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tache de la figure d’un cœur. Tournefort, Inst. reiherb. Voyez Plante.

Tournefort compte trois especes de ce genre de plante, dont la principale est le corindum à larges feuilles, & à gros fruit, corindum ampliore folio, fructu majore.

Cette espece pousse des tiges menues & branchues, hautes de trois ou quatre piés, sans poil, cannelées, foibles, ayant besoin d’être soutenues ; ses feuilles sont divisées à peu près comme celles de l’ache, d’une belle couleur verte, d’un goût visqueux ; il sort de leurs aisselles des pédicules chargés de fleurs, composées chacune de huit feuilles blanches, quatre grandes, & quatre petites disposées en croix, soutenues par un calice à quatre feuilles ; quand ces fleurs sont passées, il leur succede des fruits en vessies à trois coins, divisées chacune en trois loges qui renferment des semences semblables à des petits pois, en partie noirs, en partie blancs, & marqués ordinairement d’un cœur ; sa racine est grosse comme le doigt, mais plus courte, ligneuse, assez dure, fibreuse. Aucune des trois especes de ce genre de plante n’est d’usage en Médecine. (D. J.)

Pois arbre aux, (Hist. nat. Botan.) robinia Linnæi. Aspalatus, caragana siberica, pseudo-acacia. C’est un arbre de la même famille que celui que l’on trouvera décrit sous le nom de pseudo-acacia. On le nomme arbre aux pois, parce qu’il produit des siliques qui renferment un fruit semblable aux pois, qui sont précédées de fleurs d’un beau jaune ; il croît sans culture en Sibérie, surtout dans un terrein léger & dans le voisinage des rivieres. Le plus grand froid ne le fait point périr ; on peut le multiplier de graine & de boutures ; il est ordinairement de la grandeur d’un bouleau moyen. Les habitans de la Sibérie nommés Tunguses, nourrissent leurs bestiaux avec la feuille de cet arbre ; on mange aussi le fruit ou les pois qu’il renferme dans ses siliques ; mais il faut pour cela, les faire bouillir dans une premiere eau, pour leur enlever une certaine amertume que l’on y trouve. M. Bielcke de l’académie de Stockholm, a essayé de faire moudre ce fruit, & en a fait faire des galettes ou gâteaux qui étoient d’un très-bon goût. Il prétend que le fruit de cet arbre est plus léger sur l’estomac que les pois ordinaires.

Le même M. Bielcke a trouvé que les feuilles de cet arbre pouvoient à l’aide de la putréfaction, donner une couleur bleue aussi propre à la teinture que l’indigo & le pastel. Voyez les mémoires de l’académie de Suede, année 1750, & voyez l’article Pseudoacacia.(—)

Pois martiaux, (Hist. nat.) c’est le nom que quelques naturalistes donnent à une mine de fer en petits globules semblables à des pois que l’on appelle en latin pisa ferrea. Il paroit que c’est une mine de fer qui n’est composée que d’un assemblage de petites étites ou pierres d’aigle. Il y en a de différentes grandeurs. Pres de Bayeux en Normandie, on trouve des cornes d’ammon remplies de ces sortes de pois ferrugineux. Quand ces étites sont ovales ou alongées, on les nomme mine de fer en feves, minera ferri fabalis. Il se trouve de la mine de fer de cette espece en Allemagne, dans la principauté de Hesse-Hombourg.

POISON, s. m. (Littérat.) le mot venenum des latins ne signifie pas toujours du poison ; il désigne encore assez souvent ces drogues dont les Peintres & les Teinturiers se servent ; c’est dans ce sens, par exemple, que Virgile l’emploie au second livre des géorgiques,

Alba neque assyrio fucatur lana veneno.

« L’étoffe n’est pas teinte en couleur de pourpre. » Horace, ode 27, liv. I. dit :

Quis te solvere thessalis Magus venenis ? Quis poterit deus ?

« Quel enchanteur avec toutes les herbes de Thessalie, toute la force de ses charmes, que dis-je, quel dieu pourra vous tirer de ce mauvais pas ? » Les thessala venena d’Horace sont des sucs d’herbes magiques, propres à corriger la malignité du plus puissant poison.

Du tems d’Horace, on n’avoit point encore oublié l’histoire que Tite-Live, dec. l. l. VIII. raconte de plusieurs dames romaines qui composerent des poisons, & qui furent découvertes par une esclave. Sur les recherches que fit l’édile, on trouva 170 patriciennes coupables d’empoisonnement, & qui furent condamnées aux derniers supplices. Les morts qu’elles avoient causées étoient en si grand nombre, qu’on attribua d’abord ce malheur à l’intempérie pestilentielle de l’air, & l’on nomma exprès un dictateur qui alla attacher en cérémonie un clou au temple de Jupiter, ainsi qu’on le pratiquoit dans une calamité publique. (D. J.)

Poison, (Médec.) les choses prises intérieurement, ou appliquées de quelque maniere que ce soit, sur un corps vivant, capables d’éteindre les fonctions vitales, ou de mettre les parties solides & fluides hors d’état de continuer la vie, s’appellent poisons. Dans ce sens, on peut rapporter à cette classe grand nombre d’autres corps qui ne peuvent nuire qu’autant que l’usage immodéré qu’on en fait, empêche ou détruit les fonctions vitales.

Les corps âcres, méchaniques, qui en blessant ou en détruisant les parties solides, menacent de la mort, lorsqu’on les a avalés, ne peuvent être évacués d’abord que par le secours des onctueux, qui pris en grande quantité, enveloppent leurs parties nuisibles.

Tout ce qui est capable, en coagulant les humeurs, d’arrêter la circulation, doit être délayé à la faveur des aqueux saponacés, & dès qu’on connoît la nature de la coagulation, il faut employer les contrepoisons convenables pour la dissiper.

A l’égard des corps qui détruisent l’union qui se trouve dans les parties solides & les fluides, ils sont très-dangereux ; l’usage des acides & des doux astringens est capable d’arrêter le progrès de leur action.

Dans la peste & les autres maladies contagieuses, la nature présente des poisons d’une espece incompréhensible, qui paroissent seulement attaquer les actions vitales : on ne peut venir à bout de les détruire par l’application des principes de la médecine rationelle, mais uniquement par un contrepoison que l’expérience a découvert.

On connoît encore de semblables poisons qui changent tellement la nature de l’air, qu’il devient mortel à l’économie animale. Telle est la fumée des charbons, du soufre, celle d’une liqueur fermentante, ces vapeurs fortes & suffocantes que les auteurs ont nommées esprits sauvages ; il faut éviter toutes ces choses, ou y remédier à l’aide du feu, ou de quelqu’autre vapeur qui y soit contraire.

Poison, (Jurisp ud.) ou crime de poison est le crime de ceux qui font mourir quelqu’un par le moyen de certaines choses venimeuses, soit qu’on les mêle dans les alimens ou dans quelque breuvage, soit qu’on infinue le poison par la respiration ou par la transpiration, soit par une plaie ou morsure de quelque bête.

Cette maniere de procurer la mort est des plus barbares & des plus cruelles ; & la loi 1 & 3 au code ad legem corneliam de sicariis & venesiciis, disent que plus est hominem extinguere veneno quàm gladio. La raison est que l’on se défie ordinairement & que l’on peut se précautionner contre l’homicide qui se commet par le fer, au lieu que l’homicide qui se commet par le poison, se fait sourdement, & est souvent com-