Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 12.djvu/767

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ne mouille qu’un pli de cable, c’est-à-dire, qu’il ne faut filer que très-peu de cable en mouillant l’ancre ; ce qui se fait quand on mouille en un lieu où l’on n’a envie de demeurer que fort peu de tems.

Plis, (Peinture.) voyez Draperie.

PLIAGE, s. m. (Manufacture.) maniere de plier les étoffes : le pliage des étoffes de lainage, se fait sur une espece de table ou métier, que l’on appelle plioir. Lorsque le pliage est achevé, on l’assure en mettant la piece entre deux plateaux, & la serrant raisonnablement dans une presse : on plie les étoffes après qu’elles ont été fondées, & devant que de les appointer. Savary.

Pliage des chaines des étoffes de soye. Pour plier les chaînes sur l’ensuple, il faut commencer à la mettre sur le tambour, qui est une roue de trois piés environ de diametre ; & ensuite après avoir passé les portées séparément dans chaque dent du rateau, on dévide la chaîne sur l’ensuple ; & au moyen de ce rateau, au-travers duquel passe la chaîne, on la devide de la largeur que l’on veut, & les portées se trouvent toujours les unes à côté des autres. On observe de décharger suffisamment le tambour, afin que la chaîne soit pliée ferme.

PLIANT, adj. (Gram.) qui est fléxible sur toute sa longueur : il se dit bien de l’osier & de tout autre corps qui fléchit facilement sans se briser, & qui se restitue mollement dans son premier état.

Pliant, (Maréchal.) la jointure pliante, se dit du paturon. Voyez Jointure. Les jarrêts plians, voyez Jarrêts.

PLICA POLONICA, (Médecine pratiq.) c’est une maladie, dont le principal symptome & celui de qui elle tire son nom est un entrelacement indissoluble des cheveux ; le mot plica est latin, il signifie entrelacement ; on ajoute communément, même en francois, l’épithete latine polonica, parce que cette maladie est très-familiere aux Polonois, & presque endémique dans leur pays ; ils l’appellent gozdziec, gwozdziec ou kolium.

La figure que prennent les cheveux en s’entrelaçant, & le plus ou moins d’étendue de cet entrelacement, ont donné lieu à une distinction assez futile du plica en mâle & femelle ; le plica mâle consiste dans des especes de cordons fort serrés, fermes, en forme de spirale, par les différens contours de cheveux, & qui pendent le long du dos. Dans le plica femelle tous les cheveux dressés, repliés & entrelacés, couvrent entierement la tête comme un chapeau ; ils présentent par-là un spectacle horrible & dégoutant. Quoique cette maladie puisse être regardée comme propre aux cheveux, on l’a quelquefois observé affecter le poil qui couvre les autres parties du corps. M. Jean Paterson Hain a inseré dans les mémoires des curieux de la nature, ann. 3. observ. 221. l’observation curieuse d’une femme qui avoit les poils du pubis d’une aune & demie de long & affectés d’un plica considérable ; elle étoit obligée de les rouler autour de sa cuisse pour empêcher qu’ils ne traînassent par terre. Sennert prétend que cette maladie n’est pas particuliere aux hommes, & qu’elle attaque aussi les animaux, & sur-tout les chevaux ; il raconte qu’un officier mena de Hongrie à Dresde, un cheval qui portoit un plica au col qui lui pendoit jusqu’aux piés.

Cette maladie singuliere s’annonce ordinairement dans les hommes par un abattement extraordinaire, par des douleurs vives dans tout le corps, dans les membres, les jointures, la tête ; les os paroissent brisés, le visage est pâle, défait, un bourdonnement incommode fatigue continuellement les oreilles ; il survient quelquefois des convulsions, les membres se contournent, le dos est recourbé, le malade devient bossu ; après ce premier tems, une partie des symptomes disparoît, & toute la force du mal sem-

ble se porter à la partie extérieure & chevelue de la tête, une sueur abondante découle de cette partie de petites écailles comme du son s’en détachent, les cheveux grossissent, s’alongent rapidement ; ils deviennent gras, onctueux, sales, fétides. Souvent alors ils sont infectés d’une quantité innombrable de poux. Voyez Mal pédiculaire. Ils se crêpent ensuite, se replient en divers sens ; de leurs pores suinte une humeur tenace & glutineuse ; ils se collent l’un à l’autre, se compliquent, s’entrelacent & forment par ce moyen différens paquets, cirri, presque solides & si fortement tissus, que tout l’art du monde seroit vainement employé à les démêler & les défaire. Quelques auteurs ont assuré que dans cet état les cheveux se gorgeoient de sang & en laissoient échapper, lorsqu’on les coupoit ou racloit, quelques gouttes, & même dans certains cas une quantité considérable. Il y a à ce sujet une observation curieuse & intéressante d’Helwigius que nous rapporterons plus bas ; d’autres ont prétendu que jamais les cheveux ne pouvoient admettre du sang, & que de quelque façon qu’on les coupât, il n’en sortoit jamais une goutte ; & cette fausse prétention n’est étayée que sur un simple défaut d’observations qui leur soient propres. Ils ont conclu que ce qu’ils ne voyoient pas ne sauroit exister ; il est peu nécessaire de prouver combien cette logique qui ne laisse pas d’être assez suivie est fausse dans ses principes, & pernicieuse dans ses conséquences. Pour nous, nous conclurons plus justement sur des autorités respectables & d’après des observations décisives que le fait est très certain, mais qu’il n’est sans doute pas constant. Dans le même tems que cet entrelacement se forme, & lorsque la maladie parvient à l’extrème degré de violence & d’intensité, les ongles & sur-tout ceux qui sont aux pouces des piés croissent très-promptement, deviennent longs, raboteux, épais & noirs, semblables en tout à ceux des boucs, ils tombent sur la fin de la maladie, & reviennent ensuite naturels quand elle a une heureuse issue & que les cheveux commencent à se débrouiller ; ce fait rapporté par Schultzius, lui a été attesté par la comtesse de Donhoff qui en parloit d’après sa propre expérience.

Cette maladie est, comme nous l’avons déja remarqué, très-commune & endémique en Pologne ; elle a commencé, suivant le rapport des historiens du pays, à infester ce royaume par la partie qui confine la Russie, d’où elle s’est répandue dans cet empire, dans la Prusse, dans l’Allemagne, la Hongrie, le Brisgaw, l’Alsace, la Suisse, la Flandre rhenale, où l’on voit quelques vestiges, mais rares de cette maladie. Ronderic à Fonseca dit en avoir vû un exemple à Padoue.

On croit communément que le plica n’a pas toujours existé. Roderic Fonseca, Hercule Saxonia & quelqu’autres auteurs assurent, fondés sur l’autorité de Stadler, qu’il n’avoit pas paru avant l’année 1564 ; quelques autres en font remonter l’origine plus haut, & en fixent l’époque à l’année 1287. Sennert prétend au contraire, que cette maladie a dû être de tout tems, & que les causes qui la produisent étant très-anciennes, elle doit l’être aussi ; que si l’on n’en voit aucune mention dans les anciens auteurs, leur silence doit être uniquement imputé à leur petit nombre, à leur inexactitude, & à la rareté du plica. Quelque spécieux que soient ces raisonnemens ; ce ne sont jamais que des raisonnemens opposés à des faits, & par-là même entierement détruits ; il ne s’agissoit que de vérifier le silence des écrivains sur cet article ; s’il est bien constaté, on ne peut douter qu’il ne soit occasionné par un défaut absolu d’observations ; car cette maladie est assez singuliere pour devoir frapper la curiosité d’un observateur quelconque, médecin ou non, & pour mériter d’être remar-