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tre derriere le buste ; la seconde deux points ; la troisieme trois ; & la quatrieme quatre, & toujours autant derriere le buste, que dans l’exergue du revers. Cette remarque de M. le baron de la Bastie, n’est peut-être pas indigne de l’attention des curieux. Il ajoute que la médaille même de Gallus paroîtroit copiée ou à dessein, ou par méprise sur la médaille de Philippe, si elle n’étoit pas assez commune, & si sæcullum n’étoit pas toujours écrit par deux ll, pendant que le même mot est écrit avec une seule l sur les médailles de Philippe. (D. J.)

Points, s. m. pl. terme de faiseuse de points, ce sont plusieurs petits points qui sont faits à l’aiguille, rangés proprement les uns auprès des autres, & dont le différent arrangement fait autant de diverses figures. Il y a le point clair, le point ferme, le point riche, le point de deux, le point de losange, le point vitré, &c.

Point, en terme d’Orfevre en grosserie, c’est l’endroit où une piece dont on cherchoit le milieu sur le poinçon, est restée en équilibre. Voyez Poinçon.

Points, s. m. pl. terme de Sellier & de Bourrelier, petits trous que ces artisans font à des étrivieres, à des courroies, ou à des souspentes de carrosses, pour y passer l’ardillon. (D. J.)

Point, (Jeu.) ce mot a deux acceptions au jeu : par exemple au piquet, on dit combien avez-vous de point ? J’ai le point, & j’ai fait 30 points. Dans ce dernier cas, le nombre des points est celui de tout le coup joué ; & dans le premier, c’est la valeur d’un certain nombre de cartes d’une même couleur.

POINTAGE de la carte, (Marine.) c’est la désignation que fait le pilote sur la carte marine du lieu où il croit qu’est arrivé le navire. Cette désignation se fait par le moyen de deux compas communs, ou d’une rose de vent faite de corne transparente, & appliquée sur la carte sur laquelle le pilote établit & marque le point de longitude & de latitude, où ses estimes lui font présumer que le vaisseau doit être arrivé.

POINTAL, s. m. (Charpent.) c’est toute piece de bois qui mise en œuvre à-plomb, sert d’étaie aux poutres qui menacent ruine, ou à quelque autre usage. Ce mot vient de l’italien puntale, poinçon.

POINTE, s. f. (Gram.) se dit en général de l’extrémité aiguë de quelque corps que ce soit.

Selon cette définition, on dit la pointe d’une aiguille, d’une lance, d’une épée, d’un couteau, &c. mais on s’en sert quelquefois dans l’Astronomie pour exprimer les cornes du croissant de la lune, ou d’un autre astre. Il est vrai que le mot latin cuspis, ou le mot françois cornes, est beaucoup plus en usage pour cela que le mot françois pointe. Voyez Lune, Croissant, Cornes, Eclipse, &c. (O)

Pointe, (Géom.) les pointes d’un compas sont les extrémités aiguës de cet instrument, avec lesquelles on trace des lignes.

Pointes, (Conchyl.) en latin aculei, mucrones, spinæ, clous, épines ; tous termes synonymes, pour signifier les piquans qui se trouvent sur la superficie d’une coquille, comme par exemple, sur l’huitre épineuse. (D. J.)

Pointe du cœur, mucro cordis, (Anatomie.) est l’extrémité inférieure & pointue du cœur. Voyez Cœur.

Pointe, (Art de parler & d’écrire.) jeu d’esprit qui coule sur les mots.

Jadis de nos auteurs les pointes ignorées,
Furent de l’Italie en nos vers attirées.
La raison outragée ouvrant enfin les yeux,
La bannit pour jamais des discours sérieux,
Et dans tous ses écrits la déclarant infâme,
Par grace lui laissa l’entrée en l’épigramme ;
Pourvû que sa finesse éclatant à-propos.
Roulât sur la pensée, & non pas sur les mots.

Ce n’étoit pas seulement dans les ouvrages d’esprit qu’on imaginoit devoir donner place aux pointes, elles faisoient les plus riches ornemens de nos sermonaires. Un prédicateur de ces tems-là, parlant de S. Bonaventure, promit de montrer dans les deux parties de son discours, qu’il avoit été le docteur des séraphins, & le seraphin des docteurs. Le P. Caussin dans sa Cour sainte, dit que les hommes ont bâti la tour de Babel, & les femmes la tour de babil. « Tout est souple devant vous, dit le P. Coton à Henri IV. votre sceptre est un caducée qui conduit, induit & réduit les ames à ce qu’il veut ». Mais pour venir à des exemples plus modernes, ce que dit Mascaron dans l’Oraison funebre de Henriette d’Angleterre, ne doit-il pas passer pour une pointe des plus ridicules ? « Le grand, l’invincible, le magnanime Louis à qui l’antiquité eût donné mille cœurs, elle qui les multiplioit dans les héros selon le nombre de leurs grandes qualités, se trouve sans cœur à ce spectacle ».

Le moyen de découvrir si une pointe est bonne ou mauvaise, c’est de la tourner dans une autre langue ; lorsqu’elle soutient cette épreuve, on peut la regarder pour être de bon aloi ; mais c’est tout le contraire quand elle s’évanouit dans l’opération. On pourroit appliquer à la véritable pointe ingénieuse, l’éloge qu’Aristenite faisoit d’une belle femme, qu’il trouvoit toujours belle, soit qu’elle fût parée ou en deshabillé.

On ne substitue souvent les pointes à la force du discours, que parce qu’il est plus facile d’avoir de l’esprit. que d’être à la fois touchant & naturel. Quand on ne fut plus capable d’admirer le style noble & simple des écrivains du siecle d’Auguste, on goûta le style hérissé de pointes des écrits de Séneque. C’est ainsi que parmi nous, nous voyons la décadence des sciences sortir de ce nouvel esprit de pointes & de frivolités, qui causa celle dont on commençoit à se plaindre à Rome immédiatement après le siecle d’Auguste.

Je ne prétens pas cependant qu’il soit toujours défendu, dans quelques petits ouvrages, de donner place à des pensées qui suppléent par leur vivacité à ce qui leur manque du côté de la justesse. Il en est de ces traits comme des faux brillans qu’on a quelquefois ingénieusement mis en œuvre, & qu’on ose porter sans deshonneur avec de vrais diamans. (D. J.)

Pointe de l’épigramme, (Poésie.) c’est ainsi qu’on nomme la pensée de l’épigramme qui pique le lecteur & qui l’intéresse. Toute épigramme a deux parties, l’exposition du sujet, & la pensée ou la pointe qui en résulte.

Cy git ma femme ! Voilà l’exposition du sujet :
Ah, qu’elle est bien pour son repos & pour le mien !

Voilà la pointe. Cette pointe doit être présentée heureusement & en peu de mots : elle doit être intéressante, soit par le fond, soit par le tour : elle intéresse encore par la finesse de l’idée, comme dans l’épigramme de l’Anthologie renfermée en un seul vers :

Je chantois, Homere écrivoit.

Quelquefois la plaisanterie fait la pointe de l’épigramme, comme dans celle du chevalier de Cailly.

Dis-je quelque chose assez belle ?
L’antiquité toute en cervelle
Me dit : Je l’ai dit avant toi.
C’est une plaisante donzelle ;
Que ne venoit-elle après moi ?
J’aurois dit la chose avant elle.

Dans quelques occasions, c’est le jeu de mots.