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comme l’admonition & l’aumône en matiere criminelle. Voyez Peine capitale, Peine grave.

Peine de mort, est toute condamnation qui doit être suivie de la mort naturelle ou civile du condamné.

Peine de nullité, c’est une disposition de quelque loi ou jugement qui prononce la nullité de quelque acte ou procédure, soit que la peine soit vicieuse en elle-même, soit parce que l’on n’a pas satisfait à quelque autre chose qui devoit précéder ou accompagner l’acte. Voyez Nullité.

Peine pécuniaire, est une condamnation dont l’effet est seulement d’obliger de payer une somme d’argent, comme une amende ou une aumône, des intérêts & réparations civils, des dommages & intérêts.

On l’appelle ainsi pour la distinguer de la peine corporelle.

Peine de la plus pétition. Voyez ci-après Plus pétition.

Peine du quadruple, est celle qui consiste à faire payer trois fois autant que ce qui étoit dû originairement. Voyez Peine du double.

Peine du talion, est celle qui consiste à faire souffrir au condamné le même traitement qu’il a fait à autrui. Voyez Loi du talion.

Peine des temeraires plaideurs, c’est la condamnation des dépens, qui est ordinairement la seule peine que supportent ceux qui succombent dans leur demande ou contestation, à-moins qu’il n’y ait eu vexation, auquel cas il y auroit lieu à accorder des dommages & intérêts. Voyez aux Institutes le titre de pena temere litigantium, lib. IV. tit. 16.

Peine du triple, ce droit consiste à faire payer deux fois en sus autant qu’il étoit dû pour le simple droit. Voyez ci-devant Peine du double. (A)

PEINÉ, adj. se dit en Peinture, & en Sculpture, & même en Littérat. des ouvrages où rien n’est fait avec facilité, & qui annoncent par-tout la peine que l’artiste a eu à les produire : ces sortes d’ouvrages sont toujours recherchés, prononcés jusqu’à en être secs & mesquins ; on dit ce tableau est peiné, ouvrage peiné.

PEINTADE, s. f. Poule-Peintade, Poule de Guinée, Poule d’Afrique, Perdrix des Terres-Neuves, gallina guinea Wil. (Hist. nat. Ornithologie.) oiseau de la grosseur d’une poule ; il a un pié neuf pouces & demi de longueur depuis la pointe du bec jusqu’à l’extrémité de la queue, & dix pouces jusqu’au bout des ongles : les aîles étant pliées, s’étendent à un pouce au-delà de l’origine de la queue. La tête n’est pas couverte de plumes, il y a seulement à l’origine du bec de quelques individus de cette espece un petit bouquet composé de poils roides, assez semblables à des soies de cochon. La peintade a sur le front une espece de corne conique, courbée en arriere & couverte d’une peau de couleur fauve, brune & rougeâtre ; elle a aussi des membranes charnues d’un très-beau rouge, qui pendent à côté de l’ouverture du bec ; les joues sont bleuâtres dans le mâle, & rouges dans la femelle. La partie supérieure du cou est couverte de plumes noires, semblables à des poils ; la partie inférieure a une couleur cendrée, tirant sur le violet. Les plumes du dos, du croupion, les petites des aîles, celles du dessus de la queue, de la poitrine, du ventre, des côtés du corps & des jambes, sont noires, & ont des taches blanches, rondes & symmétriques ; le tour de ces taches est purement noir, & le reste de la plume est d’un noir mêlé de cendré. Les taches du dos sont plus petites que celles des autres parties du corps, & il n’y a pas de couleur cendrée sur les plumes de toute la face inférieure de l’oiseau. Les grandes plumes des aîles sont noirâtres, & ont des taches blan-

ches. La queue est arrondie comme celle des perdrix, & de couleur grise ; elle a des taches blanches, rondes & entourées de noir. Le bec est rouge à son origine, & de couleur de corne vers l’extrémité. On ne distingue le mâle de la femelle que par la couleur des joues dont il a été fait mention. On éleve les peintades dans les basses-cours comme des poules ; & elles ont été apportées d’Afrique. Ornit. de M. Brisson. Voyez Oiseau.

PEINTRE, s. m. (Peinture.) artiste qui sait représenter toutes sortes d’objets par le secours des couleurs & du pinceau.

Le bonheur d’un peintre est d’être né avec du génie. Ce génie est ce feu qui éleve les peintres au-dessus d’eux-mêmes, qui leur fait mettre de l’ame dans leurs figures, & du mouvement dans leurs compositions. L’expérience prouve suffisamment que tous les hommes ne naissent pas avec un génie propre à les rendre peintres. Nous avons vû des hommes d’esprit qui avoient copié plusieurs fois ce que la peinture a produit de plus sublime, vieillir le pinceau & la palette à la main, sans s’élever au-dessus du rang de coloristes médiocres, & de serviles dessinateurs d’après les figures d’autrui. Les esprits les plus communs sont capables d’être des peintres, mais jamais grands peintres.

Il ne suffit pas aux peintres d’avoir du génie, de concevoir des idées nobles, d’imaginer les compositions les plus élégantes & de trouver les expressions les plus pathétiques, il faut encore que leurs mains ayent été rendues dociles à se fléchir avec précision en cent manieres différentes, pour se trouver capables de tirer avec justesse la ligne que l’imagination leur demande. Le génie a, pour ainsi dire, les bras liés dans un artiste dont la main n’est pas dénouée.

Il en est de l’œil comme de la main ; il faut que l’œil d’un peintre soit accoutumé de bonne heure à juger par une opération sûre & facile en même tems quel effet doit faire un certain mélange, ou bien une certaine opposition de couleurs ; quel effet doit faire une figure d’une certaine hauteur dans un groupe ; & quel effet un certain groupe fera dans le tableau après que le tableau sera colorié. Si l’imagination n’a pas à sa disposition une main & un œil capables de la seconder à son gré, il ne résulte des plus belles idées qu’enfante cette imagination, qu’un tableau grossier, & que dedaigne l’artiste même qui l’a peint, tant il trouve l’œuvre de sa main au-dessous de l’œuvre de son esprit.

L’étude nécessaire pour perfectionner l’œil & la main ne se fait point en donnant quelques heures distraites à un travail interrompu. Cette étude demande une attention entiere, & une persévérance continuée durant plusieurs années. On sait la maxime qui défend aux peintres de laisser écouler un jour entier, sans donner quelques coups de pinceau ; maxime qu’on applique communément à toutes les professions, tant on la trouve judicieuse : nulla dies sine lineâ.

Le seul tems de la vie qui soit bien propre à faire acquérir leur perfection à l’œil & à la main, est le tems où nos organes, tant intérieurs qu’extérieurs, achevent de se former : c’est le tems qui s’écoule depuis l’âge de quinze ans jusqu’à trente. Les organes contractent sans peine durant ces années toutes leurs habitudes, dont leur premiere conformation les rend susceptibles. Mais si l’on perd ces années précieuses, si on les laisse écouler sans les mettre à profit, la docilité des organes se passe sans que nos efforts puissent jamais la rappeller. Quoique notre langue soit un organe bien plus souple que notre main, cependant nous prononçons toujours mal une langue étrangere que nous apprenons après 30 ans.

Un peintre doit connoître à quel genre de peinture il