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52. Il y a sept sortes de sophismes hors des mots ; le sophisme d’accident, le sophisme d’universalité, ou de conclusion d’une chose avouée avec restriction à une chose sans restriction ; le sophisme fondé sur l’ignorance de l’élenchus ; le sophisme du conséquent ; la pétition de principe ; le sophisme de cause supposée telle, & non telle ; le sophisme des interrogations successives.

53. Le sophiste trompe ou par des choses fausses, ou par des paradoxes, ou par le solécisme, ou par la tautologie. Voilà les limites de son art.

De la philosophie naturelle d’Aristote. Il disoit 1. le principe des choses naturelles n’est point un, comme il a plu aux Eléatiques ; ce n’est point l’homéomérie d’Anaxogore ; ni les atômes de Leucippe & de Démocrite ; ni les élémens sensibles de Thalès & de son école, ni les nombres de Pithagore, ni les idées de Platon.

2. Il faut que les principes des choses naturelles soient opposés entr’eux, par qualités & par privations.

3. J’appelle principes, des choses qui ne sont point réciproquement les unes des autres, ni d’autres choses, mais qui sont d’elles-mêmes, & dont tout est. Tels sont les premiers contraires. Puisqu’ils sont premiers, ils ne sont point d’autres ; puisqu’ils sont contraires, ils ne sont pas les uns des autres.

4. Ils ne sont pas infinis ; sans cette condition, il n’y a nul accès à la connoissance de la nature. Il y en a plus de deux. Deux se mettroient en équilibre à la fin, ou se détruiroient, & rien ne seroit produit.

5. Il y a trois principes des choses naturelles ; deux contraires, la forme & la privation ; un troisieme également soumis aux deux autres, la matiere. La forme & la matiere constituent la chose. La privation n’est qu’accidentelle. Elle n’entre point dans la matiere. Elle n’a rien qui lui convienne.

6. Il faut que ce qui donne origine aux choses soit une puissance. Cette puissance est la matiere premiere. Les choses ne sont pas de ce qui est actuellement, ni de ce qui n’est pas actuellement, car ce n’est rien.

7. La matiere ni ne s’engendre, ni ne se détruit ; car elle est premiere ; le sujet infini de tout. Les choses sont formées premierement, non pas d’elles-mêmes, mais par accident. Elles se résoudront ou se résolvent en elle.

8. Des choses qui sont, les unes sont par leur nature, d’autres par des causes. Les premieres ont en elles le principe du mouvement ; les secondes ne l’ont pas. La nature est le principe & la cause du mouvement ou du repos en ce qui est premierement de soi & non par accident ; ou elles se reposent & se meuvent par leur nature ; telles sont les substances matérielles. Les propriétés sont analogues à la nature qui consiste dans la matiere & dans la forme. Cependant la forme qui est un acte est plus de nature que la matiere.

Ce principe est très-obscur. On ne sait ce que le philosophe entend par nature. Il semble avoir pris ce mot sous deux acceptions différentes, l’une de propriété essentielle, l’autre de cause générale.

9. Il y a quatre especes de causes ; la matérielle, dont tout est ; la formelle, par qui tout est, & qui est la cause de l’essence de chaque chose ; l’efficiente, qui produit tout ; & la finale pour laquelle tout est. Ces causes sont prochaines ou éloignées ; principales ou accessoires ; en acte ou en puissance ; particulieres ou universelles.

10. Le hasard est cause de beaucoup d’effets. C’est un accident qui survient à des choses projettées. Le fortuit se prend dans une acception plus étendue. C’est un accident qui survient à des choses projettées

par la nature, du moins pour une fin marquée.

11. La nature n’agit point fortuitement, au hasard, & sans dessein : ce que nature prémédite a lieu, en tout ou en partie, comme dans les monstres.

12. Il y a deux nécessités, l’une absolue, l’une conditionnelle. La premiere est de la matiere ; la seconde, de la forme ou fin.

13. Le mouvement est un acte de la puissance en action.

14. Ce qui passe sans fin est infini. Il n’y a point d’acte infini dans la nature. Il y a cependant des êtres infinis en puissance.

15. Le lieu est une surface immédiate & immobile d’un corps qui en contient un autre. Tout corps qu’un autre contient est dans le lieu. Ce qui n’est pas contenu dans un autre n’est pas dans le lieu. Les corps ou se reposent dans leur lieu naturel, ou ils y tendent comme des portions arrachées à un tout.

16. Le vuide est un lieu dénué de corps. Il n’y en a point de tels dans la nature. Le vuide se suppose, il n’y auroit point de mouvement. Car il n’y auroit ni haut, ni bas, ni aucune partie où le mouvement tendît.

17. Le tems est le calcul du mouvement relatif à la priorité & à la postériorité. Les parties du tems touchent à l’instant présent, comme les parties d’une ligne au point.

18. Tout mouvement & tout changement se fait dans le tems ; & il y a dans tout être mu, vîtesse ou lenteur qui se peut déterminer par le tems. Ainsi le ciel, la terre & la mer sont dans le tems, parce qu’ils peuvent être mus.

19. Le tems étant un nombre nombré ; il faut qu’il y ait un être nombreux qui soit son support.

20. Le repos est la privation du mouvement dans un corps considéré comme mobile.

21. Point de mouvement qui se fasse en un instant, Il se fait toujours dans le tems.

23. Ce qui se meut dans un tems entier, se meut dans toutes les parties de ce tems.

24. Tout mouvement est fini ; car il se fait dans le tems.

25. Tout ce qui se meut est mu par un autre qui agit ou au-dedans ou au-dehors du mobile.

26. Mais comme ce progrès à l’infini est impossible ; il faut donc arriver à un premier moteur, qui ne prenne son mouvement de rien, & qui soit l’origine de tout mouvement.

26. Ce premier moteur est immobile, car s’il se mouvoit, ce seroit par un autre ; car rien ne se meut de soi. Il est éternel, car tout se meut de toute éternité, & si le mouvement avoit commencé, le premier moteur n’auroit pu mouvoir, & la durée ne seroit pas éternelle. Il est indivisible & sans quantité. Il est infini ; car le moteur doit être le premier, puisqu’il meut de toute éternité. Sa puissance est illimitée ; or une puissance infinie ne peut se supposer dans une quantité finie, telle qu’est le corps.

27. Le ciel composé de corps parfaits, comprenant tout, & rien ne le comprenant, est parfait.

28. Il y a autant de corps simples que de différences dans le mouvement simple. Or il y a deux mouvemens simples, le rectiligne & le circulaire. Celui-là tend à s’éloigner du centre ou en approcher, sans modification ou avec modification. Comme il y a quatre mouvemens rectilignes simples, il y a quatre élemens ou corps simples. Le mouvement circulaire étant de nature contraire au mouvement rectiligne, il faut qu’il y ait une cinquieme essence, differente des autres, plus parfaite, divine, c’est le ciel.

29. Le ciel n’est ni pesant, ni leger. Il ne tend ni à s’approcher, ni à s’éloigner du centre comme les graves & les légers. Il se meut circulairement.

30. Le ciel n’ayant point de contraire, il est sans