Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 11.djvu/133

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un buste. Il y a de ces niches dans la cour de l’hôtel de la Vrilliere à Paris.

Niche de rocaille, niche revêtue de coquilles pour les grottes. Il y avoit de belles niches de cette espece à Versailles, & il y en a encore à Meudon.

Niche de treillage, c’est une niche construite de barreaux de fer & d’échalas, qui sert à orner quelque portique ou cabinet de treillage.

Niche en tabernacle, on appelle ainsi les grandes niches qui sont décorées de chambranles, montans & consoles avec frontons. Telles sont les niches d’ordre dorique du dehors de l’église de S. Pierre & celles de S. Jean de Latran à Rome, qui peuvent être remplies par des grouppes. On voit aussi une niche de cette espece dans l’église des PP. carmes déchaussés à Paris, occupée par une figure de la sainte Vierge en marbre, faite par Antoine Raggi, dit le Lombard, d’après le modele du cavalier Bernin.

Niche en tour ronde, c’est une niche qui est prise dans le dehors d’un mur circulaire, & dont la fermeture porte en saillie. De cette espece sont les grandes niches du chevet & de la croisée du dehors de l’église de S. Pierre de Rome, & la fontaine de S. Germain, rue des Cordeliers, à Paris.

On appelle niche en tour creuse celle qui fait l’effet contraire de la niche en tour ronde.

Niche feinte, renfoncement de peu de profondeur, où sont peintes, ou en bas-reliefs, une ou plusieurs figures. Il y a de ces niches à la face latérale de l’hôtel de Carnavalet au marais à Paris.

Niche quarrée, c’est un renfoncement dans un mur, dont le plan & la fermeture sont quarrés, comme au palais des Tuileries du côté du jardin.

Niche ronde, niche ceintrée par son plan & sa fermeture. On voit des niches de cette espece fort régulieres au portail du Louvre.

Niche rustique, niche qui est avec bossages ou refends. Il y a de ces niches au palais de Luxembourg à Paris.

On appelle encore niche un enfoncement pratiqué dans une chambre où l’on place un lit ou un canapé.

Nous ferons ici quelques remarques sur les niches, parce qu’elles ont été fort en usage dans les anciens édifices ; il en reste des vestiges dans les temples, les thermes, les théâtres, les amphithéâtres, les cirques & les arcs de triomphe. Il y en avoit aussi dans quelques maisons de particuliers, comme dans les vestibules, les cabinets & les salles pour conférer ; ainsi les anciens en ornoient les salles, les loges & les escaliers.

Les niches doivent le plus qu’il se peut être vis-à-vis d’un vuide ou d’une croisée, soit qu’il y ait des statues, ou qu’il n’y en ait point ; car alors elles servent pour se reposer, s’il y a un siege de marbre ou de pierre.

Les grandes niches antiques tombent jusque sur le pavé, comme celles de la rotonde sous son portique & celles des thermes d’Antonin, où a été trouvé le grouppe du taureau Farnèse qui contient la fable de Dircé. Il y en a encore aux thermes de Titus, où étoit le grouppe de Laocoon. Ces sortes de niches conviennent à de grands lieux ; mais dans celles qui sont d’une grandeur ordinaire, & qui ne peuvent avoir qu’une figure, leur proportion doit être telle que la hauteur soit d’un peu moins que deux fois & demi leur largeur pour les ordres massifs, & d’un peu plus que cette hauteur pour les ordres délicats ; leur plan doit avoir un peu plus, ou un peu moins que le demi-cercle, ou lui être égal.

Les niches qui sont entre les colonnes sans piédestaux, doivent avoir de largeur un diametre &

demi de la colonne ; & lorsque les colonnes ont des piédestaux, elles demandent un diametre & trois quarts. Comme il faut que les statues soient proportionnées aux niches, elles doivent être de telle maniere que le bas du col ou la hauteur des épaules ne passe pas le-dessus de l’imposte. L’imposte doit être pareille à la hauteur d’une frise & corniche mise en un endroit ; elle ne doit pas être moindre d’une treizieme partie & demie de cette hauteur, qui seroit celle d’une corniche seule.

Les bandeaux d’arcs ou archivoltes des niches ne doivent point être plus larges que la sixieme partie de l’ouverture, ni plus étroits que la huitieme, si ce n’est aux grandes niches, où ils n’auront que la dixieme partie. On voit des exemples de toutes ces sortes de niches devant le palais de S. Marc à Venise.

Les proportions des niches doivent être relatives à celle de l’ordre qui décore l’édifice, à la grandeur de la statue, & à l’étendue de l’endroit où elle doit être pratiquée.

Plus les niches sont élevées, plus les figures qu’elles contiennent doivent être petites. Ainsi les niches doivent être plus hautes à mesure qu’elles sont plus élevées. Scamozzi veut que cette hauteur soit deux fois & trois quarts de sa largeur.

Lorsqu’il y a plusieurs niches posées les unes sur les autres, l’espace qui reste entre deux doit avoir au-moins deux fois la largeur de la niche.

Enfin lorsque des bossages regnent dans une façade où il y a des niches, c’est autour de la niche que les bossages doivent être répétées, & non dans la niche derriere la statue.

Mais les niches sur lesquelles nous venons de nous étendre sont-elles un ornement en Architecture ? Les anciens le pensoient ainsi, tandis que plusieurs modernes les regardent comme une idée de mauvais goût, & trouvent qu’une statue enchâssée dans cette espece d’enfoncement ne fait point un bel effet ; je trouve beaucoup de vérité dans cette observation, mais ce n’est pas ici le lieu de la faire valoir.

Le mot niche vient de l’italien nichio, qui est une coquille de mer, d’où par ressemblance on a appellé niches ces cavités qu’on pratique dans les murs pour y placer des statues. Aussi représente-t-on souvent une coquille dans le ceintre d’une niche. (D. J.)

Niche, (Théol.) se dit aussi en particulier dans l’Eglise romaine d’une espece de petit trône de bois doré ou d’étoffe précieuse, surmonté d’un dais ou d’un dome avec des panaches & des aigrettes où l’on place le saint Sacrement dans les offices où on l’expose à la vénération publique des fideles.

Il est parlé de niches dans les anciens, c’est-à-dire de pavillons sous lesquels on plaçoit & l’on portoit les images des dieux. Il est dit dans Amos, v. 25 & 26, que les Israélites, dans leur voyage du désert, ont porté la tente ou le pavillon de leur dieu Moloch, l’image de leur idole, l’astre de leur dieu. Et saint Etienne dans les Actes des Apôtres, c. vij. 43, leur fait le même reproche. On conjecture avec assez de fondement que Moloch & ces autres divinités païennes qu’ils portoient dans le désert, étoient portées dans des niches sur les épaules des hommes ou dans des chariots couverts, comme on sait que quelquefois les païens menoient leurs dieux en procession ou dans les marches publiques. Quelques-uns croient aussi que ces petits temples d’argent de la déesse Diane que l’on vendoit à Ephese étoient des temples portatifs ou des niches pour la dévotion des pélerins.

La coutume de porter les figures des dieux sous des tentes & dans des litieres couvertes, est venue des Egyptiens. Hérodote, liv. IV. parle d’une fête