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empyreumatiques. Voyez Sel volatil & Huile empyreumatique.

Tout le monde connoît aussi l’usage de la fumée du papier brûlant, principalement sans flamme, contre les vapeurs hystériques, l’espece de vertige que certaines odeurs causent à beaucoup de sujets, les évanouissemens, &c. Ce secours populaire est souvent très efficace dans ces cas, & un des meilleurs qu’on puisse employer. (b)

Papier marbré, (Arts.) le papier marbré est un papier peint de diverses nuances, ou de différentes couleurs. Il se fait en appliquant une feuille de papier sur de l’eau où on a détrempé diverses couleurs avec de l’huile & du fiel de bœuf, qui empêche le mélange : selon la disposition qu’on leur donne avec un peigne, on forme les ondes & les panaches. Voici de quelle maniere se fait le papier marbré en Angleterre.

On prépare un auget de la forme & de la grandeur du papier qu’on veut marbrer, & de 4 doigts de profondeur, fait de plomb ou de bois, bien joint & enduit de façon qu’il puisse contenir la liqueur. Pour la liqueur, on fait tremper un quarteron de gomme adracanthe pendant 4 ou 5 jours dans de l’eau claire : on la remue de tems en tems, & on y ajoute tous les jours de l’eau nouvelle, jusqu’à ce qu’elle ait un peu moins de consistance que l’huile, alors on la jette dans le petit auget.

Les couleurs qu’on doit appliquer par-dessus sont, pour le bleu, de l’indigo broyé avec du blanc de plomb : pour le verd, l’indigo & l’orpiment, l’un broyé & l’autre détrempé, mêlés & qui ont bouilli ensemble dans l’eau commune : pour le jaune, l’orpiment broyé & détrempé : pour le rouge, la laque la plus fine broyée avec des raclures de bois de Brésil, qui ont été préparées en bouillant une demi-journée. Dans toutes ces couleurs on mêle un peu de fiel de bœuf, ou de poisson, qui a vieilli 2 ou 3 jours. Si les couleurs ne s’étendent pas bien d’elles-mêmes, on y ajoute un peu plus de fiel ; au contraire si elles s’étendent trop, il faut surcharger le fiel & le corriger, en y ajoutant de la couleur sans fiel.

Voici l’opération de marbrer : quand la gomme est bien reposée dans l’auget, on déploie une feuille de papier que l’on détrempe sur la superficie de la liqueur, & on la retire aussitôt afin de l’agiter & de faire monter le sédiment de la gomme vers la surface, & que la liqueur en soit plus universellement impregnée. Cela fait, & toutes les couleurs étant rangées dans des pots de fayance, sur une table où est aussi placé l’auget, on commence par tremper un pinceau de soies de cochon dans chaque couleur, ordinairement le bleu le premier, & on en répand sur la surface de la liqueur. Si la couleur est bien préparée, elle se dilatera d’elle-même. Ensuite on applique le rouge de la même maniere, mais avec un autre pinceau ; ensuite le jaune, & enfin le verd : pour le blanc, il se fait en répandant par-dessus la liqueur un peu d’eau claire, mêlée avec du fiel de bœuf.

Lorsque les couleurs flottent ainsi sur la liqueur, pour leur donner ces nuances agréables que nous admirons dans le papier marbré, on se sert d’un bâton pointu qu’on enfonce dans la liqueur, en tirant d’un bout à l’autre de l’auget avec adresse, & en faisant que ce bâton agite la liqueur & les couleurs qui surnagent : alors avec un peigne qu’on tient avec les deux mains par la tête, on peigne la surface de la liqueur dans l’auget d’un bout à l’autre, observant seulement de n’enfoncer que les dents. Si cette opération est faite avec un mouvement prompt & uniforme, elle produit ces nuages & ces ondulations, d’où dépend beaucoup la beauté de ce papier.

Si on aime mieux que les couleurs représentent des figures de fantaisie, comme des serpens & autres

semblables, cela se fait par le moyen du bâton pointu dont nous avons parlé ci-dessus, en traçant ces figures par-dessus ce qui a déjà été peigné ; il faut pour cet effet avoir la main adroite, & agiter la superficie de la liqueur en rond, comme si on vouloit tracer quelque fleur, ou figurer des lettres.

Enfin les couleurs étant dans cet état, l’ouvrier déploie & applique par-dessus une feuille de papier blanc mouillé : cela demande dans l’ouvrier une adresse que l’usage seul peut donner, car il faut que le papier & la surface de la liqueur se rencontrent par-tout. Ensuite avant que les couleurs aient le tems de pénétrer, ce qui arriveroit bientôt, à moins que le papier ne fût fort épais, ils enlevent ce papier avec agilité & d’une même main, & ensuite l’étendant quelque tems sur une planche, ils le suspendent après sur une corde pour le faire sécher. Quand il est suffisamment sec, on le polit avec une pierre de marbre, ou un morceau d’yvoire.

Il faut observer qu’on doit renouveller les couleurs de l’auget, & toutes les autres formalités avec le bâton pointu & le peigne, chaque fois qu’on veut appliquer un nouveau papier, parce que chaque feuille de papier emporte toute la couleur qui flote sur la liqueur. Voyez Kirch, de luce & umbra, lib. X. Merret sur Nery, de arte vitr. ch. xlij. Hought, collect. t. II. p. 419. & seq.

On a essayé quelquefois de rendre le papier marbré plus riche, en mêlant l’or & l’argent avec les couleurs, ce qui a bien réussi principalement pour la bibliothéque des rois de France : cependant la grande dépense a empêché que cette manufacture n’ait eu lieu.

Toute cette opération est tirée de Chambers. Il est surprennant qu’on ne trouve dans Savari aucun détail sur l’art de marbrer le papier. Voyez l’article Marbreur de papier, où cet article est décrit plus au long. (D. J.)

Papier, Commerce du (Commerce.) le papier est un objet d’un grand commerce ; il y en a différentes sortes ; eu égard à la couleur, on le divise en blanc, brun & bleu, &c. Par rapport à la qualité, on le divise en fin, second, bâtard, superfin, &c. Par rapport à l’usage, on le distingue en papier à écrire, à imprimer, à estampes, à cartouches, à patron, de chancellerie, &c. Par rapport aux dimensions, on le divise en moyen, à la couronne, au bonnet, au pot, royal, surroyal, impérial, éléphant, atlas. Par rapport aux pays où on le fabrique, on le divise en Allemand, Lombard, papier d’Hollande, de France, d’Angleterre, de Gènes, &c.

Il paroît que par-tout le papier se vend par rames, excepté dans les manufactures d’Auvergne, où il se vend au poids sur le pié de quatorze onces la livre : chaque rame selon son espece devant être d’un certain poids, suivant les réglemens.

Le papier de France, se divise en grand, moyen & petit. Les petites sortes sont la petite romaine, le petit raisin ou bâton royal, le petit nom de jésus, le petit à la main, &c. qui prennent leur nom de la marque qu’on y empreint en les faisant ; le cartier propre à couvrir par-derriere les cartes à jouer. Le pot dont on se sert pour le côté de la figure : la couronne qui porte ordinairement les armes du controlleur-général des finances : celui à la telliere qui porte les armes de M. le chancelier. Le tellier est un double T ; le champy ou papier à chassis ; & la serpente ainsi nommé, à cause d’un serpent dont il est marqué ; comme ce dernier est extrèmement fin, il sert aux éventaillistes.

Les moyennes sortes sont, le grand raisin simple, le quarré simple, le cavalier & le lombard, dont les trois derniers servent pour l’impression ; l’écu ou de compte simple, le quarré double, l’écu double, le