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est pratique dans les bâtimens, quand il a l’expérience dans l’exécution des ouvrages.

Pratique, avoir pratique, obtenir pratique, (Marine.) c’est avoir la liberté d’entrer dans une ville après avoir fait la quarantaine.

Accorder pratique, être pratique d’un lieu ; on dit qu’un pilote est pratique d’un lieu, pour dire que plusieurs voyages qu’il y a faits lui en ont donné la connoissance.

Pratique ; ce terme signifioit traite, communication & commerce. Nous ne pûmes jamais avoir pratique avec les habitans de cette île, quoique nous eussions mis pavillon blanc en signe de paix, & que nous eussions fait toutes sortes de signaux pour leur marquer que nous voulions traiter avec eux de bonne foi ; à quoi ils ne répondirent qu’à coups de mousquet. On ne doit pas celer, si l’on a eu des pratiques en des lieux infectés de mal contagieux.

PRATIQUER, v. act. (Gramm.) voyez l’article Pratique ; on dit ce n’est pas assez que de prêcher aux autres la vertu, il faut la pratiquer soi-même. Je ne sais si l’on a fait en Médecine des découvertes bien importantes depuis Hippocrate, mais il est sûr que cet homme en posséda la véritable pratique ; il faut pratiquer un escalier dérobé dans cet endroit ; on perd l’estime qu’on faisoit des hommes en les pratiquant beaucoup. Il y a du danger à pratiquer avec les méchans ; il ne faut ni pratiquer les sujets d’un prince, ni les voix dans une élection. Les hommes bornés ne veulent que pratiquer. Les hommes pénétrans ne veulent que réfléchir ; de-là la lenteur du progrès des connoissances humaines, qui demanderoient que l’expérience & la pratique fussent accompagnées de la réflexion.

Pratiquer, (Archit.) c’est dans la distribution d’un plan, disposer les pieces avec économie & intelligence, pour les proportionner & les dégager avantageusement.

PRATITÆ, (Géog. anc.) peuples d’Asie : Pline, liv. VI. c. xv. dit qu’on les surnommoit Paredoni, qu’ils étoient voisins des Cordueni, qu’ils étoient maîtres des portes caspiennes, & qu’ils habitoient à l’occident des Parthes. (D. J.)

PRATO, (Géog. mod.) ville d’Italie, dans le Florentin, sur le Bisentio, entre Florence & Pistoye, dans une belle prairie, à 6 lieues au nord-ouest de Florence, & à-peu-près à la même distance de Pistoye. Son évêché a été réuni à celui de Pistoye. Long. 29. 12. lat. 43. 36.

PRATOLINO, (Géog. mod.) maison de plaisance du grand duc de Toscane, au voisinage de Florence, bâtie par le grand duc, François I du nom ; c’est un séjour délicieux pendant l’été, & on y reconnoît par-tout le goût du fondateur. Le pere Labat a donné la description de ce palais dans son voyage d’Italie. La campagne où est située cette maison de plaisance, est une des plus belles contrées d’Italie ; les anciens la nommoient Etrusci campi, elle s’étendoit, selon Tite-Live, liv. XXII. c. iij. depuis Frézulæ, jusqu’à Arretium, c’est-à-dire depuis Frizzole, jusqu’à Arezzo. (D. J.)

PRATS DE MOLO ou PRATS DE MOULIOU, (Géog. mod.) en latin du douzieme siecle Forcia de Pratis ; petite ville ou place forte de France dans le Roussillon, sur le Tec au milieu des montagnes ; elle appartenoit en 1232 à Nunio Sanche, comte de Roussillon. Elle est à 10 lieues au sud-est de Mont-Louis ; elle fut fortifiée, mais très-irrégulierement, par les ordres de Louis XIV. qui y fit bâtir le fort de la Garde, lequel contient trois corps de casernes, la maison du gouverneur, & quelques cantines. Long. 20. 10. lat. 12. 26.

PRAXÉEN, s. m. (Hist. eccl.) nom de secte, disciple ou sectateur de Praxéas. Cet hérésiarque étoit

d’Asie, & vivoit au second siecle : il fut d’abord disciple de Montan, qu’il abandonna ensuite. Il se fit ensuite chef de parti lui-même, & enseigna, qu’il n’y avoit point de pluralité de personnes en Dieu ; que le Pere qui avoit tout créé étoit celui-là même qui avoit souffert sur la croix. Cette doctrine fut dans la suite embrassée par les Monarchiques, les Sabelliens, & les Patropassiens. Voyez Sabellien & Patropassien, &c.

PRAXIDICE, s. f. (Mythol.) Πραξιδίκη, déesse, fille de Soter, qui est le dieu conservateur, & mere d’Homonoë & d’Arété, c’est-à-dire de la concorde & de la vertu. Son nom étoit un composé de deux mots, de πρᾶξις, qui veut dire action, & de δίκη, jugement ; parce que, dit-on, c’étoit elle qui avoit soin de marquer aux hommes les justes bornes dans lesquelles ils devoient se contenir, soit dans leurs actions, soit dans leurs discours.

Les anciens ne faisoient jamais de statue de cette déesse en entier, mais la représentoient seulement par une tête, pour montrer peut-être que c’est la tête & le bon sens qui déterminent les limites de chaque chose, aussi ne lui sacrifioit-on que les têtes des victimes.

Hésychius dit que Ménélas, au retour de la guerre de Troie, consacra un temple à cette divinité & à ses deux filles, la Concorde & la Vertu, sous le nom de Praxidice.

On remarque que cette déesse avoit tous ses temples découverts, pour désigner son origine qu’elle tiroit du ciel, comme de l’unique source de la sagesse ; on a aussi donné le nom de Praxidice à Minerve.

On ne sauroit douter que l’origine de Praxidice ne soit fort ancienne ; le poëte dont nous avons les ouvrages, sous le nom d’Orphée, que les chronologistes placent vers la cinquante-quatrieme olympiade, au tems de Pisistrate, nomme les fêtes de Praxidice parmi les différens sujets qui avoient exercé sa muse, avant son entreprise des Argonautiques, ὄργια Πραξιδίκης ; mais ce passage ne nous apprend que le nom de la déesse, & l’on n’y trouve rien qui établisse sa prétendue ressemblance avec Laverne. Nous ne tirons pas une plus grande lumiere d’un autre passage du même auteur, qui dans une hymne à Proserpine, fait de Πραξιδίκη un attribut de Proserpine même ; l’analyse de ce mot composé, & sa réduction aux principes desquels il est tiré, πρᾶξις & δίκη, jugement ou punition des actions, marque seulement la justesse de l’application que le poëte en fait à la reine des enfers.

Πραξιδίκη est personnifiée dans Pausanias, & conformément à l’analogie, l’historien en parle comme d’une divinité qui présidoit à la vengeance. Ménélas, dit-il, étant de retour chez lui après la prise de Troie, éleva une statue à Thétis & à Praxidice. Ménélas ne pouvoit se dispenser de rendre cet hommage à la divinité vengeresse, qui venoit de l’aider à tirer raison d’un affront ; mais si elle eût été soupçonnée de protéger le vol, comme on le voit par quelques gloses anciennes qui rendent mal-à-propos le nom de Praxidice par celui de Laverne, Ménélas auroit sans doute laissé à Pâris le soin de l’honorer : le ravisseur d’Hélene qu’elle avoit bien servi, pouvoit se charger seul de la reconnoissance qui lui étoit dûe ; & il n’étoit pas juste que le mari outragé fût encore condamné aux dépens.

Le même Pausanias rapporte ailleurs, que les Aliartiens connoissoient plusieurs déesses Praxidices, qui avoient un temple dans leur pays. Comme il ne nous avertit pas que dans cet autre endroit, il attache une nouvelle idée à la même dénomination ; nous pouvons toujours l’entendre des divinités de la vengeance, qu’il étoit en effet à propos de multiplier, pour partager entre plusieurs un emploi, au-