la Pithie ; il est certain que Phanès vint à Sicyone en même tems qu’Aristomaque, fils de Cléodée : mais pour avoir négligé d’accomplir un certain oracle, il ne put rentrer dans le Péloponnèse, aussi-tôt qu’il se l’étoit proposé.

En descendant du temple de Bacchus dans la place, on trouve à main droite le temple de Diane, surnommé Limnea. Ce temple est si vieux, qu’il n’a plus de toît. La statue de la déesse y manque aussi, & l’on ne sait si elle a été transportée ailleurs, ou si elle a péri par quelqu’accident.

Dans la place, il y a un temple dédié à la Persuasion : & voici la raison que l’on en apporte. On dit qu’Apollon & Diane ayant tué Python, vinrent à Egialée pour se faire purifier ; mais qu’on leur y fit une si grande frayeur, qu’ils furent obligés de passer en Crete, & d’avoir recours à Cramanor. En effet, on voit à Sicyone un endroit qu’on appelle encore aujourd’hui la Peur. On ajoute qu’aussi-tôt la ville d’Egialée fut frappée de la peste, & que les devins consultés, répondirent que ce fléau ne cesseroit point, qu’Apollon & Diane n’eussent été appaisés : qu’en conséquence de cet oracle, on envoya sept jeunes garçons, & autant de jeunes filles, en habit de supplians, sur le bord du fleuve Sythas ; que le dieu & la déesse se laisserent fléchir à leurs prieres, & qu’ils voulurent bien revenir dans la citadelle de Sicyone. C’est la raison pourquoi l’on a consacré ce temple à la Persuasion dans le lieu même où Apollon & Diane s’étoient arrêtés en rentrant dans la ville ; & encore à présent, ajoute Pausanias, ils pratiquent la même cérémonie tous les ans ; car le jour de la fête du dieu, ils envoyent des jeunes enfans sur le bord du fleuve, & tirent du temple d’Apollon les statues des deux divinités, pour les porter dans le temple de la Persuasion ; & ensuite ils les portent où elles étoient.

Ce temple est dans la place, & l’on dit qu’anciennement Prætus l’avoit fait bâtir dans ce lieu, parce que ses filles y avoient été guéries de leur frénésie. L’on tient pour certain que Méléagre y suspendit la lance dont il avoit percé le sanglier de Calydon, & que la flute de Marsyas y fut aussi consacrée ; car on dit qu’après le malheur qui arriva à ce Silene, sa flute tomba dans le fleuve Marcias, que de-là elle passa dans le Méandre, & du Méandre dans l’Asope, qui la jetta sur le rivage, où un berger l’ayant ramassée, la consacra à Apollon ; mais toutes ces offrandes ont été brûlées avec l’ancien temple. Celui que j’ai vu, dit Pausanias, & la statue qui y est, sont modernes ; & c’est Pytoclès qui en a fait la consécration.

Au milieu de la place publique, continue Pausa-