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bien battue, avec un boisseau de chaux nouvellement éteinte que l’on mêle bien ensemble, & l’on met une couche d’environ une ligne d’épaisseur de cette matiere sur la premiere couche, lorsqu’elle commence à secher.

Plafond de corniche, (Archit.) c’est le dessous du larmier d’une corniche : il est simple ou orné de sculpture. On l’appelle aussi sofite. Voyez Sofite.

Plafond de peinture, (Peinture.) plafond enrichi de peintures, qui doivent être racourcies avec la proportion requise pour être vûes de bas en haut ; telles sont celles des plafonds d’églises.

Les grandes machines sont dans l’art de la Peinture, ce que les grands poëmes sont dans l’art de la Poésie. C’est un ouvrage formé d’une infinité de parties toutes essentielles, dont la réunion & l’accord sont nécessaires à sa réussite. Faire agir des dieux, des heros, des rois, faire parler des sages, animer les passions, reproduire la nature, élever les ames, toucher les cœurs, éclairer les esprits, instruire les hommes ; voilà ce qu’entreprend le poëte.

Imiter ce qui n’a point de corps, l’air & la lumiere ; donner du mouvement à ce qui est inanimé, la toile & la couleur ; exprimer ce qu’à peine nous concevons, la perfection des êtres célestes, & les sentimens qu’excitent en eux les mysteres respectables de la religion ; telles sont les difficultés des grands poëmes en peinture.

Il en est d’autres moins faciles à surmonter dans les grandes machines, que nous nommons plafonds. Le spectateur veut avoir des figures parfaitement droites sur une surface dont le plan doit être une courbe irréguliere. Il veut être éclairé par une lumiere vive & brillante, dans un endroit qu’une voûte épaisse met à l’abri des rayons du soleil : il veut voir se porter sur des nuées, ou voler dans les airs, des êtres que leur pesanteur naturelle semble devoir faire tomber sur la terre. Il prétend que la disposition de cent figures soit telle, qu’elles ne s’embarrassent point à ses yeux, & que placées avec une attention extrème, elles semblent arrangées par un heureux hasard qui ne fasse aucun trait de contrainte. Il desire des ornemens feints, sur le relief desquels il soit en droit de se tromper, après avoir considéré & réfléchi.

On veut encore que le tout soit magnifique par l’abondance & la variété des figures ; on veut que cette grande variété de figures s’arrange si naturellement, qu’elles ne soient point pressées, & si librement, que rien ne sente la gêne. On veut que le spectateur saisisse aisément & avec transport, l’ordre, le plan & la conduite de l’ouvrage ; que cet ouvrage présente une unité de composition qui enchante ; que toutes parties tendent à un seul corps, toutes les causes à un seul effet, tous les ressorts à un seul mouvement.

Les figures doivent être drapées d’une maniere grande & large : sur-tout l’intelligence des racourcis y doit être portée à la perfection. Cette intelligence quoiqu’absolument indispensable dans les plafonds, est cependant très-rare, parce qu’elle a besoin d’un grand goût pour en tirer des figures d’un beau choix. Les masses de lumieres & d’ombres y doivent être supérieurement distribuées ; & en même tems l’œil doit se trouver tranquille par le repos & l’accord qui doivent regner, malgré la richesse des objets. Les groupes d’un plafond veulent être dégradés avec art, & les demi-teintes y soutenir une lumiere brillante. La perspective locale & aérienne veulent être parfaites, le coloris frais & fort, la maniere de dessiner & de peindre, très-grande.

Je ne déciderai point si M. Pierre, par exemple, a rempli tant de conditions ; je dirai seulement que sa coupole de la chapelle de la Vierge à S. Roch, offre aux regards du public, un travail prodigieux qui l’a

occupé plusieurs années. Le plafond qu’il a peint, a cinquante-six piés dans un diametre, & quarante-huit dans l’autre ; l’élevation de la coupole a dix-neuf piés ; ce qui forme un morceau considérable en architecture. J’ajoute que les occasions de traiter de si grands ouvrages, se trouvent rarement en France ; ce sont cependant des ouvrages publics, glorieux pour une nation ; & c’est en ce genre que l’Italie possede les plus belles choses.

Il me reste à dire que les Artistes entendent par plafond marouflé, un plafond peint sur une toile tendue sur un ou plusieurs chassis, & retenue (crainte que l’humidité ne la fasse bouffer) avec des clous dans les endroits les moins considérables de la peinture, & qu’on recouvre ensuite de couleurs. On maroufle de la même maniere, des plafonds ceintrés ; mais il faut que la toile soit humectée ou collée par derriere, afin qu’en se séchant, elle se bande & s’unisse. C’est de cette sorte qu’est marouflé le plafond de la grande galerie de Versailles. (Le chevalier de Jaucourt.)

Plafond, (Hydr.) on appelle ainsi le fond d’un bassin, d’un reservoir, qui, à proprement parler, est sa plate-forme, son aire. Voyez Aire.

Plafond des portes & croisées, (Menuiserie.) c’est le dessous des linteaux dans l’épaisseur du mur ou l’embrasement.

Plafond, dessus de, (Menuiserie.) c’est un morceau de lambris qui se met pour remplir l’épaisseur qu’il y a depuis le plafond de la chambre ou la corniche en plâtre, jusqu’au bord du plafond des embrasemens des croisées. Voyez les Pl. d’Architecture.

PLAFONNER, v. act. (Archit.) c’est revêtir le dessous d’un plancher ou d’un ceintre de charpente, avec des ais ou du mairrain.

Plafonner une figure (Peint.) c’est lui donner le racourci nécessaire pour qu’elle fasse un bon effet, étant peinte sur un plafond ; en sorte qu’elle paroisse comme placée en l’air, & dans une attitude qui n’ait rien de gêné. Le Correge est le premier peintre moderne qui a représenté des figures en l’air ; c’est en même tems celui qui a le mieux connu l’art des racourcis, & la magie des plafonds. (D. J.)

PLAGAL, adj. ton ou mode plagal, terme de Musique ; quand l’octave se trouve divisée harmoniquement, c’est-à-dire quand la quarte est au grave, & la quinte à l’aigu, on dit que le ton est plagal, pour le distinguer de l’authentique, où la quinte est au grave, & la quarte à l’aigu. C’est que dans le dernier cas, la modulation ne descend que jusqu’à la finale ou tonique, & dans le premier, elle descend plus bas jusqu’à la quarte de ce même son ; ainsi tous les tons sont réellement authentiques, & cette distinction n’est plus admise que dans le plein-chant. L’on y compte quatre tons plagaux ; savoir, le second, le quatrieme, le sixieme & le huitieme. Voyez Tons de l’Eglise.

Il faut remarquer qu’en parlant de la division de l’octave, nous l’exprimons toujours par le rapport des vibrations ; ce qui rend cette division harmonique pour les modes plagaux, & arithmétique pour les authentiques ; mais si l’on s’attache seulement aux longueurs des cordes qui sont toujours reciproques aux nombres des vibrations, alors on trouvera l’octave divisée harmoniquement pour le mode authentique, & arithmétiquement pour le plagal ; ce qu’il faut bien entendre pour concilier sur ce point les contrariétés apparentes des auteurs. (S)

PLAGE, s. f. (Lang. françoise.) ce mot est fort bon en termes de Marine ; il signifie un rivage de basse mer, sans port & sans rade pour se mettre à l’abri ; mais quand il veut dire une contrée, un climat, il n’est usité qu’en poësie.

Est-il dans l’univers de plages si lointaines,
Où ta valeur, grand roi, ne te puisse porter ?

Despréaux.