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la réserve des évêques, lesquels en faveur de la résidence, ont l’alternative, c’est-à-dire qu’ils ont la collation pendant un mois, & le pape pendant l’autre, & ainsi de suite alternativement.

Le pape n’use point de prévention dans les pays d’obédience, dans les six mois de l’alternative des évêques ni dans les quatre mois des autres collateurs.

Obédience, se prend aussi pour un acte qu’un supérieur ecclésiastique donne à un inférieur, soit pour le faire aller en quelque mission, soit pour le transferer d’un lieu dans un autre, ou pour lui permettre d’aller en pelérinage ou en voyage : un prêtre ne doit point être admis à dire la messe dans un diocese étranger, qu’il ne montre son obédience. On doit arrêter les moines vagabonds, qui errent par le monde, & qui ne montrent point leur obédience.

On a aussi appellé obédiences les maisons, églises, chapelles & métairies qui ne sont pas des titres de bénéfices séparés, & dans lesquels un supérieur ecclésiastique envoie un religieux pour les desservir ou administrer. On les a ainsi appellés obédience, parce que le religieux qui les dessert n’y est envoyé qu’en vertu d’un acte d’obédience, & qu’il est révocable ad nutum.

Dans les premiers siecles de l’état monastique, tous les prieurés n’étoient que des obédiences. Il y a encore quelques abbayes où les prieurés qui en dépendent, ne sont que de simples obédiences. Voyez l’histoire de l’église de Meaux, t. I. pag. cxix ; les Mémoires du clergé ; les lois ecclésiastiques & la Jurisprudence canoniq. de de Lacombe. (A)

OBÉDIENCIER, s. m. (Jurisprud.) est un religieux qui va, par l’ordre de son supérieur, desservir une église dont il n’est point titulaire. Voyez Obédience. (A)

OBÉIR, v. n. (Gram.) c’est se soumettre à la volonté d’un autre. Celui qui commande est censé supérieur, & celui qui obéit subalterne. On obéit à Dieu, en suivant sa loi ; aux rois, en remplissant leurs lois ; à la nécessité, aux passions, &c.

Obéir se prend encore dans un sens différent, lorsqu’il se dit d’un corps roide, inflexible, qu’on ne plie pas à volonté ; le fer trempé n’obéit pas, &c.

Obéir, se dit d’un cheval qui répond aux aides. Voyez Aides.

OBÉISSANCE, s. f. (Droit naturel & politique.) Dans tout état bien constitué, l’obéissance à un pouvoir légitime est le devoir le plus indispensable des sujets. Refuser de se soumettre aux souverains, c’est renoncer aux avantages de la société, c’est renverser l’ordre, c’est chercher à introduire l’anarchie. Les peuples, en obéissant à leurs princes, n’obéissent qu’à la raison & aux lois, & ne travaillent qu’au bien de la société. Il n’y a que des tirans qui commanderoient des choses contraires ; ils passeroient les bornes du pouvoir légitime, & les peuples seroient toujours en droit de reclamer contre la violence qui leur seroit faite. Il n’y a qu’une honteuse flatterie & un avilissement odieux, qui ait pu faire dire à Tibere par un sénateur romain : Tibi summum rerum judicium dii dedere, nobis obsequii gloria relicta est. Ainsi l’obéissance ne doit point être aveugle. Elle ne peut porter les sujets à violer les lois de la nature. Charles IX. dont la politique inhumaine le détermina à immoler à sa religion ceux de ses sujets qui avoient embrassé les opinions de la réforme, non content de l’affreux massacre qu’il en fit sous ses yeux & dans sa capitale, envoya des ordres aux gouverneurs des autres villes du royaume, pour qu’on exerçât les mêmes cruautés sur ces sectaires infortunés. Le brave d’Orte, commandant à Bayonne, ne crut point que son devoir pût l’engager à obéir à ces ordres sanguinaires. « J’ai communiqué, dit-il au Roi, le commandement de

V. M. à ses fideles habitans & gens de guerre de la garnison, je n’y ai trouvé que bons citoyens & braves soldats, mais pas un bourreau : c’est pourquoi eux & moi supplions très-humblement V. M. de vouloir employer nos bras & nos vies en choses possibles ; quelque hasardeuses qu’elles soient, nous y mettrons jusqu’à la derniere goutte de notre sang ». Le comte de Tende & Charny répondirent à ceux qui leur apportoient les mêmes ordres, qu’ils respectoient trop le roi pour croire que ces ordres inhumains pussent venir de lui. Quel est l’homme vertueux, quel est le chrétien qui puisse blâmer ces sujets généreux d’avoir desobéi ?

OBELE, s. m. (Belles-Lettres.) désignoit chez les anciens une petite ligne, semblable à une aiguille, d’où lui est venu le nom d’obelus, ὀϐελός, qui signifie aiguille en grec.

Ces mot est principalement d’usage, en parlant des Hexaples d’Origène ; cet auteur ayant distingué par un astérique ou étoile les supplémens qu’il a ajoutés au texte des septante dans les endroits où ils n’ont point entendu l’hébreu, & ayant marqué d’un obele, ou de la petite ligne (—) les endroits où ce qui se trouve dans les septante, n’est point dans l’hébreu. Voyez Hexaple.

S. Jerôme dit que l’obele se trouvoit-seulement dans les endroits où on avoit retranché quelque chose des septante, comme superflu ; & l’astérique, dans ceux où il manquoit quelque chose. Ces sortes de marques se rencontrent fréquemment dans les anciens manuscrits. Ordinairement l’obele est accompagné de deux points, l’un au-dessus, l’autre au-dessous de la ligne (÷), & l’asterique est une croix de S. André, accompagnée de quatre points. (※)

OBÉLISQUE, s. m. (Archit. & Antiq. égyptiennes.) espece de pyramide quadrangulaire longue & étroite, qui est ordinairement d’une seule pierre, & qu’on éleve dans une place pour y servir d’ornement. La proportion de la hauteur à la largeur est presque la même en tous les obélisques. Cette proportion est telle : leur hauteur est de neuf parties ou neuf parties & demie, & quelquefois dix de leur grosseur par le bas ; par le haut la largeur n’est jamais moindre de la moitié, ni plus grande que les trois quarts de celle d’en-bas, & on place un ornement sur sa pointe, qui est émoussée ; mais nous nous proposons d’entretenir ici le lecteur des obélisques d’Egypte, parce que ce sont les seuls monumens qui subsistent de l’ancienne sagesse de ce peuple.

Sésostris, roi d’Egypte, après s’être rendu maître de la plus grande partie de l’Asie & de l’Europe, s’appliqua sur la fin de son regne à élever des ouvrages publics pour l’ornement du pays, & pour l’utilité des peuples. Entre les plus considérables de ses ouvrages, on compte les deux obélisques que ce prince fit élever dans la ville d’Héliopolis. Ils sont d’une pierre très-dure, tirée des carrieres de la ville de Syenne en Egypte, tout d’une piece, & chacun de 120 coudées de haut.

Auguste, après avoir réduit l’Egypte en province, ayant fait transporter à Rome ces deux obélisques, il en fit dresser un dans le grand cirque, & l’autre dans le champ de Mars, avec cette inscription sur la base, Cæs. D. F. Augustus Pont. max. Imp. XII. Cos. XI. Téib. Pot. XV. Ægypto in potestatem populi rom. redact. soli donum dedit.

Le corps de ces obélisques est tout chargé de figures hyéroglyphiques, ou écritures symboliques, qui marquent, selon Diodore la grande puissance de ce roi, le détail des tributs qu’on lui payoit, & le nombre des nations qu’il avoit vaincues. Un de ces obélisques est aujourd’hui rompu en pieces, & couvert de terre ; l’autre, qu’Auguste avoit fait placer dans le