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pas faire feu, & qu’elle ne pouvoit durer long-tems. Mais s’il est vrai que le mousquet a cet avantage sur le fusil, il est certain aussi que quand la batterie du fusil n’a pas fait feu, on le remet dans le même instant en état de tirer ; il n’en étoit pas de même du mousquet : car outre le tems qu’il falloit pour remettre la meche sur le serpentin, pour la bien faire tenir, la compasser (c’est-à-dire l’arranger de maniere pour qu’elle tombât sur le milieu du bassinet), la souffler, puis souffler sur le bassinet, & ensuite l’ouvrir, s’il faisoit du vent, la poudre n’y restoit pas ; s’il pleuvoit, elle étoit mouillée dans l’instant : mais en faisant abstraction de tous ces inconvéniens, si la meche n’étoit pas bien serrée & bien allumée, on donnoit plusieurs coups de clé sans que la poudre prit ; comme il restoit de la cendre de cette meche dans le bassinet, il falloit attendre qu’elle fût bien éteinte avant que de remettre le mousquet en état de tirer, crainte que l’amorce ne le fît partir. On voit par cet exposé que le mousquet avoit bien des inconvéniens dans le service, lesquels n’étoient point compassés par sa plus grande durée que le fusil. Car comme toutes les actions de campagne demandent plûtôt un feu vif & promptement redoublé qu’un feu lent & de plus de durée, & qu’on tire aisément deux coups de fusil contre un coup de mousquet, il s’ensuit que ce n’est pas sans raison qu’on a donné la préférence au fusil sur le mousquet.

M. de Vauban avoit proposé des armes qui au moyen d’une platine de fusil & de mousquet auroient réuni les avantages de ces deux armes. Il y a eu quelques troupes qui en ont été armées, entr’autres la premiere compagnie du régiment de Nivernois, vers l’an 1688 ; mais cette invention n’a pas été suivie. Voyez Fusil-mousquet.

Mousquet biscayen, c’est dans l’Art militaire un mousquet renforcé, plus long & d’un plus grand calibre que le mousquet ordinaire, & qui porte plus loin. Cette espece de mousquet est susceptible d’une plus grande charge que les autres, parce que l’épaisseur du canon à la culasse le met en état de résister davantage à l’effort de la poudre. Ces mousquets peuvent être fort utiles dans une place de guerre, de même que les fusils des boucaniers. Voyez Armes Boucaniers. On peut s’en servir pour éloigner l’ennemi des ouvrages de la place, & pour tirer sur ceux qui viennent les reconnoître. Comme on se sert de meche pour tirer le mousquet, il est d’un usage moins commode que le fusil ; mais on rendroit le mousquet biscayen plus utile en lui substituant une platine de fusil à la place de celle de mousquet, parce qu’avec un fusil un bon tireur qui manque rarement de tuer, peut choisir les officiers & les soldats les plus hardis. On ne doit point s’arrêter aux avantages de la meche : des batteries aussi fortes que l’exigent les mousquets ou fusils dont il s’agit ici, ratent très-rarement ; leurs pierres ne s’usent d’ailleurs que très-peu, & elles ne se cassent point. Voyez Mousquet & Fusil.

MOUSQUETADE, s. f. (Art milit.) décharge de mousqueterie. Il essuya une terrible mousquetade.

MOUSQUETAIRES, les, sont en France un corps de la maison du Roi, destiné à combattre à pié & à cheval. Dans les voyages du Roi, lorsque le régiment des gardes n’y est pas, ils gardent le dehors de la maison où le Roi loge.

Les mousquetaires forment deux compagnies ; la premiere a des chevaux gris, ce qui fait donner aux mousquetaires qui la composent le nom de mousquetaires gris ; & la seconde des chevaux noirs, ce qui la fait nommer la compagnie des mousquetaires noirs.

Ces deux compagnies sont regardées comme une espece d’école pour la guerre. Louis XIV. avoit éta-

bli que toute la jeunesse de condition y serviroit au

moins un an.

Les mousquetaires s’arment, s’habillent, se montent au moyen de leur solde ; leurs armes sont une épée, des pistolets & un fusil. Ils avoient autrefois des mousquets, ce qui leur a fait donner le nom de mousquetaires. On le donnoit indifféremment avant la création de ces compagnies, à tous ceux qui se servoient du mousquet.

Les mousquetaires sont habillés de rouge, avec un galon ou bordé qui est d’or dans la premiere compagnie, & d’argent dans la seconde. Par-dessus leur habit ils ont une espece d’habillement particulier qui s’appelle soubreveste, que le roi leur donne : c’est une espece de cotte d’armes ou de juste-au-corps sans manches, qui leur couvre le devant & le derriere. Elles sont bleues & galonnées ; elles ont une croix devant & une autre derriere : ces croix sont de velours blanc, bordées d’un galon d’argent ; elles ont des fleurs-de-lis aux angles de même. Le devant & le derriere des soubrevestes s’accrochent au collet par des agraffes.

Les mousquetaires ont un étendart par compagnie, comme la cavalerie, & un drapeau qu’ils ne déploient que lorsqu’ils sont à pié, & qu’ils ne portent pas même à la guerre lorsque le roi n’y est pas & qu’il reste des mousquetaires pour sa garde.

Les officiers des mousquetaires jusqu’aux cornettes compris, sont nommés officiers à hausse-col, parce qu’ils portent dans le service à pié le hausse-col comme les officiers d’infanterie. Les officiers à hausse-col ne portent point de soubreveste ; ils montent aux charges jusqu’à celle de capitaine-lieutenant comprise. Depuis le regne de Louis XV. on leur a permis quelquefois de vendre leurs charges, mais à-présent ils ne vendent que la derniere cornette, & les autres officiers montent aux autres charges par rang d’ancienneté.

Les mousquetaires ainsi que les gendarmes & les chevaux-legers de la garde du roi, ont même rang que les gardes-du-corps.

La premiere compagnie des mousquetaires a été instituée par Louis XIII, & la seconde par Louis XIV. en 1660. Elle étoit auparavant au cardinal de Mazarin, sous le titre de compagnie de ses mousquetaires. Le roi s’en fit capitaine, comme il l’étoit de la premiere en 1665. Les compagnies de mousquetaires sont chacune de 250, mais on y reçoit en tems de guerre autant de surnuméraires qu’il s’en présente.

MOUSQUETERIE, s. f. (Art milit.) c’est l’art de se servir du mousquet ; c’est en général toute troupe armée de mousquet, & c’est aussi la décharge de ces troupes.

MOUSQUETON, s. m. petite arme qui est plus courte que le mousquet, & qui se tire avec un fusil composé d’un chien & d’une batterie, au lien que le mousquet s’exécute avec une meche qui est compassée sur le serpentin. Les mousquetons sont de quatre piés de longueur.

MOUSSE, muscus, s. f. (Hist. nat.) genre de plante qui n’a point de fleurs, & dont les feuilles sont d’une forme particuliere. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

Les mousses d’arbres ne sont pas des plantes moins parfaites que celles qui s’élevent à la plus grande hauteur, car elles ont des racines, des branches, des fleurs & des graines, quoiqu’en semant leurs graines l’art humain n’ait pu parvenir encore à les multiplier.

Les Botanistes divisent ces sortes de plantes en divers genres, sous lesquels ils constituent plusieurs especes différentes, & même si nombreuses, que dans les environs de Paris M. Vaillant en comptoit jusqu’à 137, mais comme elles n’ont aucune beauté,