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SATNIQUE, s. m. (Hist. d’Hongrie.) nom d’office & de dignité, autrefois d’usage en Croatie & en Hongrie. Un satnique étoit un gouverneur d’une petite contrée, qui pouvoit fournir cent hommes d’armes. Les knès ont succédé aux satniques. (D. J.)

SATRAPE, s. m. (Hist. anc.) terme qui signifioit autrefois chez les Perses, le gouverneur d’une province.

Le royaume de Perse étoit divisé, en satrapies ou jurisdictions de satrapes.

Ce mot est originairement persan ; il signifie à la lettre, amiral ou chef d’une armée navale : mais on l’a appliqué par la suite à tous les gouverneurs des provinces indifféremment. Ces satrapes avoient chacun dans leur département une autorité presque souveraine, & étoient à proprement parler des vicerois. On leur fournissoit un nombre de troupes suffisant pour la défense du pays. Ils en nommoient tous les officiers, donnoient le gouvernement des places, recevoient les tributs & les envoyoient au roi. Ils avoient pouvoir de faire de nouvelles levées, de traiter avec les états voisins, & même avec les généraux ennemis ; & quoiqu’ils servissent un même maître, ils étoient indépendans les uns des autres. Une autorité si peu limitée les portoit quelquefois à la révolte. Au reste, quand le roi les appelloit pour servir sous lui, ils commandoient les troupes qu’ils avoient amenées de leur gouvernement. Quelques auteurs comptent jusqu’à cent vingt-sept satrapes dans les provinces des anciens Perses. Cyrus les avoit obligés de rendre compte à trois grands satrapes qui étoient comme les secrétaires d’état. Si les Grecs emprunterent ce nom des Perses peur s’en servir dans le même sens, ce ne fut que depuis les conquêtes d’Alexandre.

On trouve aussi ce mot dans quelques anciennes chartres angloises du roi Ethelred, dans lesquelles les seigneurs ou lords, qui ont signé immédiatement après les ducs, prennent le titre de satrapes du roi. Ducange prétend que ce mot signifie en cet endroit, ministre du roi.

SATRAPIE, (Critiq. sacrée.) mot venu de la Perse, dont les provinces étoient gouvernées par des commandans qui portoient le nom de satrapes. Ptolomée, en parlant des régions de l’Europe, les nomme provinces ou satrapies. Pline se sert aussi du même mot, en parlant des Indes ; & ce mot qui ne signifie autre chose, qu’un pays gouverné par un seul officier, a quelque rapport à ce que nous appellons en France gouvernemens, & à ce que les Italiens nomment prefettura.

Le mot satrape signifie proprement un général d’une armée navale ; mais depuis il fut donné aux gouverneurs des provinces, & aux principaux ministres des rois de Perse. Nous les trouvons même dans les satrapies des Philistins, qui subsistoient dès le tems des juges. Il est vrai que les satrapes des Philistins sont appellés dans l’hébreu seranim, d’où vient le nom de surenes, qui étoit aussi un nom de dignité chez les Perses. Le général de l’armée des Parthes, qui tua Crassus, avoit la dignité de surena, & nos Historiens en ont fait un nom propre.

Ce terme satrape, selon son étymologie, signifie un grand qui voit la face du roi. On trouve dans Jérémie, c. lj. v. 27. & dans Nahum, le nom de Tapsar, que les interpretes traduisent par satrapes.

Les satrapes des Philistins, étoient comme des rois, qui gouvernoient avec un pouvoir absolu les cinq Satrapies, c’est-à-dire les cinq villes principales des Philistins. Les satrapes des Perses étoient des gouverneurs de provinces, envoyés de la part du roi ; saint Jérôme traduit quelquefois par satrapæ, l’hébreu pachat, qui signifie un chef de troupes, un gouverneur de province, d’où vient le mot bacha ou pacha, qui est

encore en usage chez les Turcs. Mais le nom de satrape est caché sous le terme achasdrapne, qu’on lit dans Daniel, dans Esdras & dans Esther, qui sont des livres écrits depuis la captivité. (D. J.)

SATRES, les, (Géog. anc.) Satræ, peuples de la Thrace. Hérodote, l. VII. n°. 111. nous apprend que ces peuples passoient pour n’avoir jamais été subjugués, & qu’ils étoient les seuls d’entre les Thraces qui avoient conservé leur liberté. La raison qu’il en donne, c’est que ces peuples habitoient sur de hautes montagnes, couvertes d’arbres & de neige ; outre qu’ils étoient de bons hommes de guerre. Ils avoient chez eux une idole de Bacchus, qui rendoit des oracles comme à Delphes. (D. J.)

SATRICUM, (Géog. anc.) ville d’Italie, dans le Latium, au voisinage de la ville Corioli. Les Latins, dit Tite-Live, liv. VI. ch. xxxiij. outrés de la perte d’une bataille, pousserent leur rage jusqu’à brûler la ville de Satricum, qui leur avoit pourtant servi de retraite dans leur déroute. Les Antiates rétablirent cette ville, & y fonderent une colonie. L’an 407 de la fondation de Rome, Satricum fut encore réduite en cendres par les Romains, qui y envoyerent quelques-uns de leurs citoyens. Ceux-ci ayant souffert que les Samnites missent garnison dans la ville, les Romains la prirent, & firent couper la tête aux auteurs de la révolte. Les habitans de Satricum sont appellés Satricani par Tite-Live, l. IX. c. xvj. (D. J.)

SATTEAU, s. m. terme de relation ; espece de barque ou grosse chaloupe, dont on se sert au bastion de France, sur la côte de Barbarie, pour la pêche du corail. (D. J.)

SATURA, s. f. (Gram. latine.) il nous paroît important d’expliquer ce mot en faveur des jeunes littérateurs ; c’est l’adjectif de satur, qui se prenoit tout-à-la-fois ou séparément ; de plenus, plein ; & de micellus, mélangé. Satur color, exprime une laine qui a parfaitement pris sa couleur. Satura lanx, un bassin rempli d’un mélange de toutes sortes de fruits. Les Romains offroient tous les ans à Cérès & à Bacchus un bassin de cette sorte, qui étoit garni des prémices de tout ce qu’ils venoient de cueillir. Satura, en sous-entendant esca, est un mets composé de plusieurs choses. Satura lex, une loi qui contenoit plusieurs titres sur différentes matieres ; ou qui sous une proposition générale, décidoit de plusieurs points particuliers, comme les lois Julia, Pompeia, Papia, qu’on nomma aussi micella.

Ciceron parle d’une loi satura, composée apparemment de plusieurs autres lois, suivant l’explication qu’en donne Sextus Pompée ; ou qui permettoit de proposer un sujet d’une maniere générale, & d’opiner sans l’ordre accoutumé. Le même Ciceron dit, que cette loi fut abrogée par les lois Cécilia & Dédia ; on avoit coutume d’ajouter cette clause à toutes les lois. Neve per saturam abrogato, aut derogato : que l’on ne puisse l’abroger, ni y déroger ; per saturam sententias exquirere (phrase dont Lélius s’étoit servi avant Saluste) signifioit mettre une affaire sur le tapis, & faire opiner à la hâte & confusément sur plusieurs chefs ; c’est ce que nous disons, en termes vulgaires, faire un pot pourri d’une affaire, & en décider sans compter régulierement les voix. Il ne s’agit pas ici des ouvrages d’esprit, tels que les historiettes & les poëmes, que l’on a aussi nommés saturas ou satyras ; c’est assez de remarquer qu’on disoit Sulla, Purrhus, Phruges. Optumus, Maxumus, &c. pour Sylla, Pyrrhus, Phryges, Optimus, Maximus, en changeant l’y ou l’i simple en u. (D. J.)

SATURAE PALUS, (Géog. anc.) marais d’Italie dans le Latium, au voisinage de la ville d’Antium, & de celle de Circœi, Virg. Æneid. l. VII. v. 801.

Quæ Saturæ jacet atra palus.