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en treize provinces, dont six à l’orient, quatre au nord, & trois au midi.

Les six provinces à l’orient, sont celles de Send, Makeran, Sitzistan, Sablustan, Khorasan, Estarabade.

Les quatre au nord sont Masanderan ou Tabristan ; Schirvan, Adirbeitzan, Frak-Atzem, qui renferme Hispahan, capitale de toute la Perse.

Enfin les trois provinces au midi, sont Khusistan, Farsistan ou Fars, & Kirman. (Le chevalier de Jaucourt.)

Perses, empire des, (Hist. anc. & mod.) l’ancien empire des Perses étoit beaucoup plus étendu que ce que nous appellons aujourd’hui la Perse ; car leurs rois ont quelquefois soumis presque toute l’Asie à leur domination. Xerxès subjugua même toute l’Egypte, vint dans la Grece, & s’empara d’Athenes ; ce qui montre qu’ils ont porté leurs armes victorieuses jusques dans l’Afrique, & dans l’Europe.

Persépolis, Suze, & Ecbatane, étoient les trois villes ou les rois de Perse faisoient alternativement leur résidence ordinaire. En été ils habitoient Ecbatane, aujourd’hui Tabris ou Tauris, que la montagne couvre vers le sud-ouest contre les grandes chaleurs. L’hiver ils séjournoient à Suze dans le Suzistan, pays délicieux, où la montagne met les habitans à couvert du nord. Au printems & en automne, ils se rendoient à Persépolis, ou à Babylone. Cyrus, qui est regardé comme le fondateur de la monarchie des Perses, fit néanmoins de Persepolis, la capitale de son empire, au rapport de Strabon, livre XV.

Cette grande & belle monarchie, dura deux cens six ans sous douze rois, dont Cyrus fut le premier, & Darius le dernier. Cyrus régna neuf ans depuis la prise de Babylone, c’est-à dire, depuis l’an du monde 3466, jusqu’en 3475, avant J. C. 525. Darius dit Codomanus, fut vaincu par Alexandre le Grand en 3674, après six ans de regne ; & de la ruine de la monarchie des Perses, on vit naître la troisieme monarchie du monde, qui fut celle de Macédoine dans la personne d’Alexandre.

La Perse, après avoir obéi quelque tems aux Macédoniens, & ensuite aux Parthes, un simple soldat persan, qui prit le nom d’Artaxare, leur enleva ce royaume vers l’an 226 de J. C. & rétablit l’empire des Perses, dont l’étendue ne différoit guere alors de ce qu’il est aujourd’hui.

Nouschirwan, ou Khosroës le grand, qui monta sur le trône l’an 531 de l’ere chrétienne, est un des plus grands rois de l’Histoire. Il étendit son empire dans une partie de l’Arabie Pétrée, & de celle qu’on nommoit Heureuse. Il reprit d’abord ce que les princes voisins avoient enlevé aux rois ses prédécesseurs ; ensuite il soumit les Arabes, les Tartares, jusqu’aux frontieres de la Chine, les Indiens voisins du Gange, & les empereurs grecs, furent contrains de lui payer un tribut considérable.

Il gouverna ses peuples avec beaucoup de sagesse : zélé pour l’ancienne religion de la Perse, ne refusant jamais sa protection à ceux qui étoient opprimés, punissant le crime avec sévérité, & récompensant la vertu avec une libéralité vraiment royale ; toujours attentif à faire fleurir l’Agriculture & le Commerce, favorisant le progrès des Sciences & des Arts, & ne conférant les charges de judicature qu’à des personnes d’une probité reconnue, il se fit aimer de tous ses sujets, qui le regardoient comme leur pere. Il eut un fils nommé Hormizdas, à qui il fit épouser la fille de l’empereur des Tartares, & qui l’accompagna dans son expédition contre les Grecs.

Nouschirwan, alors âgé de plus de 80 ans, voulut encore commander ses armées en personne ; il conquit la province de Mélitène ; mais bien-tôt après, la perte d’une bataille où son armée fut taillée en pie-

ces, le mit dans la triste nécessité de fuir pour la premiere

fois devant l’ennemi, & de repasser l’Euphrate à la nage sur un éléphant. Cette disgrace précipita ses jours ; il profita des derniers momens de sa vie pour dicter son testament ; & ce testament le voici tel que M. l’abbé Fourmont l’a tiré d’un manuscrit turc.

« Moi, Nouschirwan, qui possede les royaumes de Perse, & des Indes, j’adresse mes dernieres paroles à Hormizdas mon fils aîné, afin qu’elles soient pour lui une lumiere dans les ténebres, un chemin droit dans les déserts, une étoile sur la mer de ce monde.

» Lorsqu’il aura fermé mes yeux, qui déja ne peuvent plus soutenir la lumiere du soleil, qu’il monte sur mon trône ; & que de-là il jette sur mes sujets une splendeur égale à celle de cet astre. Il doit se ressouvenir que ce n’est pas pour eux-mêmes que les rois sont revêtus du pouvoir souverain, & qu’ils ne sont à l’égard du reste des hommes, que comme le ciel est à l’égard de la terre. La terre produira-t-elle des fruits si le ciel ne l’arrose ?

» Mon fils, répandez vos bienfaits d’abord sur vos proches, ensuite sur les moindres de vos sujets. Si j’osois, je me proposerois à vous pour exemple ; mais vous en avez de plus grands. Voyez ce soleil, il part d’un bout du monde pour aller à l’autre ; il se cache & se remontre ensuite ; & s’il change de route tous les jours, ce n’est que pour faire du bien à tous. Ne vous montrez donc dans une province que pour lui faire sentir vos graces ; & lorsque vous la quitterez, que ce ne soit que pour faire éprouver à une autre les mêmes biens.

» Il est des gens qu’il faut punir, le soleil s’éclipse : il en est d’autres qu’il faut récompenser, & il se remontre plus beau qu’il n’étoit auparavant : il est toujours dans le ciel ; soutenez la majesté royale : il marche toujours, soyez sans cesse occupé du soin du gouvernement. Mon fils, présentez-vous souvent à la porte du ciel pour en implorer le secours dans vos besoins, mais purifiez votre ame auparavant. Les chiens entrent-ils dans le temple ? Si vous observez exactement cette regle, le ciel vous exaucera ; vos ennemis vous craindront ; vos amis ne vous abandonneront jamais ; vous ferez le bonheur de vos sujets ; ils feront votre félicité.

» Faites justice, réprimez les insolens, soulagez le pauvre, aimez vos enfans, protégez les Sciences, suivez le conseil des personnes expérimentées, éloignez de vous les jeunes gens, & que tout votre plaisir soit de faire du bien. Je vous laisse un grand royaume, vous le conserverez si vous suivez mes conseils ; vous le perdrez si vous en suivez d’autres ».

Nouschirwan mourut l’an 578, & Hormizdas, qui lui succéda, ne suivit point ses conseils. Après bien des concussions, il fut jugé indigne de sa place, & déposé juridiquement, par le consentement unanime de toute la nation assemblée. Son fils mis sur le trône à sa place, le fit poignarder dans sa prison : ce fils lui-même fut contraint de sortir de son royaume, qui devint la proie d’un sujet de Waranes, homme de grand mérite, mais qui fut enfin obligé de se réfugier chez les Tartares, qui l’empoisonnerent.

Sur la fin du regne de Nouschirwan, naquit Mahomet à la Mecque, dans l’Arabie Pétrée en 570. Bientôt profitant des guerres civiles des Persans, il étendit chez eux sa puissance & sa domination. Omar son successeur, poussa encore plus loin ses conquêtes : Jédasgird, que nous appellons Hormizdas IV. perdit contre ses lieutenans à quelques lieues de Madain (l’ancienne Ctésiphon des Grecs) la bataille & la vie. Les Persans passerent sous la domination