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quer tout ce qui arrive dans les différens écoulemens qui se font par les naseaux.

La morve est un écoulement de mucosité par le nez, avec inflammation ou ulcération de la membrane pituitaire.

Cet écoulement est tantôt de couleur transparente, comme le blanc d’œuf, tantôt jaunâtre, tantôt verdâtre, tantôt purulent, tantôt sanieux, mais toujours accompagné du gonflement des glandes lymphatiques de dessous la ganache ; quelquefois il n’y a qu’une de ces glandes qui soit engorgée, quelquefois elles le sont toutes deux en même tems.

Tantôt l’écoulement ne se fait que par un naseau, & alors il n’y a que la glande du côté de l’écoulement qui soit engorgée ; tantôt l’écoulement se fait par les deux naseaux, & alors les deux glandes sont engorgées en même tems : tantôt l’écoulement vient du nez seulement, tantôt il vient du nez, de la trachée-artere, & du poumon en même-tems.

Ces vérités ont donné lieu aux différences suivantes.

1°. On distingue la morve en morve proprement dite, & en morve improprement dites.

La morve proprement dite est celle qui a son siege dans la membrane pituitaire ; à proprement parler il n’y a pas d’autre morve que celle-là.

Il faut appeller morve improprement dite, tout écoulement par les naseaux, qui vient d’un autre partie que de la membrane pituitaite ; ce n’est pas la morve, c’est à tort qu’on lui donne ce nom : on ne lui conserve ce nom que pour se conformer au langage ordinaire.

Il faut diviser la morve proprement dite à raison de sa nature, 1°. en morve simple, & en morve composée ; en morve primitive, & en morve consécutive. 2°. A raison de son degré, en morve commençante, en morve confirmée, & en morve invéterée.

La morve simple est celle qui vient uniquement de la membrane pituitaire.

La morve composée n’est autre chose que la morve simple combinée avec quelqu’autre maladie.

La morve primitive est celle qui est indépendante de toute autre maladie.

La morve consécutive est celle qui vient à la suite de quelqu’autre maladie, comme à la suite de la pulmonie, du farcin, &c.

La morve commençante est celle où il n’y a qu’une simple inflammation & un simple écoulement de mucosité par le nez.

La morve confirmée est celle où il y a exulcération dans la membrane pituitaire.

La morve invétérée est celle où l’écoulement est purulent & sanieux, où les o ; & les cartilages sont affectés.

2°. Il faut distinguer la morve improprement dite en morve de morfondure, & en morve de pulmonie.

La morve de morfondure est un simple écoulement de mucosité par les naseaux, avec toux, tristesse & dégoût, qui dure peu de tems.

On appelle du nom de pulmonie toute suppuration faite dans le poumon, qui prend écoulement par les naseaux, de quelque cause que vienne cette suppuration.

La morve de pulmonie se divise, à raison des causes qui la produisent, en morve de fausse gourme, en morve de farcin, & en morve de courbature.

La morve de fausse gourme est la suppuration du poumon, causée par une fausse gourme, ou une gourme maligne qui s’est jettée sur les poumons.

La morve de farcin est la suppuration du poumon, causée par un levain farcineux.

La morve de courbature n’est autre chose que la suppuration du poumon après l’inflammation, qui

ne s’est pas terminée par résolution. Enfin on donne le nom de palmonie à tous les écoulemens de pus qui viennent du poumon, de quelque cause qu’ils procedent ; c’est ce qu’on appelle vulgairement morve, mais qui n’est pas plus morve qu’un abscès au foie, à la jambe, ou à la cuisse.

Il y a encore une autre espece de morve improprement dite, c’est la morve de pousse : quelquefois les chevaux poussifs jettent de tems en tems, & par floccons, une espece de morve tenace & glaireuse ; c’est ce qu’il faut appeller morve de pousse.

Causes. Examinons d’abord ce qui arrive dans la morve.

Il est certain que dans le commencement de la morve proprement dite (car on ne parle ici que de celle-ci) il y a inflammation dans les glandes de la membrane pituitaire ; cette inflammation fait séparer une plus grande quantité de mucosité ; de-là l’écoulement abondant de la morve commençante.

L’inflammation subsistant, elle fait resserrer les tuyaux excréteurs des glandes, la mucosité ne s’échappe plus, elle séjourne dans la cavité des glandes, elle s’y échauffe, y fermente, s’y putréfie, & se convertit en pus ; de là l’écoulement purulent dans la morve confirmée.

Le pus en croupissant devient acre, corrode les parties voisines ; carie les os, & rompt les vaisseaux sanguins ; le sang s’extravase, & se mêle avec le pus ; de-là l’écoulement purulent, noirâtre & sanieux dans la morve invétérée. La lymphe arrêtée dans ses vaisseaux, qui se trouvent comprimés par l’inflammation, s’épaissit, ensuite se durcit ; de-là les callosités des ulceres.

La cause évidente de la morve est donc l’inflammation. L’inflammation reconnoît des causes générales & des causes particulieres. Les causes générales sont la trop grande quantité, la rarefaction & l’épaississement du sang ; ces causes générales ne sont qu’une disposition à l’inflammation, & ne peuvent pas la produire, si elles ne sont aidées par des causes particulieres & déterminantes : ces causes particulieres sont 1°. le défaut de ressort des vaisseaux de la membrane pituitaire, causé par quelque coup sur le nez : les vaisseaux ayant perdu leur ressort n’ont plus d’action sur les liqueurs qu’ils contiennent, & favorisent par-là le séjour de ces liqueurs ; de-là l’engorgement & l’inflammation. 2°. Le déchirement des vaisseaux de la membrane pituitaire par quelque corps poussé de force dans le nez. Les vaisseaux étant déchirés, les extrémités se ferment, & arrêtent le cours des humeurs ; de-là l’inflammation.

3°. Les injections acres, irritantes, corrosives & caustiques, faites dans le nez ; elles font crisper & resserrer les extrémités des vaisseaux de la membrane pituaire ; de-là l’engorgement & l’inflammation.

4°. Le froid. Lorsque le cheval est échauffé, le froid condense le sang & la lymphe ; il fait resserrer les vaisseaux ; il épaissit la mucosité, & engorge les glandes : de-là l’inflammation.

5°. Le farcin. L’humeur du farcin s’étend & affecte successivement les différentes parties du corps ; lorsqu’elle vient à gagner la membrane pituitaire, elle y forme des ulceres, & cause la morve proprement dite.

Symptomes. Les principaux symptomes sont l’écoulement qui se fait par les naseaux, les ulceres de la membrane pituitaire, & l’engorgement des glandes de dessous la ganache.

1°. L’écoulement est plus abondant que dans l’état de santé, parce que l’inflammation distend les fibres, les sollicite à de fréquentes oscilliations, & fait par-là séparer une plus grande quantité de mu-