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ce qu’on appelle à Cayenne tapirer un perroquet. Voyez Perroquet tapiré.

On sait communément que les perroquets vivent très-longtems. Comme il y en avoit un à Florence qui avoit acquis une espece de célébrité, M. de Réaumur pria M. l’abbé Cevati de vouloir bien lui mander ce qui en étoit ; & voici ce qu’il en apprit : le plumage de cet oiseau étoit blanc, avec une seule houpe couleur de rose sur la tête ; il avoit le bec & les piés noirs, & parloit extrèmement bien ; il étoit de la grosseur & du poids d’un bon poulet de trois mois. A l’égard de son âge, il n’a pas été possible de le savoir au juste ; il avoit été apporté à Florence en 1633 par la grande duchesse Julie Victoire de la Rovere d’Urbin, lorsqu’elle y vint épouser le grand duc Ferdinand, & cette princesse dit alors que ce perroquet étoit l’ancien de sa maison ; il a vécu à Florence pendant près de cent ans. Quand on ne lui donneroit, sur ce que dit la grande duchesse, qu’environ 20 ans de plus, il auroit donc vécu près de cent vingt années. Ce n’est peut-être pas le plus long terme de la vie de ces animaux ; mais au moins est-il sûr par cet exemple qu’ils peuvent aller jusques-là.

Seroit-il possible de faire pondre & couver des perroquets dans nos climats ? M. de Réaumur raconte que dans ce siecle un chanoine d’Angers a eu chez lui une paire de perroquets qui pendant trois années consécutives ont pondu & couvé ; que des accidens ont empêché deux des couvées de réussir ; mais que trois petits perroquets sont nés de la troisieme couvée, & qu’un de ceux-ci vivoit encore en 1740. Cependant on ne cite que ce seul fait ; & le physicien qui le rapporte se flatoit que nous pouvions nous rendre propres en Europe la plûpart des especes de perroquets. (D. J.)

Quoi qu’il en soit, les voyageurs ont rendu cet oiseau si commun en Europe, qu’il paroît inutile d’en décrire la figure, que tout le monde connoît ; on en distingue de trois sortes, qui different beaucoup en grosseur, & dont les especes varient à l’infini : les aras par leur taille tiennent le premier rang dans ce genre de volatile ; on en voit dont le plumage est varié d’incarnat, de pourpre, de bleu clair & foncé, de verd & de jaune ; les plus communs sont d’un bleu céleste sur le dos, ayant quelques plumes plus foncées aux extrémités des aîles & de la queue, qui est fort longue ; ils ont le dessous de l’estomac d’un beau jonquille ; le bec fort & crochu, les pattes courtes, cagneuses & garnies de griffes. Cet oiseau très-commun en Amérique est pesant, mal-adroit, stupide, articulant mal ce qu’on lui fait dire ; son cri naturel est fort desagréable.

L’espece des perroquets varie considérablement ; les grandes Indes en produisent de différentes sortes, dont les principales sont celles que l’on appelle catacoua ; leur plumage est blanc, & quelquefois cendré ; ils ont sur la tête une espece de crête de couleur orangée, couchée sur le derriere du col ; cette crête se dresse & se déploie lorsque l’animal est en colere.

Les loris sont beaucoup plus petits, bien faits, assez hauts sur jambes, ayant la tête petite, le col proportionné, la taille légere, la queue longue & le plumage diversifié de couleur de feu, de pourpre, de bleu & de jaune.

Les perroquets noirs sont communs dans l’île Maurice ; ils ressemblent au bec près, à des corbeaux.

La côte d’Afrique produit aussi un grand nombre de perroquets ; les plus connus qui viennent communément de l’île du Prince, sont d’un beau gris, ayant la queue couleur de feu ; ces oiseaux siflent très-bien, & peuvent exécuter des airs à leur portée : élevés de jeunesse, ils s’apprivoisent facilement ; ils ont beaucoup de mémoire, prononcent à merveille ce qu’on leur apprend, & leur attachement est extrème à l’é-

gard de ceux qu’ils ont pris en amitié.

Il est presqu’impossible de décrire toutes les especes de perroquets que produit l’Amérique ; ceux que l’on appelle amazones venant des bords de la riviere de ce nom, sont forts de taille ; leur plumage est d’un beau verd mélé de quelques plumes rouges & jaunes sur le gros des aîles, dont les extrémités ont un peu de bleu ; ils ont encore une espece de bandeau de petites plumes jaunes au-dessus du bec sur le devant de la tête ; ces perroquets sont grands railleurs, contrefaisant le cri des animaux, & même le ton des personnes ; ils parlent très-bien.

On voit dans les Antilles, principalement dans celles qui sont peu habitées, des perroquets d’une espece particuliere à chacune de ces îles ; ceux de Tabago sont fort gros ; leur plumage est verd avec un peu de bleu aux aîles & sur la tête. Il s’en trouve dans l’île de Saint-Vincent d’une couleur ardoisée tirant sur le verdâtre ; ils ont quelques plumes d’un rouge sang de beuf sur le gros des ailes : ces animaux sont mal faits, lourds, & semblent participer de la stupidité des sauvages du pays.

Les habitans de la Martinique, de la Guadeloupe & de la Grenade, ont tellement fait la chasse aux perroquets, qu’on n’en trouve presque plus dans ces îles.

Les perroquets font leurs nids au sommet des plus hauts arbres, dans des trous faits par la nature, ou qu’ils creusent avec leur bec ; ces trous sont très profonds, & presque toujours dirigés de bas en haut : quoique les perroquets paroissent pesans, ils volent cependant très-bien, fort haut, & en compagnie de quatre ou cinq, perchant sur les arbres pour se reposer, & faisant un grand dégât de fruits, de graines & de branches, lorsqu’ils prennent leur nourriture, ou qu’ils s’amusent. La chair de cet oiseau est brune, grasse, & d’un goût approchant de celle du pigeon ; on en fait de très-bonne soupe ; elle réussit encore très-bien étant mise en daube ou en pâte.

Les periques sont des perroquets de la petite sorte, qui ne grossissent jamais ; on peut les distinguer en grande & en petite espece ; elles sont toujours fort inférieures pour la taille aux perroquets ordinaires ; leur forme est plus dégagée ; elles ont aussi la voix moins forte, & le caquet plus affilé. On voit de grandes periques dont le plumage est d’un beau verd d’émeraude, ayant des petites plumes couleur de feu sur le gros des aîles, & un bourrelet de pareilles plumes sur le devant de la tête ; leur bec est ordinairement d’un blanc couleur de chair.

Il vient de la côte de Guinée des periques extrèmement jolies, moins fortes que les précédentes ; elles ont la queue fort longue ; leur plumage d’un verd de poirée est égal par-tout le corps, à l’exception d’un colier de plumes noires qu’elles ont au-tour du col ; leur tête est ronde, bien faite, ornée de deux yeux fort vifs, & d’un bec de couleur noire. La même côte produit une autre sorte de periques plus petites, d’un vert plus foncé, ayant des plumes rouges, jaunes & noires ; enfin il s’en trouve qui ne sont guere plus grosses que des moineaux, dont le plumage est verd d’émeraude, mélé de quelques petites plumes rouges sur la tête & aux ailes. Il est bon de faire attention que le mot perique désigne, toujours la petite espece des perroquets, & que celui de peruche s’emploie en parlant des femelles.

Perroquet tapiré, (Hist. des Arts.) nous nommons perroquets tapirés, ceux qui doivent à l’art une partie de leurs belles plumes. Les Indiens de la Guiane savent faire venir des plumes rouges & des plumes jaunes aux perroquets qui n’en avoient pas en assez grand nombre. Ce fait que M. de la Condamine a rapporté dans son intéressante relation de la riviere des Amazones, est attesté par tous ceux qui ont habité à Cayenne. On nous dit que les Indiens arrachent