Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 12.djvu/501

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

2°. Phiale ou Phiala, est un lieu d’Egypte sur le Nil & dans la ville de Memphis. Tous les ans, dit Pline, liv. VIII. chap. xlvij. on y jettoit une coupe d’or & une coupe d’argent le jour de la naissance du dieu Apis.

3°. C’est encore un lieu d’Egypte dans la ville d’Alexandrie. On donnoit le nom de phiale au lieu où l’on serroit le blé qu’on amenoit d’Egypte sur des bateaux par le canal que l’on avoit creusé depuis Chérée jusqu’à Alexandrie ; mais comme le peuple étoit accoutumé à exciter dans cet endroit de fréquentes séditions, Justinien, pour arrêter le cours de ce désordre, fit enfermer ce lieu d’une forte muraille.

4°. Phiale est aussi le nom de la source du Nil.

5°. Phiale, ou Phialia, ou Phigalia, étoit une ville de l’Arcadie sur les bords du fleuve Neda, auquel les enfans de cette ville consacroient leurs cheveux. Le nom moderne de cette ville est, à ce qu’on croit, Davia. (D. J.)

PHIBIONITES, s. m. pl. (Hist. ecclés.) c’est une branche des gnostiques.

PHIDITIES, s. m. pl. (Antiq. gréq. & de Lacédem.) Phiditia, les phidities étoient des repas publics qui se donnoient en Grece. Ils furent institués par Lycurgue. Ce législateur voulant faire plus vivement la guerre à la mollesse & au luxe, & achever de déraciner l’amour des richesses, fit à Lacédemone l’établissement des repas publics. Il en écarta toute somptuosité & toute magnificence : il ordonna que tous les citoyens mangeroient ensemble des mêmes viandes qui étoient réglées par la loi ; & il leur défendit expressément de manger chez eux en particulier.

Les tables étoient de quinze personnes chacune, un peu plus ou un peu moins ; & chacun apportoit par mois un boisseau de farine, huit mesures de vin, cinq livres de fromage, deux livres & demie de figues, & quelque peu de leur monnoie pour acheter de la viande. Il est vrai que quand quelqu’un faisoit chez lui un sacrifice, ou qu’il avoit été à la chasse, il envoyoit une piece de sa victime ou de sa venaison, à la table dont il étoit ; car il n’y avoit que ces deux occasions où il fût permis de manger chez soi ; savoir, quand on étoit revenu de la chasse fort tard, & que l’on avoit achevé fort tard son sacrifice : autrement on étoit obligé de se trouver au repas public ; & cela s’observa fort long-tems avec une très-grande exactitude, jusques-là que le roi Agis, qui revenoit de l’armée, après avoir défait les Athéniens &, qui vouloit souper chez lui avec sa femme, ayant envoyé demander ses portions dans la salle, les polémarques les lui refuserent ; & le lendemain Agis ayant négligé par dépit d’offrir le sacrifice d’actions de graces, comme on avoit accoutumé après une heureuse guerre, ils le condamnerent à une amende qu’il fut obligé de payer.

Les enfans même se trouvoient à ces repas, & on les y menoit comme à une école de sagesse & de tempérance. Là, ils entendoient de graves discours sur le gouvernement ; ils voyoient des maîtres qui ne pardonnoient rien, & qui railloient avec beaucoup de liberté, & ils apprenoient eux-mêmes à railler sans aigreur & sans bassesse, & à souffrir d’être raillés ; car on trouvoit que c’étoit une qualité digne d’un lacédemonien, de supporter patiemment la raillerie. S’il y avoit quelqu’un qui ne pût la souffrir, il n’avoit qu’à prier qu’on s’en abstînt, & l’on cessoit sur l’heure.

A mesure que chacun entroit dans la salle, le plus vieux lui disoit en lui montrant la porte, rien de tout ce qui a été dit ici, ne sort par là.

Quand quelqu’un vouloit être reçu à une table, voici de quelle maniere on procédoit à son élection, pour voir s’il étoit agréé dans la compagnie : ceux qui devoient le recevoir parmi eux, prenoient chacun une petite boule de mie de pain. L’esclave qui

les servoit, passoit au milieu d’eux, portant un vaisseau sur sa tête : celui qui agréoit le prétendant, jettoit simplement sa boule dans ce vaisseau ; & celui qui le refusoit, l’applatissoit auparavant entre ses doigts. Cette boule ainsi applatie valoit la feve percée qui étoit la marque de condamnation ; & s’il s’en trouvoit une seule de cette sorte, le prétendant n’étoit point reçu ; car on ne vouloit pas qu’il y en eût un seul qui ne plat à tous les autres. Celui qu’on avoit réfusé étoit dit decaddé, parce que le vaisseau dans lequel on jettoit les boules, étoit appellé caddos.

Après qu’ils avoient mangé & bu très-sobrement, ils s’en retournoient chez eux sans lumiere : car il n’étoit pas permis de se faire éclairer, Licurgue ayant voulu que l’on s’accoutumât à marcher hardiment partout de nuit & dans les ténebres. Voilà quel étoit l’ordre de leur repas.

Par cet établissement des repas communs, & par cette frugale simplicité de la table, on peut dire que Lycurgue fit changer en quelque sorte, de nature aux richesses, en les mettant hors d’état d’être desirées, d’être volées, & d’enrichir leurs possesseurs ; car il n’y avoit plus aucun moyen d’user ni de jouir de son opulence, non pas même d’en faire parade, puisque le pauvre & le riche mangeoient ensemble en même lieu ; & il n’étoit pas permis devenir se présenter aux salles publiques, après la précaution d’avoir pris d’autre nourriture, parce que tous les convives observoient avec grand soin celui qui ne buvoit & ne mangeoit point, & lui réprochoient son intempérance ou sa trop grande délicatesse, qui lui faisoient mépriser ces repas publics.

Les riches furent extrèmement irrités de cette ordonnance, & ce fut à cette occasion que dans une émeute populaire, un jeune homme nommé Alcandre créva un œil à Lycurgue d’un coup de bâton. Le peuple irrité d’un tel outrage, remit le jeune homme entre les mains de Lycurgue qui sut bien s’en venger ; car d’emporté & de violent qu’étoit Alcandre, il le rendit très-sage & très-modéré.

Les repas publics étoient aussi fort en usage parmi les philosophes de la Grece. Chaque secte en avoit d’établis à certains jours avec des fonds & des revenus, pour en faire la dépense ; & c’étoit, comme le remarque Athenée « afin d’unir davantage ceux qui s’y trouvoient, afin de leur inspirer la douceur & la civilité si nécessaires au commerce de la vie. La liberté d’une table honnête produit ordinairement tous ces bons effets ». Et qu’on ne s’imagine point que ces repas fussent des écoles de libertinage, où l’on rafinât sur les mets & sur les boissons ennivrantes, & où l’on cherchât à étourdir la severe raison : tout s’y passoit avec agrément & décence. On n’y cherchoit que le plaisir d’un entretien libre & enjoué : on y trouvoit une compagnie choisie, & aussi sobre que spirituelle : on y chantoit l’hymne qu’Orphée adresse aux muses, pour faire voir qu’elles président à toutes les parties de plaisir dont la vertu ne rougit point. Timothée, général des athéniens, fut un jour traité à l’académie par Platon. Un de ses amis l’arrêta en sortant, & lui demanda s’il avoit fait bonne chere. Quand on dîne à l’academie. répondit-il en souriant, on ne craint point d’indigestion.

Rien ne ressembloit mieux à ces festins philosophiques, que les agapes, ou repas de charité des premiers chretiens qui faisoient même une partie du service divin dans les jours solemnels ; mais comme les meilleures choses degénerent insensiblement, le luxe y prit la place de la modestie, & la licence qui ose tout, en chassa la retenue. On fut enfin obligé de les supprimer.

Meursius a épuisé tout ce qui regarde les phidities, lisez-le. (D. J.)

PHILA, s. f. (Mythol.) un des noms de Vénus qui