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défense de cette ville ou autrement ; & il déclare qu’en cas de besoin ou nécessité, par la puissance de ses ennemis ou autrement, il y pourvoira & fera garder ladite ville & les bourgeois de toute oppression, de telle maniere qu’aucuns inconvéniens ou dommages ne pourront s’en suivre, ou à aucun des bourgeois.

Ce changement fut occasionné par la faction du duc de Bourgogne ; en 1388, la prevôté des marchands fut séparée de la prevôté de Paris ; mais on ne voit pas que les quarteniers ayent été dès-lors rétablis ; ils ne le furent à ce qu’il paroît, qu’en 1411, suivant des lettres de Charles VI. du 20 Avril de ladite année, dans lesquelles le roi dit que pour la garde & sûreté de sa bonne ville de Paris, & pour aucunes nouvelles qui étoient survenues, il avoit par délibération du conseil, ordonné que l’on feroit guet & garde de jour aux portes de la ville de Paris, & de nuit dans les rues de ladite ville ; & qu’afin que cela fût plus diligemment exécuté & avec un meilleur ordre, il avoit établi pour cet effet des quarteniers & cinquanteniers, pour ordonner ledit guet.

Pendant les guerres civiles, sous le regne de Charles VI. la nuit du 28 au 29 Mai 1418, Perrinet le Clerc, fils d’un quartenier de la ville, prit sous le chevet du lit de son pere les clés de la porte de Bussy, & l’ouvrit aux troupes du duc de Bourgogne. Ces troupes auxquelles se joignit la plus vile populace, pillerent, tuerent, ou emprisonnerent tous ceux qui étoient opposés à la faction de ce prince, & qu’on appelloit Armagnacs. Le 12 Juin le carnage recommença avec encore plus d’horreur ; la populace courut aux prisons, & se les fit ouvrir. Les plus notables bourgeois, deux archevêques, six évêques, plusieurs présidens, conseillers & maîtres des requêtes, furent assommés ou précipités du haut des tours de la Conciergerie & du grand Châtelet ; on les recevoit en-bas sur la pointe des piques & des épées ; les corps du connétable Bernard d’Armagnac, & du chancelier Henry de Marle, après avoir été traînés dans les rues, furent jettés à la voirie. Les Bouchers érigerent ensuite à Perrinet le Clerc à la place saint Michel, une statue dont le tronc subsiste encore, & sert de borne à la maison qui fait le coin de la rue saint André-des-Arcs & de la rue de la vieille Bouclerie.

Malgré la tradition & le sentiment de la plûpart des historiens, M. de Mautour prétend que cette borne avec une tête d’homme, n’est que le pur effet du caprice d’un ouvrier, & qu’il n’y a jamais eu de statue de Perrinet le Clerc ; il en paroît si persuadé, qu’il a négligé d’appuyer son opinion sur des preuves & de bonnes raisons. Germain Brice, qui d’ailleurs rapporte très-mal ce trait historique, dit que l’on trouva il y a quelques années dans la cave d’une maison voisine les fragmens de cette statue. Il y a toute apparence qu’on la mutila dès que Charles VII. fut le maître de Paris, & que par dérision on la mit à servir de borne ; il est aisé de voir combien elle est différente des autres bornes par sa longueur & sa grosseur. Ess. histor. sur Paris, par Saint-Foix, tome I. page. 31.

Depuis le rétablissement des quarteniers, il arriva en 1642 un changement dans la division des quartiers de Paris ; celui de saint André qui étoit devenu très-considérable, fut divisé en deux, & l’on en détacha un nouveau quartier qui fut celui du fauxbourg saint Germain ; ce qui forma un dix-septieme quartier, du-moins à l’égard des commissaires au Châtelet ; mais la division des quartiers demeura toujours la même par rapport aux quarteniers.

Quant à la place de quarteniers, ce n’étoient jusqu’alors que des commissions à vie, auxquelles le bureau de la ville nommoit sous le bon plaisir du roi,

& suivant l’élection qui étoit faite du nouveau quartenier par les cinquanteniers & dizainiers de son quartier, & par deux notables bourgeois de chaque dizaine qui étoient élus entre ceux que chaque dizainier avoit mandé pour cet effet.

Ceux qui vouloient se démettre de cette place, ne pouvoient le faire qu’en personne & entre les mains du prevôt des marchands & échevins, de même que plusieurs autres officiers de police dépendans du bureau de la ville.

Louis XIII. ayant reconnu les inconvéniens qu’il y avoit pour ces officiers d’être obligés de se faire ainsi transporter en personne au bureau de la ville pour y faire leurs résignations entre les mains des prevôt des marchands & échevins, par un édit du mois de Février 1623, il les dispensa de faire ces résignations en personne dans l’hôtel-de-ville, & leur permit de les faire devant des notaires ou tabellions, ainsi qu’il se pratique pour les autres officiers, en payant par eux par chacun an une somme modérée aux prevôts des marchands & échevins pour cette dispense.

Mais l’exécution de cet édit fut différée ; & par un autre du mois d’Octobre 1633, le roi ordonna que conformément au précédent édit, tous ces officiers pourroient résigner leurs offices par-devant notaires ou tabellions, sans être tenus de faire, si bon ne leur sembloit, leurs résignations en personne à l’hôtel-de-ville, en payant par eux pour une fois seulement pour cette dispense, la finance qui seroit taxée au conseil, & encore à l’avenir par chacun an en l’hôtel-de-ville, ès-mains du receveur d’icelle, une reconnoissance annuelle, telle qu’elle seroit arbitrée, pour dédommager lesdits prevôt des marchands & échevins, procureur & greffier de la ville, de la faculté qu’ils avoient de pourvoir à ces offices, vacation arrivant d’iceux, que le tiers de cette redevance seroit employé par les prevôts des Marchands & échevins, au payement des rentes dûes par la ville, & autres nécessités d’icelle, & que les deux autres tiers leur appartiendroient comme droits & émolumens de leurs charges.

Les quarteniers ayant été nommés dans cet édit de 1633 cumulativement avec plusieurs autres officiers de police, que cet édit concernoit aussi, se firent admettre au payement de la finance qui avoit été reglée, & de la redevance annuelle. Ils prétendirent en conséquence que leurs places avoient été créées en titre d’office par cet édit du mois d’Octobre 1633, & qu’ils les possédoient en titre de propriété ; ces prétendus offices entrerent même dans le commerce.

Mais le roi ayant été informé de cette nouveauté, par arrêt de son conseil du 11 Juillet 1679, en interprétant l’édit de 1633, déclara que le procureur de la ville, le receveur & le greffier, les conseillers de ville, les quarteniers, & quelques autres qui sont dénommés dans cet arrêt, n’avoient point été créés & érigés en titre d’office par l’édit de 1633, que les quittances de finances, provisions & installations faites à l’hôtel-de-ville en vertu de cet édit, étoient nulles, ainsi que tous actes & ordonna ces donnés par les prevôt des marchands & échevins à quelques-uns de ces officiers, pour être reçus au droit annuel de l’hôtel-de-ville. Sa Majesté fit défenses aux prevôt des marchands & échevins d’admettre à l’avenir aucunes résignations faites en leur faveur par les conseillers & quarteniers, & autres officiers dénommés dans cet arrêt, ni de procéder à l’élection des offices de cette qualité, que huitaine après le décès des officiers, ordonnant qu’avant leur installation, les prevôt des marchands & échevins présenteroient à Sa Majesté les actes de l’élection, pour