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quelquefois pour jouissance. Etre en pain, dans les coutumes de Hainaut & de Mons, c’est être sous la puissance de son pere ; comme être hors de pain, signifie, être hors de cette puissance, mettre hors de pain, émanciper. (A)

Pain d’acier, (Comm.) c’est une sorte d’acier qui vient d’Allemagne ; il est différent de celui que l’on appelle acier en bille.

Pain d’affinage, (Fonderie de métaux.) c’est ainsi qu’on nomme la petite portion de matiere d’argent qui reste toujours dans le fond de la coupelle ; on l’appelle autrement plaque.

Pain béni, (Hist. eccles.) c’est un pain que l’on bénit tous les dimanches à la messe paroissiale, & qui se distribue ensuite aux fideles.

L’usage étoit dans les premiers siecles du christianisme, que tous ceux qui assistoient à la célébration des saints mysteres participoient à la communion du pain qui avoit été consacré ; mais l’Église ayant trouvé de l’inconvénient dans cette pratique, à cause des mauvaises dispositions où pouvoient se trouver les chrétiens, restraignit la communion sacramentelle à ceux qui s’y étoient duement préparés. Cependant pour conserver la mémoire de l’ancienne communion, qui s’étendoit à tous, on continua la distribution d’un pain ordinaire, que l’on bénissoit, comme l’on fait de nos jours.

Au reste, le goût du luxe & d’une magnificence onéreuse à bien du monde, s’étant glissé jusque dans la pratique de la religion, l’usage s’est introduit dans les grandes villes de donner au lieu de pain, du gâteau plus ou moins délicat, & d’y joindre d’autres accompagnemens coûteux & embarrassans ; ce qui constitue les familles médiocres en des dépenses qui les incommodent, & qui seroient employées plus utilement pour de vrais besoins. On ne croiroit pas, si on ne le montroit par un calcul exact, ce qu’il en coûte à la nation tous les ans pour ce seul article.

On sait qu’il y a dans le royaume plus de quarante mille paroisses où l’on distribue du pain béni, quelquefois même à deux grand’messes en un jour, sans compter ceux des confréries, ceux des différens corps des arts & du négoce. J’en ai vu fournir vingt-deux pour une fête par les nouveaux maîtres d’une communauté de Paris. On s’étonne qu’il y ait tant de misere parmi nous ; & moi en voyant nos extravagances & nos folies, je m’étonne bien qu’il n’y en ait pas encore davantage.

Quoi qu’il en soit, je crois qu’on peut du fort au foible, estimer la dépense du pain béni, compris les embarras & les annexes, à quarante sous environ pour chaque fois qu’on le présente. S’il en coûte un peu moins dans les campagnes, il en coûte beaucoup plus dans les villes, & bien des gens trouveront mon appréciation trop foible ; cependant quarante mille pains à 40 s. piece, font quatre-vingt mille livres, somme qui multipliée par cinquante-deux dimanches, fait plus de 4 millions par an, ci 4000000 liv.

Qui empêche qu’on n’épargne cette dépense au public ? On l’a déja dit ailleurs, le pain ne porte pas plus de bénédiction que l’eau qu’on emploie pour le bénir ; & par conséquent on peut s’en tenir à l’eau, qui ne coûte rien, & supprimer la dépense du pain laquelle devient une vraie perte.

Par la même occasion, disons un mot du luminaire. Il n’y a guere d’apparence de le supprimer tout-à-fait ; nous sommes encore trop enfans, trop esclaves de la coutume & du préjugé, pour sentir qu’il est des emplois du bien plus utiles & plus religieux, que de brûler des cierges dans une église. Néanmoins tout homme éclairé conviendra qu’on peut épargner les trois quarts du luminaire qui se prodigue aujourd’hui, & qui n’est proprement qu’une pieuse décoration. Cela posé, il y a dans le royaume

plus de quarante mille églises en paroisses ; on en peut mettre un pareil nombre pour les églises collégiales, couvens, communautés, &c. ce qui fait quatre-vingt mille églises pour le tout. J’estime du plus au moins l’épargne du luminaire qu’on peut faire en chacune à 50 liv. par année ; cette somme, bien que modique multipliée par 80000 églises, produit 4 millions par an. Voilà donc avec les quatre millions ci-dessus, une perte annuelle de huit millions dans le royaume ; & cela pour de petits objets & de menus frais auxquels on n’a peut-être jamais pensé, ci 8000000 livres.

Combien d’autres inutilités coûteuses en ornemens superflus, en sonneries, processions, reposoirs, &c. Populus hic labiis me honorat, cor autem eorum longè est à me. Matt. xv. 8.

La religion ne consiste pas à décorer des temples, à charmer les yeux ou les oreilles ; mais à révérer sincérement le créateur, & à nous rendre conformes à Jesus-Christ. Aimons Dieu d’un amour de préférence, & craignons de lui déplaire en violant ses commandemens ; aimons notre prochain comme nous-mêmes, & soyons en conséquence toujours attentifs à lui faire du bien, ou du moins toujours en garde pour ne lui point faire de mal ; enfin remplissons le devoir de notre état : voilà précisément la religion que Dieu nous prescrit, & c’est celle-là tout juste que les hommes ne pratiquent point ; mais ils tâchent de compenser ces manquemens d’une autre maniere : ils se mettent en frais, par exemple, pour la décoration des autels, & pour la pompe des cérémonies ; les ornemens, le luminaire, le chant, la sonnerie ne sont pas épargnés ; tout cela fait proprement l’ame de leur religion, & la plûpart ne connoissent rien au-delà. Piété grossiere & trompeuse, peu conforme à l’esprit du Christianisme, qui n’inspire que la bienfaisance & la charité fraternelle !

Que de biens plus importans à faire, plus dignes des imitateurs de Jesus-Christ ! Combien de malheureux, estropiés, infirmes, sans secours & sans consolation ! Combien de pauvres honteux sans fortune & sans emploi ! Combien de pauvres ménages accablés d’enfans ! Combien enfin de misérables de toute espece, & dont le soulagement devroit être le grand objet de la commisération chrétienne ! objet par conséquent à quoi nous devrions consacrer tant de sommes que nous prodiguons ailleurs sans fruit & sans nécessité.

Pain, en terme de Cirier, c’est un morceau de cire plat & rond, à qui il ne manque plus pour être parfaitement blanc, que d’être mis encore une fois sur les toiles. Voyez Toiles, & l’article Blanchir.

Pain, (mettre en) en terme de Blanchisserie, est l’action de former des morceaux de cire plats & ronds, quand la matiere a acquis un certain degré de blancheur. Cela se fait en versant la cire fondue pour la troisieme fois sur des moules nommés pour cela planches à pain. V. Planches a pain, & l’art. Blanchir.

Pain de bougie, (Cirerie.) c’est la bougie filée que l’on a tortillée ou pliée d’une certaine maniere, pour s’en pouvoir servir plus commodément.

Pain a chanter, (Oublieur.) c’est du pain sans levain qui sert à la consécration dans le sacrifice des Catholiques. Il est fait de la plus pure farine de froment entre deux plaques de fer gravées en forme de gaufrier, que l’on frotte un peu de cire blanche, pour empêcher que la pâte n’y tienne. Ce sont les Patissiers-Oublieurs qui font les pains à chanter. Il y a des maîtres qui vivent de ce métier.

Pain de chapitre, (terme ecclésiastiq.) on lit dans la satyre Menippée : il n’est que d’avoir un roi légitime, etiam discole, pourvu qu’il nous laisse le pain de chapitre & le purgatoire. On appelle pain de chapitre celui qu’on distribue tous les jours aux cha-