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bien distingués des conseillers, lesquels y sont appellés résidens.

Cette même ordonnance, en parlant du premier des barons qui présidoient, l’appelle le souverain du parlement ou le président simplement, & comme par excellence.

Dans les registres du parlement, sous la date du 2 Decembre 1313, le premier des présidens est qualifié de maître de la grand’chambre des plaids.

L’ordonnance de 1320 l’appelle le souverain du parlement ; c’étoit le comte de Boulogne qui remplissoit alors cette place.

Il y eut depuis 1320 pendant long-tems défaut de premier président & même de présidens en général. Il est vrai que l’histoire des premiers présidens met dans ce nombre Hugues de Crusy ou Courcy, parce qu’il est qualifié magister parlamenti ; mais ce terme magister ne signifioit ordinairement que membre du parlement, à moins qu’il ne fût joint à quelque autre titre qui marquât une préséance, comme en 1342 où le titre de maître est joint à celui de président, maître président.

Au commencement c’étoit l’ancienneté qui donnoit la préséance entre les présidens, c’est pourquoi celui qui étoit l’ancien ne prenoit pas encore le titre de premier président ; mais depuis que la préséance entre les présidens fut donnée à celui que le roi jugea à propos d’en gratifier, celui qui eut la premiere place prit le titre de premier président.

Le premier qui ait porté ce titre est Simon de Bucy, lequel étoit président dès 1341. Il paroît qu’il y en avoit dès-lors trois, & qu’il étoit le premier ; car en 1343 il est fait mention d’un tiers-président appellé Galerand.

L’ordonnance du 5 Avril 1344 justifie que les présidens étoient perpétuels, au lieu que les conseillers changeoient tous les ans.

Par une autre ordonnance du 11 Mai suivant, il fut nommé trois présidens pour le parlement : Simon de Bucy est nommé le premier, mais sans lui donner aucun titre particulier.

Il est néanmoins certain qu’il portoit le titre de premier président, il est ainsi qualifie dans des lettres du 6 Avril 1350 qui sont au sixieme registre du dépôt, fol. 385. Le roi le pourvoit d’une place de conseiller en son conseil secret, sans qu’il quitte les offices & états qu’il avoit auparavant : videlicet statum primi præsidentis in nostro parlamento. Il étoit en même tems premier maître des requêtes de l’hôtel ; il mourut en 1370 ; on nomma à sa place Guillaume de Seris. Les provisions de celui-ci, qui sont au huitieme registre du dépôt, portent cette clause, quandiu prædictus Guillaume de Seris vixerit humanis ; clause qui confirme que l’office de président étoit dès-lors perpétuel.

En 1458, le premier président se trouve qualifié de grand président, mais ce titre lui étoit commun avec les autres présidens.

On s’est donc fixé au titre de premier président ; & dans toutes les listes des présidens, après le nom du premier, on met ces titres chevalier, premier.

Anciennement, quand le roi nommoit un premier président, & même des présidens en général, il les choisissoit ordinairement entre les barons : il falloit du-moins être chevalier, sur-tout pour pouvoir remplir la premiere place ; & depuis saint Louis il fallut encore long-tems avoir ce titre pour être premier président, tellement que sous Charles V. Arnaud de Corbie ayant été élu premier président, cela resta secret jusqu’à ce que lui & le chancelier d’Orgement eussent été faits chevaliers.

Cela ne fut pourtant pas toujours observé si scrupuleusement : plusieurs ne furent faits chevaliers que long-tems après avoir été nommés premiers prési-

dens ; tels que Simon de Bucy, lequel fut annobli

étant premier président ; Jean de Poupincourt fut fait chevalier, & reçut l’accolade du roi : ces magistrats étoient faits chevaliers en lois. Philippe de Morvilliers, quoique gentilhomme fut long-tems maître & président avant d’être fait chevalier ; & Robert Mauger ne fut jamais qualifié que maître, & sa femme ne fut point qualifiée madame.

Cependant quoiqu’on ne fasse plus depuis long-tems de ces chevaliers en lois, & que la cérémonie de l’accolade ne se pratique plus guere, il est toujours d’usage de supposer le premier président revêtu du grade éminent de chevalier ; c’est pourquoi l’histoire des premiers présidens les qualifie tous de chevaliers, même ceux qui ne l’étoient pas lors de leur nomination à la place de premier président, parce qu’ils sont tous censés l’être dès qu’ils sont revêtus d’une dignité qui exige ce titre : le roi lui-même le leur donne dans toutes les lettres qu’il leur adresse, ou le leur donne pareillement dans tous les procès-verbaux d’assemblée, & ils le prennent dans tous les actes qu’ils passent. Le premier président portoit même autrefois sur son manteau une marque de l’accolade ; & l’habit qu’il porte, ainsi que les autres présidens, est l’ancien habillement des barons & des chevaliers : c’est pourquoi le manteau est retroussé sur l’épaule gauche, parce que les chevaliers en usoient ainsi afin que le côté de l’épée fut libre ; car autrefois tous les barons & les sénateurs entroient au parlement l’épée au côté.

L’habillement du premier président est distingué de celui des autres présidens, en ce que son manteau est attache sur l’épaule par trois letices d’or, & que son mortier est couvert d’un double galon d’or.

Pendant un tems le premier président étoit élu par le parlement par la voie du scrutin ; c’est ainsi qu’Henri de Marle fut élu en 1413, Robert Mauger en 1417, & Elie de Tourestes en 1461.

Mathieu de Nanterre qui avoit été nommé premier président dans la même année, fut destitué en 1465 par Louis XI. lequel l’envoya remplacer Jean d’Auvet, premier président du parlement de Toulouse, qu’il mit à la place de Mathieu de Nanterre ; celui-ci fut depuis appellé à Paris, & ne fit aucune difficulté de prendre la place de second président, étant persuadé que la véritable dignité des places dépend de la vertu de ceux qui les remplissent.

L’office de premier président est perpétuel, mais il n’est ni vénal ni héréditaire : les premiers présidens avoient autrefois tous entrée au conseil du roi.

Plusieurs d’entr’eux ont été envoyés en ambassade & honorés de la dignité de chancelier des ordres du roi, de celle de garde des sceaux, & de celle de chancelier de France.

En 1691, le premier président obtint les entrées des premiers gentilshommes de la chambre.

Le prieuré de saint Martin-des-champs est obligé, suivant une fondation faite par Philippe de Morvilliers, premier président, mort en 1438, & inhumé dans l’église de ce prieuré, d’envoyer tous les ans, le lendemain de saint Martin avant la messe rouge, par deux de ses religieux deux bonnets quarrés, l’un de velours pour l’hiver, & l’autre pour l’été : l’un des deux religieux qui présentent ces bonnets, fait un compliment dont les termes sont prescrits par la fondation, & un autre compliment en langage du tems présent.

Président du parlement. En parlant de l’office de premier président, nous avons déja été obligés de toucher quelque chose des autres présidens, dont l’institution se trouve liée avec celle du premier président.

On a observé que, suivant une charte de Louis le Gros, donnée en faveur de l’abbaye de Tiron en 1120, il y avoit des présidens au parlement appellés magni præsidentiales, que l’authenticité de cette charte est