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également : dans les grandes fabriques, c’est par le moyen d’une machine ; & dans les petites, on lui donne cette forme à la main.

Nos Pl. représentent cette machine, dont voici l’explication.

La fig. 1. est une bobine de bois qui doit traverser l’axe A, sur lequel elle tournera.

La fig. 2. est la même bobine couverte d’une étoffe appellée futaine, cousue en forme de sac, dont les extrémités sont clouées sur les côtés de la bobine. B est l’ouverture du sac, par lequel on le remplit de poudre. Le diametre du sac doit être d’un bon tiers plus grand que celui de la bobine.

La fig. 3. représente la bobine remplie de poudre, dont la partie B qui la ferme est liée & repliée dessus. La poudre de forme irréguliere dont on la remplit pour y être arrondie, doit y être mise au moment qu’on vient d’achever de la grainer, & pendant qu’elle est encore humide.

La fig. 4. représente la même bobine enfilée sur son axe, & prête à tourner sur la table ronde qui la porte, lorsque l’arbre C de la machine sera mis en mouvement ; le mouvement lui est donné par une roue que l’eau fait tourner ; celle qui fait mouvoir les pilons sert en même tems à cet usage.

La table est garnie de rayons de distance en distance ; ces rayons sont des barres de bois demi-rondes qui y sont clouées.

Ce sont ces rayons qui, par la résistance qu’ils font au mouvement de la bobine, compriment la poudre qui y est renfermée, & impriment aux grains un mouvement de rotation & un frottement qui les arrondit.

L’arbre de la machine peut mouvoir trois bobines, contenant chacune cent livres de poudre : leur mouvement doit être tel qu’un homme puisse les suivre à son pas ordinaire ; une demi-heure suffit pour que la poudre qui y est renfermée soit parfaitement arrondie ; on la tamise ensuite pour en ôter le poussier, & pour séparer les différentes grosseurs de grains qui s’y sont formées.

Le procédé pour former à la main la poudre ronde est à-peu-près le même ; il differe seulement en ce qu’il ne faut pas que la poudre soit grainée, on la passe seulement par un tamis pour diviser & réduire en poussier la composition qui est en masse lorsqu’on la tire du mortier ; on en remplit un petit sac de forme ordinaire & de toile d’un tissu serré, on le lie le plus près que l’on peut de la matiere sans cependant la fouler ; & ensuite en appuyant les deux mains dessus, on le roule avec force sur une table bien solide en poussant toujours devant soi, évitant de le rouler dans un sens contraire ; comme le sac devient flasque & lâche à mesure que la matiere se comprime en la roulant, il faut en baisser de tems en tems la ligature, pour lui rendre la solidité qu’il doit avoir, pour que le roulement produise son effet ; le sac ne doit pas contenir plus de quinze livres de matiere, ni moins de trois livres, & il suffit de la rouler pendant une heure au plus pour qu’elle y soit formée en grains parfaitement ronds.

TABLE DES ESSAIS
Qui ont indiqué la meilleure proportion pour composer la poudre.
NUMEROS
des
Essais.
MATIERES
Dont on a composé les poudres d’essai.
DEGRÉS DE
force
à l’Eprouvette.
Salpetre. Charbon. Soufre.
  Essais pour connoître si l’on peut faire de la poudre sans soufre, & quelle est la quantité de charbon qui peut donner le plus de force au salpetre.  
  L. onc. gr. L. onc. gr. L. onc. gr.  
1 1 0 0 0 1 0 0 0 0 0 Fuse sans explosion.
2 1 0 0 0 2 0 0 0 0 3 Fait explosion.
3 1 0 0 0 3 0 0 0 0 5  
4 1 0 0 0 3 4 0 0 0 7
5 1 0 0 0 4 0 0 0 0 9
6 1 0 0 0 4 4 0 0 0 8
7 1 0 0 0 5 0 0 0 0 6
  Le numero 5. ayant donné le degré le plus fort, on a ajoûté du soufre à la dose de ce numéro, pour connoître si cette matiere peut en augmenter la force, & jusqu’à quelle quantité.  
8 1 0 0 0 4 0 0 0 4 11
9 1 0 0 0 4 0 0 1 0 15
10 1 0 0 0 4 0 0 1 4 14
11 1 0 0 0 4 0 0 2 0 12
  Le numero 9. ayant donné le degré le plus fort, on a essayé de retrancher du charbon sans diminuer le soufre, jugeant que la poudre en seroit plus forte, & il s’est trouvé qu’elle a augmenté de force jusqu’au numero 13.  
12 1 0 0 0 3 4 0 1 0 16
13 1 0 0 0 3 0 0 1 0 17
14 1 0 0 0 2 4 0 1 0 14
15 1 0 0 0 2 0 0 1 0 10
  Comparaison du numero 13. avec les proportions qui en approchent le plus, pour s’assûrer que la dose de ce numéro est la plus forte.  
16 1 0 0 0 3 0 0 1 4 15
17 1 0 0 0 3 0 0 0 4 13
18 1 0 0 0 2 0 0 2 0 13
19 1 0 0 0 2 4 0 1 4 14
  Autre comparaison du numéro 13. avec les poudres faites suivant les proportions les plus en usage en Europe & en Chine.  
  Poudre d’Europe.  
20 1 0 0 0 2 0 2 11
  Poudre de Chine.  
21 1 0 0 0 3 0 0 2 0 14

Epreuves faites au moulin à poudre d’Essonne le 12 Février 1756, sur les poudres des numeros 5. 13. & 20. de la table des essais. Ces poudres y avoient été fabriquées le 10 & 11 dudit mois ; & les épreuves en ont été faites avec l’éprouvette d’ordonnance qui est un mortier de sept pouces, lequel a trois onces de poudre, doit jetter à cinquante toises un globe de cuivre du poids de soixante livres pour que la poudre