Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 10.djvu/519

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de l’ile de l’Argentiere, dont elle est à 3 milles.

Cette île, si parfaitement décrite par Tournefort, est presque ronde, & a environ 60 milles de tour ; elle est bien cultivée, & son port, qui est un des meilleurs & des plus grands de la Méditerranée, sert de retraite à tous les bâtimens qui vont au Levant ou qui en reviennent : car elle est située à l’entrée de l’Archipel, que les anciens connoissoient sous le nom de mer Egée.

Le Milo, comme dit Thucydide, quoique petite, fut très-considérable dans le tems des beaux jours de la Grece : elle jouissoit d’une entiere liberté 700 ans avant la fameuse guerre du Péloponnèse. Les Athéniens y tenterent inutilement deux descentes, & ce ne fut qu’à la troisieme qu’ils y firent ce massacre odieux dont parlent le même Thucydide, Diodore de Sicile & Strabon.

Cette île tomba, comme toutes les autres de l’Archipel, sous la domination des Romains, & ensuite sous celle des empereurs grecs. Marc Sanudo, premier duc de l’Archipel, joignit le Milo en 1207 au duché de Naxie ; mais Barberousse, capitan bacha, la soumit, avec le duché de Naxie, à l’empire de Soliman II.

Cette île abonde en mines de fer, de soufre & d’alun ; il faut la regarder comme un laboratoire naturel, où continuellement il se prépare de l’esprit de sel, de l’alun, du soufre par le moyen de l’eau de la mer & du fer des roches. Tout cela est mis en mouvement par des brasiers que le fer & le soufre y excitent jour & nuit.

Le rocher spongieux & caverneux qui sert de fondement à cette île, est comme une espece de poële qui en échauffe doucement la terre, & lui fait produire les meilleurs vins, les meilleures figues & les melons les plus délicieux de l’Archipel. La seve de cette terre est admirable ; les champs ne s’y reposent jamais. La premiere année on y seme du froment, la seconde de l’orge, & la troisieme on y cultive le coton, les légumes & les melons ; tout y vient pêle-mêle.

La campagne est chargée de toutes sortes de biens & de gibier ; on y fait bonne chere à peu de frais : le printems y offre un tapis admirable, parsemé d’anémones simples de toutes couleurs, & dont la graine a produit les plus belles especes qui se voient dans nos parterres. L’heureuse température du Milo & la bonté de ses paturages, contribuent beaucoup à l’excellence des bestiaux qu’on y nourrit. On y voit encore ces troupeaux de chevres dont les chevreaux ont été si vantés par Julius Pollux.

On ne lessive point le linge dans cette île, on le laisse tremper dans l’eau, puis on le savonne avec une terre blanche cimolée ou craie, que Dioscoride & Pline appellent la terre de Milo, parce que de leur tems la meilleure se trouvoit dans cette île.

Elle abonde en eaux chaudes minérales, en grottes & en cavernes, où l’on sent une chaleur dès qu’on y enfonce la tête. L’alun ordinaire & l’alun de plume se trouvent dans des mines qui sont à demi-lieue de la ville de Milo.

L’air de cette île est assez mal-sain ; les eaux, surtout celles des bas-fonds, y sont mauvaises à boire, & les habitans y sont sujets à des maladies dangereuses. Les femmes s’y fardent avec le suc d’une plante marine, alcyonium durum, dont elles se frottent leurs joues pour les rougir ; mais cette couleur passe promptement, & l’usage de cette poudre rouge gâte leur teint & détruit la surpeau.

Il n’y a que des grecs dans cette île, excepté le juge (cadi) qui est turc. Le vaivode est ordinairement un grec, qui exige la taille réelle & la capitation. Outre le vaivode, on élit tous les trois ans trois consuls qui s’appellent epitropi, c’est-à-dire adminif-

trateurs, intendans, parce qu’ils ont l’administration

des rentes qui se prennent sur la douane, les salines & les pierres de moulin. Tout cela ne s’afferme cependant qu’environ six mille livres de notre monnoie.

On prétend que l’île a pris son nom de mylos, qui signifie en grec littéral un moulin, du grand commerce qu’on y faisoit de moulins à bras ; mais il y a plus d’apparence qu’elle a conservé son ancien nom de Mélos, dont on a fait Milo, & que Festus dérive d’un capitaine phénicien appellé Melos. Pour ce qui est du sel, on ne le vend pas dans cette île, car la mesure ordinaire, qui pese 70 livres, se donne pour 15 sols.

Il y a deux évêques dans le Milo, l’un grec & l’autre latin ; le latin possede en tout 300 livres de rente, & n’a qu’un prêtre pour tout clergé. (D. J.)

Milo, (Géogr.) ancienne ville de Grece, capitale de l’île de ce nom, située dans la partie orientale. Elle contient, dit-on, quatre à cinq mille ames, est assez bien bâtie, mais d’une saleté insupportable, car les cochons y ont un appartement sous une arcade de chaque maison, à rez-de-chaussée, dont l’ouverture donne toujours sur la rue. Les ordures qui s’y amassent, les vapeurs des marais salans, & la disette des bonnes eaux, empoisonnent l’air de cette ville. Sa long. selon le P. Feuillée, est à 42. 31′. 30″. lat. 36. 41.

MILSUNGEN ou MELSINGEN, (Géog.) petite ville & château de l’Allemagne dans la basse-Hesse, sur la Fulde, chef lieu d’un bailliage.

MILTENBERG, (Géog.) petite ville d’Allemagne dans l’électorat de Mayence, sur le Meyn, entre Aschaffenbourg & Freudenberg. Long. 26. 36. lat. 50. 2. (D. J.)

MILTOS, s. m. (Hist. nat.) nom donné par les anciens naturalistes à ce que nous appellons crayon rouge, rubrica, ou à une espece de terre ferrugineuse ou d’ochre, dont on se servoit dans la Peinture. Quelques uns ont cru qu’ils se servoient aussi de ce mot pour désigner le cinnabre.

MILYAS, (Géog. anc.) petite contrée d’Asie entre la Pisidie & la Lycie, selon Strabon, liv. XIII. qui ajoute qu’elle s’étendoit depuis la ville de Termesse & le passage du Taurus, jusqu’aux territoires de Sagalassus & d’Apamée. Sa capitale portoit le même nom de Mylias, & ses habitans s’appelloient Milyæ ou Milyes, selon Etienne le géographe. Pline, livre III. chap. xxvij. dit qu’ils tiroient leur origine de Thrace. (D. J.)

MIMAR AGA, s. m. (Hist. mod.) officier de police chez les Turcs. C’est l’inspecteur des bâtimens publics, ou ce que nous appellerions en France grand voyer.

Son principal emploi consiste à avoir l’œil sur tous les bâtimens nouveaux qu’on éleve à Constantinople & dans les faubourgs, & à empêcher qu’on ne les porte à une hauteur contraire aux reglemens, car la maison d’un chrétien n’y peut avoir plus de treize verges d’élévation, ni celle d’un turc plus de quinze ; mais les malversations du mimar aga sur cet article, aussi bien que sur la construction des églises des chrétiens, sont d’autant plus fréquentes, qu’elles lui produisent un gros revenu. Il y a aussi une espece de jurisdiction sur les maçons du commun, appellés calfas ou chalifes. Il a droit de les punir ou de les mettre à l’amende, si en bâtissant ils anticipent sur la rue, s’ils font un angle de travers, ou s’ils ne donnent pas assez de corps & de profondeur à leurs murailles, quand même le propriétaire ne s’en plaindroit pas. Cette place est à la disposition & nomination du grand-visir. Guer. Mœurs des Turcs, tom. II.

MIMAS, (Géog. anc.) promontoire de l’Asie propre, opposé à l’île de Chio. Niger l’appelle Capo stil-